élèves
Question de :
M. Yannick Favennec
Mayenne (3e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
Question posée en séance, et publiée le 27 mars 2003
SCOLARISATION DES ENFANTS DE DEUX ANS
M. le président. La parole est à M. Yannick Favennec, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
M. Yannick Favennec. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Monsieur le ministre, vous avez déclaré lors d'une récente interview que la question de la scolarisation des enfants de deux ans devait être posée.
Outre l'intérêt que l'école peut représenter pour l'éveil des enfants avant trois ans, la scolarisation précoce est extrêmement importante en milieu rural, notamment dans ma circonscription du nord de la Mayenne.
M. Jean-Claude Perez. Dans les nôtres aussi !
M. Yannick Favennec. En effet, nos petites communes n'ont pas les moyens d'assurer financièrement la création de crèches municipales ou de haltes-garderies, et les familles dont les deux parents travaillent connaissent d'énormes difficultés pour faire garder leurs enfants de moins de trois ans, soit en raison du coût, soit en raison de l'insuffisance du nombre d'assistantes maternelles. Si la prise en charge des enfants de deux ans dès la maternelle était remise en cause ,...
M. Gérard Bapt. Mais elle est remise en cause !
M. Yannick Favennec. ... cela aurait des répercussions sur les effectifs, entraînerait des fermetures de classes, et aurait pour conséquence d'accélérer la désertification des zones rurales.
M. Jean-Claude Perez. Eh oui !
M. Yannick Favennec. A la campagne, une fermeture de classe a de graves conséquences, non seulement pour les élèves et leurs familles, mais aussi pour toute l'économie locale et la vie sociale. La présence ou non d'une école conditionne le développement rural, car c'est aussi un outil d'aménagement du territoire.
Un député du groupe socialiste. Très juste !
M. Yannick Favennec. C'est pourquoi, monsieur le ministre, je souhaiterais connaître vos orientations en ce qui concerne la scolarisation des enfants de deux ans. Et j'aimerais savoir comment le Gouvernement envisage, dans les années à venir, de concilier la nécessaire lutte contre la désertification rurale, l'intérêt pédagogique de l'enfant et le rôle de l'école dans nos campagnes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française et sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire.
M. Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire. Je voudrais vous remercier, monsieur le député, de me permettre de m'expliquer sur la question de la scolarisation à deux ans. Je crois que c'était en effet nécessaire.
M. Yves Durand. C'est plutôt nécessaire, oui !
M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. La première question à se poser concernant la préscolarisation est celle-ci : est-ce qu'elle est utile, est-ce qu'elle est dans l'intérêt de l'enfant ? (« Oui » sur les bancs du groupe socialiste.)
La deuxième observation que nous faisons,...
M. Richard Cazenave. Les socialistes veulent faire les questions et les réponses !
M. le président. Monsieur Cazenave !
M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Je crois qu'on peut aborder cette question sans préjugés idéologiques ni pédagogiques. Je vais essayer de la présenter simplement.
M. Jean-Claude Lefort. Le ministre nous reformule la question, et se la pose à lui-même ! C'est plus facile !
M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Il y a aujourd'hui à peu près 35 % des enfants de moins de trois ans qui sont scolarisés, avec des disparités très importantes. Et contrairement à ce que j'entends dire ici ou là, ce n'est pas aux élèves qui sont dans les situations sociales les plus difficiles que la préscolarisation profite le plus.
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. C'est vrai !
M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Il y a des territoires, des départements qui se sont plus engagés que d'autres. Et du coup, la scolarisation à deux ans, qui à l'origine était destinée à favoriser les élèves de ZEP, a souvent favorisé des élèves qui appartiennent à des milieux plutôt favorisés.
M. Edouard Landrain. Eh oui !
M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. La deuxième observation que nous faisons, c'est que l'effet de la préscolarisation sur la scolarité ultérieure, en particulier sur le redoublement du CP, est pratiquement nul.
M. André Chassaigne. Ce n'est pas possible de dire des choses pareilles !
M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Ce qui joue, c'est l'influence des familles, c'est le milieu. Du coup, par un paradoxe étrange, lorsqu'un enfant de deux ans est scolarisé alors qu'il est dans une situation sociale très difficile, il réussit plutôt moins bien que lorsqu'un enfant de deux ans est scolarisé alors qu'il appartient à un milieu favorable. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Je suis désolé, je décris ce que nous disent les spécialistes. Je n'ai pas inventé ces statistiques ni ces observations, elles ont été faites par les spécialistes de ces questions.
Plusieurs députés du groupe socialiste. Ce n'est pas vrai !
M. André Chassaigne. Nous, nous connaissons la réalité du terrain !
M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Cependant, comme l'a déjà dit Luc Ferry, il est hors de question de remettre en cause la scolarisation à deux ans. Ce n'est pas la peine de vous énerver, je vous répète qu'il n'en est pas question. Ce qui est en jeu, c'est de savoir comment il faut développer cette préscolarisation pour qu'elle soit bénéfique à ceux qui en ont le plus besoin, ...
M. Jean-Claude Lefort. Mieux vaut être riche qu'intelligent, voilà la réalité !
M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. ... c'est-à-dire en particulier dans les milieux où il n'y a pas d'encadrement familial suffisant, dans les endroits où il n'y a pas d'accueil en crèche suffisant, bref là où ce sera le plus profitable à l'enfant. Il ne s'agit pas de préscolariser à tout prix, il s'agit de rendre service à ceux qui en ont besoin.
M. Albert Facon. Il s'agit surtout de faire des économies !
M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. C'est dans cet esprit que nous allons continuer d'agir, de sorte que, aussi bien à la ville qu'à la campagne, nous poursuivions, lorsque ce sera nécessaire, cette préscolarisation à deux ans, mais d'une manière cohérente. Vous voyez combien sont absurdes les slogans qui voudraient nous présenter comme des ennemis de l'école ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Auteur : M. Yannick Favennec
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Enseignement maternel et primaire
Ministère interrogé : enseignement scolaire
Ministère répondant : enseignement scolaire
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 27 mars 2003