Question orale n° 1212 :
DOM : Guadeloupe

12e Législature

Question de : M. Joël Beaugendre
Guadeloupe (3e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Joël Beaugendre appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les disparités existantes entre les pratiques des services fiscaux de la Martinique et ceux de la Guadeloupe, dans le cadre de la politique de régularisation des occupants de la zone des cinquante pas géométriques. En effet, les prix de cession en Martinique seraient 30 % à 50 % inférieurs à ceux de la Guadeloupe. Bien que le marché foncier du département guadeloupéen présente des caractères comparables, les prix de cession sont 30 à 50 % plus élevés que ceux proposés par la direction des services fiscaux de la Martinique. Les modalités pratiques de fixation des prix étant laissées à la libre appréciation des services fiscaux, l'on pourrait penser que cette différence de traitement entre les deux départements trouve son origine dans une interprétation administrative divergente, notamment de la notion de terrain nu existante dans la loi du 30 décembre 1996 ; la valeur vénale du terrain nu devant en principe permettre d'établir le prix de cession des parcelles dites en cinquante pas géométriques. En Guadeloupe, la pratique d'évaluation des prix de cession de ces terrains se ferait d'après la valeur de terrains viabilisés et non pas d'après celle de parcelles non construites, et hors travaux de viabilisation ; cette dernière valeur correspondrait mieux à la notion de terrain nu introduite dans la loi de 1996. Ce mode de calcul ne semble pas prendre en compte le PIB de la Guadeloupe, inférieur à celui de la Martinique et ne facilite nullement l'acquisition de parcelles principalement occupées par des personnes aux revenus modestes, par des personnes âgées installées dans cette zone depuis 40 voire 50 ans et qui représentent un volume non négligeable des demandes de régularisation. Nombreuses sont les cessions qui n'aboutissent pas du fait d'un écart important entre l'évaluation du bien et la capacité contributive du demandeur même après l'application du dispositif d'aide financière de l'État. Le caractère social de la loi ne semble donc pas être la priorité, alors que les dispositions légales l'auraient accentué, notamment en prévoyant un mécanisme d'allègement de la charge de l'acquéreur sous forme d'aide de l'Etat. Dès lors, il est important que, en Guadeloupe la cession des parcelles ne soit pas assimilée à une vente occasionnelle d'un bien domanial. Si la régularisation prévue par la loi du 31 décembre 1996 apparaît comme un instrument pour l'amélioration du cadre de vie, le développement et la gestion urbaine du territoire communal, sa mise en oeuvre dans l'archipel guadeloupéen semble être préjudiciable à ses habitants. En conséquence il lui demande quelles décisions précises il entend prendre pour limiter les effets des disparités de traitement des citoyens selon leur implantation en Guadeloupe ou en Martinique, et pour faciliter l'accès à la propriété de familles soucieuses de régulariser leur situation.

