croissance
Question de :
M. Éric Besson
Drôme (2e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 26 juin 2003
DÉGRADATION DE LA SITUATION
ÉCONOMIQUE ET SOCIALE
M. le président. La parole est à M. Eric Besson, pour le groupe socialiste.
M. Eric Besson. Monsieur le président, ma question, qui s'adresse à M. le Premier ministre, porte sur la dégradation de la situation économique, sociale et budgétaire de notre pays.
M. Jean-Michel Ferrand. L'héritage !
M. Eric Besson. La croissance devrait être de 0,8 % en 2003. Elle sera en toute hypothèse inférieure à la moyenne de l'Union européenne.
M. Jean-Michel Ferrand. Après vingt ans de socialisme !
M. Richard Mallié. Changez de disque !
M. Eric Besson. Nous ferons donc moins bien que nos partenaires européens, alors que nous avions fait mieux qu'eux de 1997 à 2002.
L'emploi ne va pas mieux : notre pays a enregistré 150 000 chômeurs de plus en un an et, pour la première fois depuis 1996, des emplois on été détruits au premier trimestre.
Les déficits sont en train de se creuser, qu'il s'agisse de l'assurance maladie ou du budget de l'Etat.
La Commission européenne vous met directement en cause, monsieur le Premier ministre, en rappelant que les deux tiers du déficit sont liés à vos décisions, à celles que vous avez prises depuis un an. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Augustin Bonrepaux et M. Patrick Lemasle. Exact !
M. Richard Mallié. Parlez-nous plutôt de votre bilan !
M. Eric Besson. Ce déficit serait un moindre mal s'il avait servi la consommation et la croissance. Mais vos baisses d'impôts, parce qu'elles n'ont touché que les plus aisé (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire),...
M. Lucien Degauchy. Changez de discours !
M. Eric Besson. ... n'ont fait qu'augmenter le taux d'épargne, comme nous l'avions prévu et comme nous vous l'avions dit dans cet hémicycle (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
Cette situation nous navre, monsieur le Premier ministre, car ce sont nos concitoyens les plus modestes qui en sont les premières victimes.
Ma question sera donc double.
D'abord, et cela vous concerne personnellement, probablement jamais sous la Ve République un Premier ministre n'avait donné autant que vous le sentiment de ne pas piloter la politique économique de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Patrick Lemasle. Très juste !
Mme Martine David. Qui est le pilote ?
M. Eric Besson. Allez-vous donc enfin vous impliquer personnellement et mettre, si j'ose dire, les mains dans le cambouis ?
Je vous interrogerai ensuite sur votre stratégie.
Vous vous réfugiez derrière des slogans publicitaires du type « libérer les énergies ».
M. Jean-Michel Ferrand. Ridicule !
M. Eric Besson. Mais pour l'heure, pardonnez-moi de vous le dire, vous ne libérez rien du tout, si ce n'est le chômage.
Quand allez-vous considérer que la situation est suffisamment grave pour changer de stratégie ou, plus simplement, pour en adopter une ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur Besson, vous me demandez quand nous changerons de politique ? Nous n'en changerons pas car nous considérons que celle que nous conduisons est bonne. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Je ne vous répéterai pas tout ce qui a été dit sur le sujet, car il faut reconnaître les faits : c'est l'entreprise qui est à la base de la croissance et c'est le devoir de l'Etat que de faciliter l'environnement dans lequel elle peut se développer. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Vous me donnez l'occasion de rappeler, car vous ne l'avez peut-être pas lu récemment dans un journal, qu'au 1er juillet, c'est-à-dire dans quelques jours, nonobstant toutes les baisses d'impôts que nous continuerons de mettre en oeuvre,...
Mme Martine David. Avec quel argent ?
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... nous pourrons, grâce à une sortie par le haut, si je puis dire, sur le SMIC, augmenter le pouvoir d'achat d'un million de smicards - c'est-à-dire cinq millions de Français - de 5,25 %. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Mme Martine David. Vous y êtes obligé !
M. Albert Facon. Il faut changer de journal !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Personne dans cette enceinte ne peut se souvenir du moment où, les cinquante dernières années, on visait un tel objectif !
Nous avons une politique qui consiste à penser à la fois au producteur et au consommateur.
Mme Martine David. Où est le pilote ?
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Le pilote, madame, il est là : c'est le Premier ministre, à la tête du Gouvernement. Rassurez-vous : le Premier ministre est parfaitement au fait de toutes les évolutions de notre politique économique.
M. Jean-Pierre Brard. Quel homme !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je me permets de vous rappeler que nous sommes dans un monde où l'économie n'est plus sous le contrôle exclusif d'un gouvernement : nous sommes non seulement en Europe, mais aussi dans l'économie mondiale. Nous sommes, comme les autres, dépendants d'une situation dont je n'ai jamais caché qu'elle n'était pas fameuse à court terme. Je l'ai déjà dit et je le répète. Mais contrairement à ce que vous avez indiqué, nous faisons un peu moins mal que la moyenne des pays qui nous entourent. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Quant aux prévisions de l'INSEE, ce ne sont que des prévisions. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. Augustin Bonrepaux. Mais les faits sont têtus !
M. le président. Monsieur Bonrepaux, s'il vous plaît !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Après avoir lu attentivement - comme vous l'avez sans doute fait, vous aussi - le document de l'INSEE, ma vision est moins pessimiste.
Je pense qu'à partir des prochains mois, notamment dès la rentrée de septembre, nous connaîtrons, du côté des entreprises, une reprise et des investissements et de l'activité en matière de stockage.
Je vous rassure donc : il y a un pilote dans l'avion, c'est le Premier ministre. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Il y a aussi quelques copilotes.
Nous savons où nous allons, et nous irons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
M. Augustin Bonrepaux. Vous ne savez pas où vous allez ! C'est tout le problème !
M. le président. Monsieur Bonrepaux, ne prenez pas trop de vitamines ! Cela vous calmera un peu. (Sourires.)
Auteur : M. Éric Besson
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique économique
Ministère interrogé : économie
Ministère répondant : économie
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 26 juin 2003