Question orale n° 112 :
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12e Législature

Question de : M. Émile Blessig
Bas-Rhin (7e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

La convention du 20 octobre 2000 signée entre le M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche et les présidents des trois collectivités départementales et régionale d'Alsace se fixait pour objectif la généralisation d'un enseignement précoce de l'allemand à hauteur de trois heures par semaine pour l'ensemble des classes de la maternelle et de l'école élémentaire et l'extension des classes paritaires pour répondre à la demande des parents d'élèves. Les récentes décisions du Conseil d'Etat annulant les arrêtés et les circulaires relatifs à l'enseignement bilingue par immersion et l'enseignement bilingue à parité horaire suscitent une réelle inquiétude auprès de la population attachée à la sauvegarde de la langue régionale, sachant que plus de 10 000 enfants sont actuellement scolarisés dans le système paritaire en Alsace. La décision de justice du 29 novembre 2002 du Conseil d'Etat s'appuie principalement sur l'article 2 de la Constitution et sur la loi du 4 août 1994. Cette décision intervenant après le débat sur la modification constitutionnelle au cours duquel il n'a pas semblé opportun de modifier l'article 2 de la Constitution, il apparaît nécessaire d'adapter la loi du 4 août 1994, pour permettre à l'école républicaine de contribuer à la sauvegarde des langues régionales. Bien que précisant « qu'il n'entend nullement contester la nécessité de sauvegarder le patrimoine que constituent les langues régionales ni encore moins s'ériger en juge des méthodes pédagogiques », le Conseil d'Etat, dans le communiqué de presse diffusé à l'occasion de sa décision, a néanmoins considéré « que là où il faudrait sans doute une loi, un arrêté et une circulaire du ministre ne suffisent pas. » Compte tenu de ce qui précède, M. Emile Blessig souhaiterait être informé des initiatives que le Gouvernement entend prendre, et dans quels délais, pour donner à l'enseignement bilingue des bases législatives claires et non équivoques. De plus, il souhaiterait que l'Alsace soit associée aux groupes de travail qui vont être mis en place avec les représentants du Pays basque pour étudier comment résoudre le problème des langues régionales.