Réponse en séance, et publiée le 4 mai 2005

PRIX DE CESSION DES TERRAINS DE LA ZONE DES CINQUANTE PAS GEOMETRIQUES EN GUADELOUPE

Mme la présidente. La parole est à M. Joël Beaugendre, pour exposer sa question, n° 1212, relative au prix de cession des terrains de la zone des cinquante pas géométriques en Guadeloupe.
M. Joël Beaugendre. Monsieur le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, je voudrais avant tout vous remercier. En effet, le Gouvernement, à la suite d'une question que je lui avais posée, a envoyé une mission en Guadeloupe et en Martinique pour étudier le problème crucial des cinquante pas géométriques, car la loi votée en 1996 pose plusieurs problèmes d'application.
J'appelle ce matin votre attention sur les disparités existant entre les prix établis par les services fiscaux de Martinique et ceux de la Guadeloupe dans le cadre de la politique de régularisation des occupants de la zone des cinquante pas géométriques.
En effet, les prix de cession des parcelles régularisables, au titre de la loi Littoral, seraient en Martinique 30 à 50 % inférieurs à ceux de la Guadeloupe, alors que le coût des terrains situés en dehors de la zone des cinquante pas est plus élevé en Martinique.
Les modalités pratiques de fixation des prix étant laissées à la libre appréciation des services fiscaux, on pourrait penser que cette différence de traitement entre les deux départements trouve son origine dans une interprétation administrative divergente, notamment sur la notion de terrain nu existant dans la loi du 30 décembre 1996. En principe, le prix de cession des parcelles dites en zone des cinquante pas géométriques est établi en fonction de la valeur vénale du terrain nu.
Or, en Guadeloupe, l'évaluation des prix de cession de ces terrains serait établie par rapport à la valeur de terrains viabilisés et non à celle des parcelles non construites et hors travaux de viabilisation. Cette dernière valeur correspondrait mieux à la notion de terrain nu introduite dans la loi de 1996.
Ce mode de calcul ne semble pas prendre en compte le PIB de la Guadeloupe, inférieur à celui de la Martinique, et ne facilite nullement l'acquisition de parcelles principalement occupées par des personnes aux revenus modestes ou par des personnes âgées installées dans cette zone depuis quarante, voire cinquante ans, et qui représentent un nombre non négligeable des demandes de régularisation.
Nombreuses sont les cessions qui n'aboutissent pas du fait d'un écart important entre l'évaluation du bien et la capacité contributive du demandeur, même après l'application du dispositif d'aide financière de l'État.
Le caractère social de la loi ne semble donc pas être la priorité. Des dispositions légales l'auraient accentué, notamment la mise en place d'un mécanisme d'allégement de la charge de l'acquéreur sous forme d'aide de l'État.
Dès lors, il est important que, en Guadeloupe la cession des parcelles ne soit pas assimilée à une vente occasionnelle d'un bien domanial. Si la régularisation prévue par la loi du 31 décembre 1996 apparaît comme un instrument pour l'amélioration du cadre de vie, le développement et la gestion urbaine du territoire communal, sa mise en oeuvre dans l'archipel guadeloupéen semble être préjudiciable à ses habitants.
En conséquence, je vous demande quelles décisions précises vous entendez prendre pour limiter les effets des disparités de traitement des citoyens selon leur implantation en Guadeloupe ou en Martinique, et pour faciliter l'accès à la propriété de familles soucieuses de régulariser leur situation.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, porte-parole du Gouvernement.
M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le député, vous m'interrogez sur une question à la fois difficile et ancienne concernant les cinquante pas géométriques et, en l'occurrence, sur les disparités que vous constatez entre les pratiques des services fiscaux de la Guadeloupe et de ceux de la Martinique lors des cessions de terrains sur la zone des cinquante pas géométriques.
La loi du 30 décembre 1996, vous l'avez rappelé, donne la possibilité aux particuliers qui résident sur la zone des cinquante pas géométriques de devenir propriétaires du terrain qui appartient à l'État et qu'ils occupent ou donnent à bail à titre d'habitation principale.
S'agissant d'immeubles appartenant à l'État, les services des domaines fixent la valeur de ces terrains qui, pour les besoins de l'évaluation sont considérés comme nus.
Les directions de la Guadeloupe et de la Martinique n'ont aucune différence d'appréciation de cette notion.
Conformément aux dispositions du code du domaine de l'État, le prix du seul terrain nu est fixé compte tenu des caractéristiques urbanistiques et physiques du terrain, à l'exclusion des constructions existantes.
Malgré cette méthodologie commune, vous évoquez des prix de cession, en Martinique, inférieurs de 30 à 50 % à ceux de la Guadeloupe.
Les prix variant sensiblement en fonction de la situation des terrains, la comparaison des valeurs de cessions est difficile à l'intérieur même d'un département. Elle l'est encore plus s'agissant de valeurs moyennes de cession entre deux départements.
Des vérifications que j'ai demandées, il ressort de légères différences dans l'étendue des zones de référence. Il apparaît cependant que les prix proposés " s'inscrivent dans la fourchette basse ou moyenne des prix du marché foncier ", pour reprendre le constat fait par l'Agence pour la mise en valeur de la zone des cinquante pas géométriques de la Guadeloupe.
Les demandes en révision de prix adressées aux services fiscaux constituent également un bon indicateur : moins de 5 % des évaluations réalisées sont ainsi contestées.
Je tiens à vous rassurer pleinement, monsieur le député : le Gouvernement est extrêmement attaché à ce que les personnes modestes qui vivent sur ces terrains depuis de nombreuses années puissent s'en porter acquéreurs.
C'est pourquoi le volet social de la loi du 30 décembre 1996 est scrupuleusement mis en oeuvre en apportant une aide importante aux personnes qui n'auraient pas les ressources suffisantes pour financer un tel achat. Cette aide exceptionnelle, attribuée en fonction des revenus, peut atteindre jusqu'à 80 % du prix de vente du terrain. Pour l'année 2004, en Guadeloupe, ce sont 61 % des actes de cession qui ont bénéficié de cette aide.
Outre une information large auprès des potentiels bénéficiaires de l'aide, la direction des services fiscaux propose des délais de paiement afin de faciliter l'accès à la propriété du plus grand nombre d'occupants.
Vous le voyez, ce volet social constitue bien une de nos priorités, au même titre que la réalisation des aménagements de la zone des cinquante pas géométriques afin de lutter contre l'insalubrité et d'améliorer le cadre de vie de tous les habitants.
Mme la présidente. La parole est à M. Joël Beaugendre.
M. Joël Beaugendre. Monsieur le ministre, je vous remercie beaucoup de votre réponse.
Cependant, un certain nombre de tableaux, que je tiens à votre disposition, montrent qu'il y a, effectivement, une disparité. Je prends, par exemple, la zone touristique des Anses-d'Arlets à la Martinique, qui connaît un coût inférieur à celui de zones rurales comme Capesterre et Sainte-Rose, qui font aujourd'hui l'objet d'opérations RHI.
Nous ne pouvons que nous féliciter de voir que le Gouvernement a ce problème présent à l'esprit et nous attendons des services fiscaux et de votre ministère la plus grande collaboration en faveur de nos habitants.

Données clés

Auteur : M. Joël Beaugendre

Type de question : Question orale

Rubrique : Outre-mer

Ministère interrogé : économie

Ministère répondant : économie

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 3 mai 2005

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