réforme
Question de :
M. Alain Bocquet
Nord (20e circonscription) - Député-e-s Communistes et Républicains
Question posée en séance, et publiée le 18 juin 2003
RETRAITES
M. le président. La parole est à M. Alain Bocquet, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.
M. Alain Bocquet. Monsieur le Premier ministre (« Le quorum ! le quorum ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), il y a le temps de la négociation, puis celui du débat au Parlement, aviez-vous dit. Force est de constater que la donne est changée. Vous avez ressenti le besoin d'adresser une lettre à tous les Français sur votre projet de réforme des retraites. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Plusieurs députés du groupe des député-e-s communistes et républicains. Combien ça coûte ?
M. Alain Bocquet. A moins de considérer, comme le dit Jean-François Revel, que la communication, c'est ce qui sert à expliquer que les échecs sont des succès (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), par votre initiative, vous mettez objectivement en retrait le débat parlementaire en cours. (Protestations sur les mêmes bancs.)
M. Richard Mallié. Pour ce que vous en faites !
M. Alain Bocquet. En vous adressant aussi solennellement au peuple,vous réintroduisez celui-ci dans le débat. Vous l'interpellez, et nous n'allons pas nous plaindre.
Vous le savez bien, votre projet de réforme dangereux pour le monde du travail ne passe pas comme une lettre à la poste ! (Exclamations et rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. A cause des grèves !
M. Alain Bocquet. Les grèves (« Ah oui, les grèves ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), les manifestations, les luttes diverses et nombreuses qui s'expriment en témoignent, tout comme les 65 % de Français opposés à votre réforme. (Huées sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
M. Pierre Micaux. N'importe quoi ! C'est faux !
M. Alain Bocquet. Vous dites vouloir entendre le peuple et l'écouter. Alors, allez-y, ne vous arrêtez pas en si bon chemin !
M. Jean Besson. Amnésique !
M. Alain Bocquet. Notre histoire sociale a été rythmée par de grands rendez-vous : les accords Matignon en 1936, pour les congés payés et les 40 heures ; les accords de Grenelle en 1968, pour l'augmentation des salaires et pour la reconnaissance du droit syndical. Comme on le sait, une majorité de Français se prononcent pour la reprise des négociations avec les organisations syndicales non signataires. Monsieur le premier ministre, vous vous honoreriez, à l'image de vos illustres prédécesseurs, en convoquant une conférence sur les retraites à Matignon qui réunirait l'ensemble des partenaires sociaux afin de conclure un nouvel accord qui recueille l'assentiment de tous. sur la réforme des retraites, qui recueille l'assentiment de tous. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Richard Mallié. Quel culot !
M. Alain Bocquet. Et sur cette base, comme il y a une suite logique à l'initiative que vous avez prise d'adresser une lettre aux Français, le peuple doit pouvoir vous répondre (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) aussi solennellement que vous l'avez fait. Il faut donc le consulter. (« La question ! » sur les mêmes bancs.)
M. le président. Monsieur Bocquet...
M. Alain Bocquet. Il faut qu'il puisse se prononcer et trancher ce débat par voie de référendum. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Le peuple doit avoir le dernier mot sur un projet qui le concerne au plus haut point et qui engage son avenir et celui des générations de demain. (« La question ! » sur les mêmes bancs.) Chacun le reconnaît, vous en premier, il s'agit d'un enjeu de société, j'ajouterai même de civilisation.
M. le président. Merci, monsieur Bocquet.
M. Alain Bocquet. Le débat national que vous venez de réintroduire dans le pays doit prendre toute sa dimension démocratique. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur quelques bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le président Bocquet, nul n'est plus mal placé que vous (« Oh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains) pour prétendre que le Gouvernement cherche à escamoter le débat parlementaire. En effet, depuis maintenant six jours, nous débattons dans cet hémicycle de la réforme sur les retraites, et nous aurions pu hier soir, si vous n'aviez pas demandé à minuit cinq la vérification du quorum, (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) voter l'article 2 d'un projet de loi qui en compte quatre-vingt un.
M. Bernard Roman. La majorité n'était pas là !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Pour ce qui est du Premier ministre, il a bien le droit d'écrire aux Français,...
M. François Hollande. Avec quel argent ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... pour les informer sur une réforme fondamentale qui concerne la vie de chacun d'entre eux. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
Mme Ségolène Royal. Qui paye ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le Premier ministre a même, monsieur Bocquet, le devoir de le faire, compte tenu de la campagne de désinformation sans précédent qui a accompagné cette réforme (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. Maxime Gremetz. Le peuple a le droit de répondre !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Oui, monsieur Bocquet, il y a urgence à réformer, en raison du choc démographique que, depuis des jours et des jours, sur les bancs du groupe communiste, vous vous employez à minimiser.
Oui, monsieur Bocquet, il y a urgence à sauver le régime de retraite par répartition. Notre réforme ne baisse pas le niveau des pensions, contrairement à ce que l'on lit ici ou là (« Si ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), elle va même l'améliorer pour les petites retraites, avec la garantie de toucher 85 % du SMIC. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Oui, monsieur Bocquet, cette réforme est une réforme de justice sociale, puisqu'elle met fin à une inégalité insupportable entre le secteur public et le secteur privé.
Non, monsieur Bocquet, cette réforme ne remet pas en cause la retraite à soixante ans, comme l'affirment beaucoup des publications auxquelles le Premier ministre a voulu répondre. (« Mais si ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Monsieur Bocquet, cette lettre vous gêne parce qu'elle dit la vérité. (« Non ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.- Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Elle vous gêne parce qu'elle révèle une différence fondamentale entre la majorité actuelle et la majorité et la majorité précédente : cette différence, c'est le courage ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
Auteur : M. Alain Bocquet
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Retraites : généralités
Ministère interrogé : affaires sociales, travail et solidarité
Ministère répondant : affaires sociales, travail et solidarité
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 18 juin 2003