Réponse en séance, et publiée le 5 février 2003

CONDITIONS D'ENSEIGNEMENT
DES LANGUES RÉGIONALES

M. le président. La parole est à M. Emile Blessig, pour exposer sa question n° 112 relative aux conditions d'enseignement des langues régionales.
M. Emile Blessig. Monsieur le ministre délégué à l'enseignement scolaire, la convention du 20 octobre 2000 signée entre M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche et les présidents des trois collectivités départementales et régionale d'Alsace se fixait pour objectif la généralisation d'un enseignement précoce de l'allemand, à hauteur de trois heures par semaine pour l'ensemble des classes de la maternelle et de l'école élémentaire, et l'extension des classes paritaires, pour répondre à la demande des parents d'élèves.
Les récentes décisions du Conseil d'Etat annulant les arrêtés et les circulaires relatifs à l'enseignement bilingue par immersion et l'enseignement bilingue à parité horaire, suscitent une réelle inquiétude auprès d'une population attachée à la sauvegarde de la langue régionale, sachant que plus de 10 000 enfants sont actuellement scolarisés dans le système paritaire en Alsace.
La décision du Conseil d'Etat du 29 novembre 2002 s'appuie principalement sur l'article 2 de la Constitution et sur la loi du 4 août 1994. Cette décision intervenant après un débat à l'issue duquel il n'a pas semblé opportun de modifier l'article 2 de la Constitution, il apparaît nécessaire d'adapter la loi du 4 août 1994, pour permettre à l'école républicaine de contribuer à la sauvegarde des langues régionales. Bien que précisant « qu'il n'entend nullement contester la nécessité de sauvegarder le patrimoine que constituent les langues régionales, ni encore moins s'ériger en juge des méthodes pédagogiques », le Conseil d'Etat, dans le communiqué de presse diffusé à l'occasion de sa décision, a néanmoins considéré « que là où il faudrait sans doute une loi, un arrêté et une circulaire du ministre ne suffisent pas. »
Compte tenu de ce qui précède, je souhaiterais savoir, monsieur le ministre, quelles initiatives le Gouvernement entend prendre, et dans quels délais, pour donner à l'enseignement bilingue des bases législatives claires et non équivoques. De plus, je souhaiterais que l'Alsace soit associée aux groupes de travail qui vont être mis en place avec les représentants du pays Basque pour étudier les moyens de résoudre le problème des langues régionales.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire.
M. Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire. Monsieur le député, les langues régionales, vous l'avez rappelé, et nous le savons depuis longtemps au ministère de l'éducation nationale, sont un outil de développement culturel dans l'ensemble des régions dans lesquelles elles sont enseignées. Elles sont par ailleurs une part inaliénable de notre patrimoine national.
Il convient donc de les développer, de les promouvoir et de les protéger lorsque cela s'avère nécessaire. Cela, bien sûr, dans le respect des lois de la République et des principes qui la fondent, dont celui de l'unité de la langue.
Je tiens à vous rassurer, monsieur le député, ainsi que l'ensemble des parlementaires qui connaissent dans leur région une forte tradition d'apprentissage des langues régionales - je pense aux représentants de la Bretagne, du Sud-Ouest et de l'Est. En effet, la décision de la haute juridiction administrative du 29 novembre 2002 n'a jamais fait peser de menace réelle sur cet enseignement. Au contraire, elle permet de clarifier le cadre méthodologique de l'enseignement « bilingue » des langues régionales dans les établissements scolaires.
Je vous propose, pour répondre exactement à votre question, de replacer la décision du Conseil d'Etat du 29 novembre 2002, dont vous craignez les effets, si je vous comprends bien, sur l'enseignement des langues régionales, dans l'ensemble du contexte législatif les régissant.
Depuis la loi du 11 janvier 1951 sur l'enseignement des langues et dialectes locaux, dite loi Deixonne, de nombreux textes réglementaires ont organisé l'enseignement des langues régionales et en ont précisé la place et les modalités : la circulaire du 30 décembre 1983, celle du 23 avril 1995 - c'est moi-même qui l'avais signée en tant que directeur du cabinet du ministre - et celle du 5 septembre 2001.
La décision du Conseil d'Etat du 29 novembre 2002 ne concerne donc qu'une forme d'enseigenement des langues régionales : la méthode dite de l'immersion, considérée comme incompatible avec la loi du 4 août 1994, qui dispose que la langue d'enseignement est le français. Et, comme vous le savez d'ailleurs, ce sont plus, si je puis dire, des affaires bretonnes qu'alsaciennes qui étaient visées ici.
Cette décision ne remet pas en cause l'enseignement bilingue à « parité horaire » tel qu'il existe dans nombre d'écoles et d'établissements, et que vous défendez. Le juge administratif exige simplement, pour ce qui concerne cette méthode d'apprentissage, une définition rigoureuse de la répartition des horaires entre le français et la langue régionale enseignée afin que soit garantie la parité des enseignements des différentes disciplines en français.
Nous avons pris acte de ces recommandations de la haute juridiction. Les textes réglementaires concernant uniquement ces questions techniques sont ainsi en cours d'élaboration et seront présentés au Conseil supérieur de l'éducation au mois de mars ; je viens d'en informer par écrit les rectrices et recteurs d'académie. Le dispositif réglementaire d'enseignement des langues régionales sera ainsi pleinement actualisé, sans être en rien pénalisé. Je peux donc vous rassurer, la décision du Conseil d'Etat n'aura pas d'effet direct sur les 10 000 enfants actuellement scolarisés suivant le système en vigueur dans votre région.
S'agissant de la constitution d'éventuels groupes de travail sur cette question, il en existe déjà dans chaque académie concernée par la question des langues régioniales. C'est le cas dans le Pays basque, comme, vous le savez, dans l'académie de Strasbourg.

Données clés

Auteur : M. Émile Blessig

Type de question : Question orale

Rubrique : Enseignement

Ministère interrogé : jeunesse et éducation nationale

Ministère répondant : jeunesse et éducation nationale

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 3 février 2003

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