GIAT-Industries
Question de :
M. Jean-Claude Sandrier
Cher (2e circonscription) - Député-e-s Communistes et Républicains
Question posée en séance, et publiée le 2 avril 2003
GIAT INDUSTRIES
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.
M. Jean-Claude Sandrier. Madame la ministre de la défense, la question de l'avenir de GIAT Industries a été posée à plusieurs reprises dans cet hémicycle. Des milliers d'emplois doivent être supprimés et des villes et des départements vont à nouveau en subir les conséquences dramatiques. Certains, jusqu'au ministère même, se demandent si GIAT va supporter ou non « une opération chirurgicale très lourde ». A eux seuls, ces éléments justifient que l'on accorde la plus grande attention à la demande d'un moratoire formulée par les syndicats. Nous l'appuyons d'autant plus que des arguments d'ordre stratégique entrent aujourd'hui en ligne de compte, qui appellent une réflexion nouvelle.
Premier argument : il faut stopper la mainmise progressive des Etats-Unis sur les industries européennes de défense et prendre au plus vite des dispositions politiques dans ce sens. Il est urgent d'adapter GIAT au marché, dites-vous. Mais vous savez très bien que le marché le plus faussé au monde, c'est précisément celui de l'armement. Tous les grands pays protègent leur industrie d'armement. N'ayons donc pas de complexe à acheter ce que nous produisons chez nous et à instaurer une préférence communautaire.
Second argument : l'attitude des Etats-Unis sur le plan stratégique impose que nous en tirions enseignement. La question d'une politique autonome de la France et de l'Europe en matière de sécurité et de défense est posée. Cela suppose une industrie d'armement capable d'assurer notre indépendance et celle de l'Europe.
Une nouvelle réflexion est donc à engager dans le domaine de l'armement terrestre, de nouveaux choix sont à préparer. Le projet alternatif auquel demandent de travailler les syndicats et des élus impose de surseoir à toute décision hâtive qui risquerait de fragiliser davantage GIAT, voire de liquider ses principales compétences.
Madame la ministre, des circonstances politiques et stratégiques nouvelles appellent une autre approche. Etes-vous prête à accorder le délai nécessaire aux réflexions qui s'imposent et à remettre à plat le dossier GIAT au vu de ces éléments nouveaux ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur quelques bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la défense.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense. Monsieur le député, vous me croirez si je vous dis que, en arrivant au ministère de la défense, j'aurais préféré ne pas hériter du dossier GIAT dans l'état où je l'ai trouvé. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
GIAT Industries, vous le savez comme moi, aura connu, en l'espace de dix ans, six recapitalisations pour 4,4 milliards d'euros, et ce mouvement a du reste marqué une accélération au cours de ces dernières années. GIAT Industries, ce sont six plans sociaux qui ont démoralisé les personnels, il faut le comprendre, sans apporter de réelles perspectives. Chacun savait bien, et notamment au cours des derniers plans sociaux, que les projets industriels reposaient en fait sur des perspectives à court terme - c'était le cas pour le char Leclerc dont chacun savait que le programme se terminait en 2004 - ou surévaluées par rapport aux besoins c'était le cas pour les munitions.
C'est précisément, monsieur le député, parce que le Gouvernement veut conserver à la France une industrie de l'armement terrestre que nous avons décidé d'agir pour un nouveau GIAT s'appuyant sur les compétences internes de la maison et reposant sur des activités garanties non sur le court terme, mais sur le long terme.
Vous dites que le marché de l'armement est faussé. C'est un marché effectivement très difficile. Reste que les industries françaises et européennes qui ont su s'y adapter, notamment en se restructurant, y remportent des marchés significatifs - c'est le cas pour l'A400 M et pour le NH 90. Il n'y a donc aucune fatalité qui voudrait que l'on perde systématiquement de l'argent ou des contrats dans le domaine de l'armement.
Pour ce qui concerne le calendrier, l'entreprise et les services du ministère travaillent sur cette question depuis plusieurs mois. J'ai personnellement reçu, vous le savez, les syndicats et les élus. Retarder l'échéance, ce serait fragiliser encore les chances de redressement. Les syndicats l'ont du reste bien compris puisque, parallèlement à leur demande de prendre dès à présent les mesures nécessaires, ils ont lancé voilà quinze jours la procédure d'alerte, soulignant par là même combien il était urgent d'agir. Reste que cette action s'étalera évidemment sur plusieurs mois, voire plusieurs années, et supposera l'audition de tous. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
Auteur : M. Jean-Claude Sandrier
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Défense
Ministère interrogé : défense
Ministère répondant : défense
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 2 avril 2003