taxes piscicoles
Question de :
M. Jean-Louis Bianco
Alpes-de-Haute-Provence (1re circonscription) - Socialiste
M. Jean-Louis Bianco attire l'attention de M. le ministre de l'écologie et du développement durable sur les conséquences sur la pêche de loisir et le milieu aquatique du projet de loi sur l'eau. Ce texte prévoit, tout d'abord, la fusion des polices de l'eau et de la pêche. En effet, un projet d'ordonnance de simplification du droit présenté en annexe du projet de loi sur l'eau tend à unifier les deux régimes existants de protection des eaux. Le premier est issu de la loi « pêche » de 1984 et le second de la loi « eau ». Le régime « pêche » est strict puisqu'il soumet à autorisation administrative tous les travaux susceptibles de nuire au peuplement piscicole. Au contraire, le régime « eau » repose essentiellement sur la formule de la déclaration, moins contraignante mais moins protectrice que l'autorisation. La fusion des deux régimes vise à aligner le régime « pêche » sur le régime « eau », évolution qui inquiète fortement les pêcheurs, d'autant plus que la place de la déclaration serait encore élargie par une mesure réglementaire visant à assouplir la nomenclature des travaux dangereux. Il lui demande donc de faire connaître les garanties qu'il compte imposer en vue d'une protection effective de l'environnement. Il s'agit ensuite de la réforme des redevances et des cotisations qui constituent l'architecture financière de la pêche de loisir en France. Les cotisations versées par les pêcheurs seraient de deux natures. Chaque pêcheur devrait acquitter une cotisation statutaire destinée à financer l'association agréée à laquelle il est rattaché, mais aussi financer un « fonds du milieu aquatique » chargé de missions de service public. Il demande s'il ne lui semble pas opportun de différentier clairement la tranche correspondant à la cotisation statutaire de celle qui alimente le fonds de péréquation, dans le but de garantir aux pêcheurs que la réforme prévue n'engendrera pas de hausse de leurs cotisations. Il lui demande également quelles garanties sont envisagées pour assurer aux structures de pêche que la redevance n'obère pas de façon substantielle leurs ressources.
Réponse en séance, et publiée le 9 mars 2005
CONSEQUENCES DU PROJET DE LOI SUR L'EAU
SUR LA PECHE DE LOISIR
M. Jean-Louis Bianco. Monsieur le ministre de l'écologie et du développement durable, j'appelle votre attention sur les conséquences, pour la pêche de loisir et pour le milieu aquatique, du projet de loi sur l'eau.
Ce texte, vous le savez, prévoit tout d'abord la fusion des polices de l'eau et de la pêche. En effet, un projet d'ordonnance de simplification du droit présenté en annexe du projet de loi sur l'eau tend à unifier les deux régimes existants de protection des eaux. Le premier est issu de la loi sur la pêche de 1984 et le second provient de la loi sur l'eau. Le régime pour la pêche est strict puisqu'il soumet à autorisation administrative tous les travaux susceptibles de nuire au peuplement piscicole. Au contraire, le régime pour l'eau repose essentiellement sur la formule de la déclaration, moins contraignante mais aussi évidemment moins protectrice que l'autorisation. La fusion des deux régimes vise à aligner le régime de la pêche sur le régime de l'eau, évolution qui inquiète fortement les pêcheurs, d'autant plus que la place de la déclaration serait encore élargie par une mesure réglementaire visant à assouplir la nomenclature des travaux dangereux. C'est pourquoi je vous demande de faire connaître les garanties que vous comptez imposer en vue d'une protection effective de l'environnement.
Mon second sujet de préoccupation, c'est la réforme des redevances et des cotisations qui constituent l'architecture financière de la pêche de loisir en France. Les cotisations versées par les pêcheurs seraient désormais de deux natures. Chaque pêcheur devrait acquitter une cotisation destinée à financer l'association agréée à laquelle il est rattaché, mais aussi abonder un " fonds du milieu aquatique " chargé de missions de service public, à travers une redevance que les associations devront verser aux agences de l'eau. Monsieur le ministre, ne vous semble-t-il pas opportun de différencier clairement la partie correspondant à la cotisation statutaire de celle qui alimente le fonds de péréquation, afin de garantir aux pêcheurs que la réforme prévue n'engendrera pas de hausse de leurs cotisations ?
