Question au Gouvernement n° 558 :
peines

12e Législature

Question de : Mme Christine Boutin
Yvelines (10e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

Question posée en séance, et publiée le 30 avril 2003

POLITIQUE PÉNALE ET RÉINSERTION

M. le président. La parole est à Mme Christine Boutin, pour le groupe UMP.
Mme Christine Boutin. Ma question s'adresse à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
La lutte contre l'insécurité doit reposer sur un système pénal adapté et équilibré, apte à sanctionner de façon effective et proportionnée les délits tout en préparant les détenus à leur sortie de prison. Notre collègue Jean-Luc Warsmann, dans un rapport qu'il vous a remis hier...
M. François Vannson. Un excellent rapport !
Mme Christine Boutin. ... souligne que trop de sanctions pénales restent aujourd'hui inexécutées, ouvrant ainsi la porte à la récidive.
Il apparaît essentiel de restaurer la crédibilité de notre système de sanctions, en le modernisant et en s'assurant d'une exécution rapide des décisions de justice.
Nous le savons tous, la prison ne constitue pas la seule réponse aux infractions.
Le développement des peines alternatives doit être poursuivi ; elles sont souvent des réponses mieux adaptées à certains délits et elles préparent mieux à la réinsertion, qui est à la fois l'intérêt de la société mais aussi celui des détenus. Je pense en particulier au recours à la semi-liberté, aux travaux d'intérêt général et, dans certains cas, à l'utilisation du bracelet électronique.
Monsieur le ministre, que pensez-vous des propositions de notre collègue Warsmann et quels moyens y seront consacrés ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la députée, vous avez raison de le rappeler : à ma demande, le Premier ministre a confié à Jean-Luc Warsmann une mission portant sur l'inexécution des peines - en particulier des peines alternatives à la prison - dont le taux est extrêmement préoccupant. Dans son rapport, Jean-Luc Warsmann avance le chiffre de 50 % ; jusqu'ici, l'inspection générale évoquait le chiffre de 35 %. Tel est l'ordre de grandeur.
Le faible taux d'exécution des peines alternatives à la prison amène les tribunaux à prononcer systématiquement des peines de prison, de courte puis de moyenne durée. Plus généralement, ce phénomène d'inexécution des peines est le vrai point faible de notre système pénal. C'est la raison pour laquelle j'avais suggéré qu'une étude très approfondie soit engagée. M. Warsmann l'a menée avec la collaboration d'un certain nombre de magistrats et de fonctionnaires du ministère de la justice.
Les propositions de votre collègue, qui sont très nombreuses, sont extrêmement concrètes. Elles sont de deux ordres. Certaines pourront être mises en oeuvre rapidement ; d'autres, de caractère législatif, nous donneront l'occasion, dans les prochains textes qui viendront en discussion devant vous, de déposer des amendements.
Ainsi, on pourrait donner aux tribunaux la possibilité de condamner au bracelet électronique, ab initio, alors qu'aujourd'hui ce n'est qu'un élément d'aménagement de peine. De même, et je me suis engagé à le faire dès hier, devrait-on inciter les parquets à pousser les tribunaux à prononcer dès le départ des peines de semi-liberté. C'est très rarement le cas, puisqu'on ne dénombre que 140 condamnations de ce type par an.
Nous devons mettre en place une meilleure information des juridictions sur ces systèmes de semi-liberté.
Je souhaiterais également, comme le suggère M. Warsmann, libérer le juge de l'application des peines de certaines tâches qui encombrent sa charge, et l'amener à devenir le juge du conflit ; la procédure d'application des peines serait ainsi simplifiée.
Au-delà de ce qui peut être fait immédiatement, nous devrons développer le travail d'intérêt général, qui constitue une solution extrêmement pédagogique, en particulier pour les plus jeunes. Cela peut nous permettre d'éviter la récidive, et donc l'aggravation des sanctions.
Nous devons également développer un programme dans l'esprit de ce que vous aviez suggéré vous-même lorsque vous avez étudié la situation de nos prisons : proposer au nouveau condamné, dès son accueil en prison, d'examiner comment sa situation pourra évoluer jusques et y compris sa sortie, qu'il lui faudra préparer.
Voilà quelques-unes des idées extrêmement intéressantes proposées par Jean-Luc Warsmann, qui vont nous aider à corriger ce défaut majeur de notre processus pénal que représente l'inexécution des peines. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Données clés

Auteur : Mme Christine Boutin

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Droit pénal

Ministère interrogé : justice

Ministère répondant : justice

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 30 avril 2003

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