Question orale n° 1309 :
viticulteurs

12e Législature

Question de : M. Jean-Marc Roubaud
Gard (3e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Jean-Marc Roubaud interroge M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur la viticulture française qui tente de résister à une crise qui la frappe de plein fouet et qui fragilise un nombre toujours plus grand d'exploitations. Il a mesuré l'ampleur du problème lorsqu'en début d'année il a décidé d'allouer une enveloppe spécifique AGRIDFF pour les viticulteurs en difficultés. En juillet dernier, la filière viticole lui a remis un mémorandum social dans lequel elle exprimait un certain nombre de doléances en vue d'un allègement des charges sociales pesant sur les exploitants. Le Gouvernement n'a pas inscrit dans le projet de loi d'orientation agricole de mesures spécifiques en faveur de l'allègement des charges, alors que cette préoccupation est omniprésente chez les exploitants. En conséquence, il lui demande ce qu'il peut apporter aux viticulteurs par rapport à ses engagements et aux propositions qui lui ont été faites le 20 juillet dernier.

Réponse en séance, et publiée le 19 octobre 2005

CRISE DE LA FILIERE VITICOLE

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Roubaud, pour exposer sa question, n° 1309, relative à la crise de la filière viticole.
M. Jean-Marc Roubaud. Monsieur le ministre des petites et moyennes entreprises, ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture. Je souhaite appeler son attention sur la viticulture française qui tente de résister à une crise qui la frappe de plein fouet et qui fragilise un nombre toujours plus grand d'exploitations, particulièrement dans le département du Gard.
Votre collègue a mesuré l'ampleur du problème lorsqu'en début d'année, il a décidé d'allouer une enveloppe spécifique AGRIDIFF pour les viticulteurs en difficulté. En juillet dernier, la filière viticole lui a remis un mémorandum social et fiscal dans lequel elle exprimait un certain nombre de doléances en vue d'un allégement des charges sociales pesant sur les exploitants.
À cette occasion, il a accepté l'idée d'une harmonisation du taux d'abattement des cotisations sociales patronales dans le cadre du dispositif " emploi occasionnel " au niveau de 90 % ainsi qu'un allongement de la durée d'exonération portée de cent à deux cents jours. Or, il semblerait que cette volonté n'a pas encore été traduite dans les textes.
Par ailleurs, il a recommandé la mise en place de guichets uniques en matière fiscale et sociale dans l'ensemble des régions viticoles affectées par des difficultés économiques. Ainsi des plans d'étalement des dettes, le plus souvent d'une durée de six mois, peuvent être mis en place depuis le début du mois d'août, mais ils se heurtent à la date butoir du 31 décembre 2005. Compte tenu de l'importance de la crise, ce délai est très insuffisant. La filière demande donc qu'il soit porté de six à vingt-quatre mois. Le Gouvernement a été saisi du problème par la viticulture qui attend sa réponse.
Enfin, d'autres demandes apparaissent clairement dans le mémorandum, des demandes sur lesquelles il ne s'est pas encore prononcé. Il s'agit de l'annulation automatique des majorations de retard lorsque l'exploitant a respecté l'échéancier de paiement qui lui avait été accordé, du raccourcissement du délai de cinq ans relatif au changement de l'assiette de calcul des cotisations et contributions sociales des exploitants agricoles. Ainsi, l'option pourrait être levée au bout de trois ans au lieu de cinq actuellement. Il s'agit encore de l'accès direct au RMI pour les exploitants soumis aux bénéfices réels, au même titre que les exploitants qui relèvent du régime forfaitaire. Il s'agit enfin de la réintroduction de la ligne budgétaire relative à la prise en charge partielle exceptionnelle des cotisations des exploitants en difficulté.
Or le Gouvernement n'a pas inscrit dans le projet de loi d'orientation agricole de mesures spécifiques en faveur de l'allégement des charges, alors que cette préoccupation majeure persiste chez les exploitants. Je ne reviendrai pas ici sur les inondations dramatiques qu'ont connues les agriculteurs en 2002 et 2003.
En conséquence, je demande au ministre de l'agriculture ce qu'il peut apporter aux viticulteurs au regard de ses engagements et des propositions qui lui ont été faites le 20 juillet dernier.
M. le président. La parole est à M. le ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales.
M. Renaud Dutreil, ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales. Monsieur le député, vous interrogez mon collègue Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture et de la pêche, retenu à Luxembourg pour un Conseil exceptionnel Affaires générales, sur les difficultés que connaît le secteur de la viticulture, notamment certains bassins de production, comme le Languedc-Roussillon, ainsi que sur les mesures préconisées par les représentants de la profession, en particulier dans le domaine social.
