Question au Gouvernement n° 890 :
politique de l'éducation

12e Législature

Question de : M. Michel Lefait
Pas-de-Calais (8e circonscription) - Socialiste

Question posée en séance, et publiée le 5 novembre 2003

ECOLE MATERNELLE

M. le président. La parole est à M. Michel Lefait, pour le groupe socialiste.
M. Michel Lefait. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale.
Monsieur le ministre, l'école maternelle joue un rôle essentiel. La nôtre est d'ailleurs considérée comme l'une des meilleures par les pédagogues du monde entier. C'est en effet l'école maternelle qui permet à l'enfant d'acquérir, dès l'âge de deux ans, un certain nombre de notions, de valeurs et d'apprentissages sur lesquels il pourra ensuite construire son cursus scolaire. Bref, l'école maternelle rétablit un tant soit peul'égalité des chances de tous les petits Françaisdevant la vie.
Or, il se trouve qu'il y a quelques jours, le nouveau recteur de l'académie de Lille a tenu devant un auditoire d'enseignants et de parents d'élèves des propos qui nous font redouter le pire quant à l'avenir de la scolarisation des tout petits. Il a clairement dit qu'un enseignant n'avait pas besoin d'en être à bac + 5 pour regarder des enfants dormir, ...
M. Yves Durand. C'est scandaleux !
M. Michel Lefait. ... laissant ainsi entendre que l'école maternelle se résumait à une simple garderie.
De même, l'on répand complaisamment l'idée selon laquelle la scolarisation en maternelle dès l'âge de deux ans profiterait d'abord aux familles favorisées. Venez donc voir, monsieur le ministre, si dans l'académie de Lille - où 65 % des enfants de deux ans sont scolarisés -, disposer de deux modestes salaires dans un foyer vous range dans la catégorie des riches et des privilégiés !
Je vous invite à venir vérifier par vous-même si, dans le Nord-Pas-de-Calais, région sinistrée entre toutes, on n'a pas le plus grand besoin, pour rattraper de nombreux retards, que les enfants bénéficient d'une scolarité précoce !
Monsieur le ministre, face à la menace sournoise et récurrente qui pèse depuis quelque temps sur l'école maternelle, ma question est simple :...
M. Richard Mallié. Enfin la question !
M. Michel Lefait. ... sauf à vouloir encore transférer des charges supplémentaires sur des communes qui n'en peuvent plus, que comptez-vous faire concrètement, avec le budget 2004 de l'éducation nationale, pour que s'applique partout la loi du 10 juillet 1989, qui a posé les fondements d'une école maternelle à la française, véritablement réductrice de la fracture sociale ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire. Monsieur le député Lefait, il faudrait éviter de mélanger deux questions. La première concerne l'école maternelle pour les enfants de trois ans.
De nombreux députés du groupe socialiste. Deux ans !
M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. En France, celle-ci n'est aucunement menacée, malgré ce qu'on essaie, une fois de plus, de laisser croire du côté gauche de l'hémicycle. (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Tout autre est la question de la préscolarisation des enfants de deux ans. Vous nous avez interrogés à de nombreuses reprises sur ce point, et je vais vous répéter des choses simples.
D'abord, 32 % des enfants sont aujourd'hui préscolarisés à deux ans, et toutes les observations montrent que cette préscolarisation n'a aucun impact sur le taux de redoublement en CP. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Vives protestations, puis huées sur les bancs du groupe socialiste.) Toutes les observations - même lorsqu'elles émanent vos amis politiques - montrent qu'elle bénéficie surtout aux enfants de cadres, aux enfants d'immigrés et aux enfants étrangers, et que, dans les milieux modestes, elle n'a pas d'impact sur la suite de la scolarité. (Cris et claquements de pupitre sur les bancs du groupe socialiste.)
Plusieurs députés du groupe socialiste. Non ! C'est faux !
M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire. Nous continuerons à accueillir les enfants de deux ans lorsque c'est nécessaire. Vous savez comme moi que la scolarisation des tout-petits s'est faite en fonction des variations de la carte scolaire : lorsqu'on ne voulait pas fermer une école, on accueillait les tout-petits - et on a sans doute bien fait. (Protestations véhémentes sur les bancs du groupe socialiste.)
Tous les hurlements que vous pourrez pousser ne changeront rien aux observations strictes des services de l'éducation nationale. (Huées sur les bancs du groupe socialiste.)
Il est certainement souhaitable que l'école assure l'accueil des tout-petits là où aucun autre moyen d'accueil n'est disponible - mais il s'agit là d'une raison sociale, et non scolaire. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Nous assurons cet accueil lorsqu'il répond à des besoins sociaux, mais vous ne devez pas essayer de faire croire qu'il en va de la carrière scolaire des enfants qu'ils soient scolarisés à un âge où ils ne savent même pas leur nom ou à l'âge normal de trois ans ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Huées sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous en prie, montrez-vous capables d'écouter des opinions différentes des vôtres !

Données clés

Auteur : M. Michel Lefait

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Enseignement maternel et primaire

Ministère interrogé : enseignement scolaire

Ministère répondant : enseignement scolaire

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 novembre 2003

partager