Par ailleurs et surtout, les arbitrages gouvernementaux récents prévoiraient de fixer le plafond de la redevance due par les pêcheurs à 21 euros par carte complète, au profit des agences de l'eau. Lors des discussions préalables avec l'Union nationale pour la pêche en France et la protection du milieu aquatique, le Gouvernement avait envisagé un taux plafond de 10 euros pour cette taxe. L'augmentation, si elle était confirmée, de 10 à 21 euros aboutirait à faire financer par les pêcheurs associatifs des missions régaliennes de police de l'eau au détriment des missions d'intérêt général assurées par les structures piscicoles qui n'auront plus les moyens de les financer.
Le Gouvernement peut-il apaiser les légitimes inquiétudes des pêcheurs, préciser ses intentions ? Quelles garanties comptez-vous offrir pour assurer aux structures de pêche que la redevance n'obèrera pas de façon substantielle leurs ressources nécessaires à l'exercice de leurs missions de service public ? Enfin, pourquoi les pêcheurs seraient-ils les seuls utilisateurs des ressources aquatiques à payer une taxe pour les agences de l'eau ?
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'écologie et du développement durable.
M. Serge Lepeltier, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur Jean-Louis Bianco, je suis particulièrement heureux de répondre à votre question alors que je vais présenter demain, en conseil des ministres, le projet de loi sur l'eau qui, comme vous le savez, a fait l'objet de beaucoup de discussions depuis de nombreuses années. La protection et la restauration des milieux aquatiques constituent l'objectif central de ce projet de loi qui vise à atteindre en 2015 un bon état écologique des eaux. Mais vingt ans après la loi sur la pêche de 1984 et douze ans après la loi sur l'eau de 1992, il apparaît que ces deux lois, comme vous l'avez dit d'ailleurs, ont superposé deux régimes différents, l'un déclaratif et l'autre d'autorisation, pour le même objectif : préserver la qualité de nos cours d'eau. Il en résulte une lourdeur de procédure pour l'usager. Les services administratifs sont accaparés par l'instruction administrative des dossiers et ne peuvent consacrer suffisamment de temps aux contrôles sur le terrain. C'est pourquoi le Gouvernement a souhaité simplifier et unifier la police de l'eau, de la pêche et des milieux aquatiques pour la rendre plus efficace.
Par ailleurs, le régime de déclaration au titre de la loi sur l'eau pour réaliser des travaux sera renforcé pour permettre à l'administration de s'opposer à ceux-ci en cas de risque important pour le milieu aquatique.
Parallèlement, le Gouvernement a mis en place une réforme des services de police de l'eau visant à créer un service unique de police de l'eau par département, là où cette activité est aujourd'hui exercée parfois par huit services différents. Cette réforme se mettra progressivement en place en 2005 et en 2006.
S'agissant de la réforme des redevances payées par les pêcheurs, il est prévu de faire évoluer le Conseil supérieur de la pêche vers un Office national de l'eau et des milieux aquatiques - l'ONEMA -, aux missions d'expertise et de connaissance larges, tandis qu'une fédération nationale de la pêche sera créée. La fédération nationale et les fédérations départementales de pêche devront notamment mener des missions d'intérêt général élargies en matière de protection et de gestion des milieux aquatiques, de surveillance des milieux piscicoles, d'éducation et de formation à l'environnement. Ces missions sont très importantes. Rien n'interdira à la fédération nationale de créer de son propre chef un fonds du milieu aquatique alimenté par une cotisation spécifique des pêcheurs pour mener à bien ces missions d'intérêt général. Il est aussi possible que ce fonds du milieu aquatique, dans le souci de bien identifier le budget alloué aux missions d'intérêt général, soit mentionné dans les statuts-types de la fédération dont le projet de loi prévoit qu'ils soient arrêtés par le ministre.
Je suis prêt à ouvrir ce débat avec les pêcheurs, afin que nous trouvions ensemble la meilleure solution, et aussi naturellement avec les parlementaires.
Quant aux garanties que vous me demandez sur la redevance pour protection du milieu aquatique, qui sera désormais payée par les pêcheurs aux agences de l'eau, je vous indique que je suis très attaché à ce que les taux fixés par les agences n'entraînent aucune augmentation globale pour les pêcheurs. Et je suis également très attaché à ce que les fédérations de pêche puissent parfaitement remplir leurs nouvelles missions d'intérêt général.
J'ai reçu hier le président de l'Union nationale de la pêche en France, Claude Roustan, et nous avons pu trouver une solution en fixant le taux plafond à 10 euros. Ce taux est inscrit dans le projet de loi que je présenterai demain en conseil des ministres.
Auteur : M. Jean-Louis Bianco
Type de question : Question orale
Rubrique : Chasse et pêche
Ministère interrogé : écologie
Ministère répondant : écologie
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 8 mars 2005