S'agissant tout d'abord des modalités de calcul des cotisations sociales des non-salariés agricoles, Dominique Bussereau a autorisé, par dérogation à la réglementation en vigueur, les viticulteurs connaissant des difficultés de trésorerie à calculer à partir de l'assiette annuelle leurs cotisations alors même qu'ils avaient opté antérieurement pour l'assiette triennale. Afin que cette mesure puisse bénéficier à un plus grand nombre de viticulteurs, ce changement d'option autorisé jusqu'au 15 août 2005 l'est désormais jusqu'au 15 septembre 2005.
Pour ce qui est de la remise des majorations et pénalités concernant les cotisations personnelles dues par les chefs d'exploitation ou d'entreprise agricoles, les conseils d'administration des caisses de Mutualité sociale agricole peuvent accorder de telles remises sur demande individuelle des intéressés. Celles-ci sont subordonnées à la bonne foi des intéressés et au paiement du principal des cotisations.
Ces dispositions permettent de traiter l'ensemble des cas difficiles et Dominique Bussereau a demandé au président de la Caisse centrale de Mutualité sociale agricole d'accorder la plus grande bienveillance à ces demandes.
Concernant l'allégement du coût du travail, le projet de loi d'orientation agricole a été complété par un volet emploi sur la base des propositions du rapport de M. Jacques Le Guen, député du Finistère, relatif aux facteurs de distorsion de concurrence européens.
Je voudrais citer trois mesures importantes adoptées en première lecture à l'Assemblée nationale :
Un contrat emploi-formation agricole comportant la possibilité d'employer pendant un mois par an des jeunes de moins de vingt-six ans dont la rémunération est exonérée de cotisations salariales de sécurité sociale augmentant ainsi d'autant leur salaire net ;
L'allongement de 100 à 119 jours de l'allégement de cotisations sociales pour l'emploi de travailleurs occasionnels ;
Une aide à la transformation des contrats à durée déterminée en contrats à durée indéterminée, avec l'application des 100 % d'allégements de cotisations sociales patronales pendant deux ans pour le recrutement de salariés en CDI en viticulture.
Ces mesures constituent une avancée sensible en faveur de l'emploi en agriculture et sont de nature à répondre à certaines des préoccupations des viticulteurs quant à la réduction du coût du travail.
Sur la réintroduction de la ligne budgétaire relative à la prise en charge partielle des cotisations sociales agricoles, Dominique Bussereau a, dans l'immédiat, rétabli à titre transitoire ce dispositif par circulaire selon les mêmes modalités que les années antérieures, mais à partir des crédits de son département ministériel. Une enveloppe globale de 8 millions d'euros permettra de traiter les différentes crises survenues au cours de l'année 2005, dont celle de la viticulture.
S'agissant de la spécificité des exploitants agricoles par rapport au revenu minimum d'insertion, celle-ci s'explique par la logique générale de cette prestation qui conduit à verser une allocation différentielle mensuelle entre le montant du RMI et les ressources de la personne concernée.
Face à la variabilité d'une année sur l'autre de leurs revenus, les agriculteurs imposés au réel relèvent non pas de la procédure des salariés mais d'une procédure dérogatoire. Pour les exploitants imposés au forfait, cette difficulté a pu être surmontée puisque, par définition, une estimation de leurs revenus est connue.
Monsieur le député, vous pouvez le constater, le Gouvernement est résolument engagé, en concertation avec les responsables professionnels, dans la mise en oeuvre des actions permettant de répondre aux difficultés de certains viticulteurs.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Roubaud.
M. Jean-Marc Roubaud. Je vous remercie, monsieur le ministre, de cette réponse. Certes, il y a des avancées. Je crains cependant qu'elles ne soient insuffisantes car la crise est majeure. Je souhaite donc que vous saisissiez le Premier ministre afin que des arbitrages budgétaires soient effectués. Chacun s'est ému de la suppression de 3 000 emplois chez Hewlett Packard. Mais ce sont des dizaines de milliers d'emplois qui risquent d'être supprimés dans la viticulture et l'arboriculture. Les mesures structurelles à long terme ne sont pas de nature à apporter des réponses dans l'immédiat. Dans mon département, 10 % des exploitations sont en très grande difficulté et 30 % en grande difficulté. Les échéances vont être catastrophiques dans les trois à six mois à venir.

Données clés

Auteur : M. Jean-Marc Roubaud

Type de question : Question orale

Rubrique : Agriculture

Ministère interrogé : agriculture et pêche

Ministère répondant : agriculture et pêche

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 18 octobre 2005

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