chauffeurs routiers
Question de :
M. Christian Vanneste
Nord (10e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Christian Vanneste souhaite attirer l'attention de M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer sur les conditions d'exercice du métier de chauffeur routier. En effet, un certain nombre de chauffeurs routiers subissent des pressions de la part de leur employeur qui cherche à leur faire trafiquer leurs disques de contrôle. Cette falsification permet au chauffeur de placer son disque en position « repos » alors qu'il est en fait en train de rouler. Outre le danger que représente ce détournement pour l'ensemble des usagers du réseau routier, les chauffeurs eux-mêmes ne peuvent bénéficier des assurances en cas d'accident du travail. Les pressions dont ils font l'objet de la part de leurs employeurs constituent donc une source dangereuse de déviances et d'accidents. En conséquence, il aimerait savoir quel dispositif pourrait permettre aux chauffeurs d'échapper à ces pressions et d'exercer leur métier dans la légalité et la transparence.
Réponse en séance, et publiée le 19 octobre 2005
CONDITIONS D'EXERCICE DU METIER
DE CHAUFFEUR ROUTIER
M. Christian Vanneste. Monsieur le ministre des transports, je veux appeler votre attention sur les conditions d'exercice du métier de chauffeur routier dans notre pays.
Le coût d'une journée de travail d'un chauffeur français est de 212 euros, alors que celui d'un chauffeur polonais ou tchèque ne dépasse pas 75 euros. Le coût horaire moyen de conduite en Lituanie est inférieur de 80 % à celui constaté en France. L'ordonnance du 18 novembre 2004 portant transposition de directives communautaires et modifiant le code du travail en matière d'aménagement du temps de travail dans le secteur des transports est une première étape de la mise en oeuvre de l'harmonisation sociale européenne. Cependant, les charges sociales patronales pesant sur les heures rémunérées sont tellement élevées, avec des majorations de 25 % et 50 %, qu'elles ne permettent pas à ce dispositif de répondre pleinement aux difficultés énormes de ce secteur pour l'avenir duquel on ne peut qu'être inquiet.
La pression qui pèse sur cette profession s'accroît de jour en jour. Les entreprises françaises de transports routiers sont soumises à une sévère réglementation du temps de travail de leurs employés : en cas de dépassement de la durée journalière de travail, l'amende peut s'élever à 750 euros, ce qui est parfaitement compréhensible, puisque les accidents impliquant au moins un poids lourd ont fait près de 400 morts en 2004, soit 13 % des victimes de la route. Une amélioration est toutefois à noter puisque, malheureusement, en 2001 le chiffre excédait 500 morts.
Il est donc essentiel que la durée de repos des chauffeurs soit respectée et que la falsification des disques du chronotachygraphe soit un délit sanctionné par une peine d'emprisonnement et une amende pouvant atteindre 30 000 euros. En revanche, les mauvaises utilisations du disque de contrôle ne sont sanctionnées que par une amende de 135 euros. Une telle incohérence est la porte ouverte à toutes les dérives dans un contexte économique critique, marqué par une très forte concurrence.
Le Gouvernement envisage-t-il donc d'opérer un contrôle plus pertinent des opérateurs étrangers en infraction avec les règles de sécurité ainsi que des temps de conduite et de repos, quitte à immobiliser le véhicule, le cas échéant, et ce afin que les chauffeurs routiers - qui représentent des entreprises et des emplois vitaux pour notre pays - puissent exercer leur métier dans la légalité et dans des conditions de protection renforcées ?
M. le président. La parole est à M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.
M. Dominique Perben, ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer. Monsieur le député, les préoccupations que vous exprimez au sujet de la réglementation des temps de conduite et de repos des conducteurs sont évidemment partagées par les pouvoirs publics. Elles ont été au coeur des nombreuses discussions que j'ai eues depuis trois mois avec les professionnels et les représentants du transport routier pour essayer de les accompagner dans ce difficile moment de crise aggravé par l'augmentation du prix du gazole.
Je veux exprimer une nouvelle fois ici la volonté du Gouvernement de faire respecter les réglementations. Les contrôleurs des DRE et l'inspection du travail des transports ont reçu mandat d'être très stricts sur la réglementation et de faire en sorte que les moyens humains nécessaires soient essentiellement orientés vers les contrôles sur route plutôt que vers les contrôles sur site d'entreprise.
Par ailleurs, et malgré les difficultés de mise au point technologique, la mise en place, au début de 2006, du nouveau chronotachygraphe électronique, plus fiable et plus sécurisé, a été décidée lors du conseil transports européen de juillet, grâce notamment au volontarisme du commissaire Jacques Barrot. Il s'agira d'un dispositif européen s'imposant à tout le monde et permettant de contrôler les temps de conduite.
J'ajoute enfin qu'il a été convenu qu'un groupe de travail, constitué autour de Claude Liebermann, ingénieur en chef de l'équipement, se penche sur la question des écarts de charges sociales.
Au niveau européen, il est apparu du manière évidente, lors du dernier conseil d'octobre, qu'il fallait progresser vers une harmonisation des dispositifs fiscaux et sociaux concernant cette profession dont nous avons tous besoin. Présente sur l'ensemble du territoire à travers un très grand nombre de petites et moyennes entreprises, c'est une profession qu'il nous faut absolument préserver car elle est nécessaire autant à notre économie qu'à l'équilibre du territoire.
M. le président. La parole est à M. Christian Vanneste.
M. Christian Vanneste. Merci, monsieur le ministre, pour votre réponse. Régler cette question importante au niveau européen me semble une bonne solution, mais j'aimerais évoquer deux points annexes.
Le premier concerne l'équité entre transporteurs français et étrangers que je vais illustrer par une anecdote : verbalisé un jour que je roulais en Belgique - Mme Fontaine était d'ailleurs dans ma voiture, ce qui contribue à souligner la dimension européenne de l'histoire -, je n'ai été autorisé à redémarrer qu'après avoir payé l'amende. Or beaucoup de transporteurs français se plaignent du fait que les transporteurs étrangers qui ne respectent pas les règles sont rarement poursuivis dans notre pays.
Mon second point concerne les donneurs d'ordre et la pression considérable qu'ils exercent sur les transporteurs. Il faudra un jour s'interroger sur leur responsabilité dans les risques qu'ils font parfois prendre aux transporteurs et aux chauffeurs routiers.
Auteur : M. Christian Vanneste
Type de question : Question orale
Rubrique : Transports routiers
Ministère interrogé : transports, équipement, tourisme et mer
Ministère répondant : transports, équipement, tourisme et mer
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 18 octobre 2005