Iraq
Question de :
M. Maxime Gremetz
Somme (1re circonscription) - Député-e-s Communistes et Républicains
Question posée en séance, et publiée le 17 octobre 2002
IRAK
M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
Mes chers collègues, laissez M. Gremetz s'exprimer tranquillement.
M. Maxime Gremetz. Monsieur le Premier ministre, après la guerre du Golfe et onze ans d'embargo, l'Irak est le théâtre d'une tragédie humaine. Un million d'Irakiens, dont 500 000 enfants, y ont perdu la vie.
M. Yves Fromion. Dites-le à Saddam !
M. Maxime Gremetz. Or, malgré les innombrables appels lancés par la communauté internationale, le président des Etats-Unis, avec l'assentiment du Congrès, tient un discours guerrier qui fait résonner à travers le monde un bruit de bottes de plus en plus assourdissant.
Selon les dernières informations, la mobilisation militaire des Etats-Unis en vue de ce qu'ils qualifient, sans vergogne, de guerre préventive est intense. Mais quelles sont les réelles motivations du Président Bush ? Est-il nécessaire de rappeler que l'Irak est le second pays producteur de pétrole de la région ? Est-il besoin également de préciser que les Etats-Unis cherchent à se libérer de leur dépendance énergétique vis-à-vis de l'Arabie Saoudite ?
Un député du groupe Union pour la démocratie française. Et bla-bla-bla !
M. Maxime Gremetz. C'est en effet en vue de satisfaire leurs intérêts économiques et géopolitiques que les Etats-Unis comptent attaquer l'Irak et s'y installer durablement. C'est ce que montre un document officiel prévoyant l'instauration d'un gouvernement militaire américain. Cette stratégie foncièrement impérialiste est fondée sur la démonstration de force, sur l'unilatéralisme et l'hégémonisme. La position officielle de l'Irak tendant à accepter de coopérer totalement avec l'ONU, qui se traduit par l'acceptation d'un retour sans condition des inspecteurs en désarmement de l'ONU, montre qu'une alternative à la guerre est possible. (« La question ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
M. le président. Elle va arriver !
M. Maxime Gremetz. La France, monsieur le ministre, doit se montrer digne de sa stature internationale en confirmant au Conseil de sécurité de l'ONU, qui va se réunir cette semaine, le refus de se prêter aux objectifs de l'administration américaine, contraires aux intérêts de tous les peuples et de la paix. Elle doit prendre ses responsabilités. (« La question ! La question ! », sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
Ma question est simple et précise : en cas de proposition de résolution des Etats-Unis, tendant à leur reconnaître un mandat international légitimant une intervention militaire en Irak, la France est-elle prête à utiliser son droit de veto au Conseil de sécurité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux affaires étrangères.
M. Renaud Muselier, secrétaire d'Etat aux affaires étrangères. Monsieur le député, notre objectif est le désarmement de l'Irak...
M. Gérard Bapt. Cela ne sert à rien !
M. le secrétaire d'Etat aux affaires étrangères. ... et ceci conformément aux résolutions du Conseil de sécurité. Cela passe, dans un premier temps, par le retour des inspecteurs en Irak dès que possible. L'Irak l'a accepté : il faut prendre Bagdad au mot.
Dans ce contexte, une nouvelle résolution du Conseil de sécurité n'est pas nécessaire juridiquement, mais elle pourrait, en confirmant la détermination de la communauté internationale et son unité, adresser un signal politique fort à l'Irak.
Une nouvelle résolution pourrait également préciser les moyens de remplacer l'efficacité des inspections. A cet égard, la France fait pleinement confiance au président de la commission de contrôle et de vérification de l'ONU, M. Blix, et au directeur exécutif de l'AEIA - l'Agence internationale de l'énergie atomique.
En cas de manquements graves de l'Irak à ses obligations, c'est au Conseil de sécurité qu'il appartient d'en tirer les conséquences et de décider, par une nouvelle résolution, des mesures à prendre. Nous n'excluons à cet égard aucune option. Tel est l'esprit de l'approche en deux temps que la France préconise.
La France rejette toute idée d'action préventive ou d'automatisme dans le déclenchement du recours à la force.
Au-delà du cas de l'Irak, il y va de l'ordre international et des principes fondamentaux sur lesquels il repose depuis plus de cinquante ans, c'est-à-dire la primauté du droit et le multilatéralisme.
La France ne transigera pas sur ces principes et n'acceptera pas, au Conseil de sécurité, un texte qui irait à leur encontre.
C'est cette approche que nous défendrons encore aujourd'hui lors du débat public au Conseil de sécurité.
M. Yves Fromion et M. Michel Bouvard. Très bien !
M. le secrétaire d'Etat aux affaires étrangères. C'est par la négociation que nous souhaitons arriver à ce résultat. En brandissant son veto dès maintenant, la France se lierait les mains et réduirait les chances de parvenir à un consensus. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle). Il nous appartiendra, le moment venu, de déterminer ce que sera le vote de la France en fonction de l'issue des négociations qui se poursuivent actuellement. A ce stade, il serait prématuré d'en dire plus. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française).
Auteur : M. Maxime Gremetz
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : affaires étrangères(SE)
Ministère répondant : affaires étrangères(SE)
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 17 octobre 2002