place royale
Question de :
M. Jacques Domergue
Hérault (2e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Jacques Domergue interroge M. le ministre de la culture et de la communication. La municipalité de Montpellier a soumis à son approbation un dossier de parking urbain, sous l'esplanade du Peyrou, correspondant à l'ancienne place Royale. Il a, en date du 25 mars 2005, donné un avis défavorable à ce dossier, à l'issue d'un avis négatif de la commission des monuments historiques. Ce dossier « parking du Peyrou » fait partie d'un accord signé entre la mairie et la CCI, en contrepartie de la levée des recours contre le centre commercial Odyseum. Le manque d'enthousiasme de la maison pour construire le parking du Peyrou n'a d'égal que la médiocrité du dossier qui a été présenté à la commission des monuments historiques. Des remarques sur la sécurité ont été formulées et, sur ce point, il est important que les services techniques de la mairie revoient leur copie. L'argument avancé sur la dégradation du site, précisément sur le côté disgracieux des bouches d'aération, masquées par des arbustes, paraît disproportionné. En effet, la ville n'a jamais investi dans la restauration de la place Royale, et la construction de ce parking est l'occasion de le faire. De plus, la création du parking est un moyen de « réanimer » la partie haute de l'Écusson qui vire aujourd'hui vers la ghettoïsation, en raison de la désertification de ce secteur de la ville. Enfin, la commission a insisté sur le manque de cohérence du projet. En effet, dans le projet initial, le positionnement de ce parking peut apparaître peu cohérent. Il devient, par contre, totalement cohérent, si la commission prend en compte que le tramway qui va ceinturer l'Écusson, passera par le Peyrou. Il est prévu une station du tramway pour récupérer les personnes qui laisseront leur véhicule au parking. Tout ceci est de nature à raviver l'activité du centre-ville, qui en a grand besoin. Il lui demande quelle est la voie qu'il faut adopter pour réactiver ce dossier, vital pour le centre-ville, et vital pour Montpellier.
Réponse en séance, et publiée le 1er mars 2006
PROJET DE CONSTRUCTION D'UN PARKING
A MONTPELLIER
M. Jacques Domergue. Monsieur le ministre de la culture et de la communication, je me sens plus à l'aise pour vous parler de Montpellier. Il y a près d'un an, le 25 mars, vous avez répondu négativement à une sollicitation de la mairie de Montpellier pour la construction d'un parking sous l'esplanade du Peyrou, l'ancienne Place Royale de la ville. Cette réponse négative faisait suite à un avis très défavorable de la commission des monuments historiques sur le dossier, à la quasi-unanimité. Je crois qu'au moment de se prononcer, la commission n'avait pas connaissance de tous les éléments de la situation locale et de tous les enjeux que représente ce parking. Il est de mon devoir aujourd'hui de les préciser.
Un des arguments justifiant la décision de la commission concernait le volet technique du dossier qui, je le reconnais, n'était pas bon. Se posaient notamment des problèmes de sécurité, avec des galeries extrêmement longues, et des problèmes d'accessibilité pour les pompiers, même si localement l'avis avait été assez favorable. Je comprends que, devant ce type de dossier, la commission émette des réserves.
Le deuxième argument concernait la préservation des vieilles pierres. Or, depuis plus de trente ans, pas un seul euro n'a été investi dans ce secteur, même si la municipalité a voté, il y a quelques semaines, des crédits pour refaire le pavement de la Place Royale. Ce parking, qui participerait à la réanimation de la partie haute du centre-ville, serait donc un élément déterminant dans la réhabilitation, non seulement du site, mais également de l'ensemble de la partie haute de l'Écusson, en voie de ghettoïsation.
Outre qu'elle ne disposait pas de ces éléments pour appréhender la situation, la commission ne comprenait pas pourquoi on voulait faire un parking à cet endroit. En fait, c'est une localisation tout à fait cohérente avec un projet de plan de circulation urbain qui n'a pas non plus été pris en compte dans le dossier parce que l'actuelle municipalité n'y est pas favorable. Nous devons mettre en place un système de transports en commun privilégiant l'intermodalité : les habitants de la partie nord de Montpellier pourraient, sans accéder au centre-ville, laisser leur voiture dans le parking sous la Place du Peyrou, monter par les ascenseurs jusqu'au tramway et se déplacer par ce moyen sur l'ensemble de la périphérie de l'Écusson.
Vous voyez donc, monsieur le ministre, que ces enjeux dépassent la simple préservation des vieilles pierres, auxquelles nous sommes tous attachés. Je dirai même que ce projet contribuera à la valorisation de ce secteur de Montpellier, qui, vous le savez pour vous y être promené, est tagué à tous les coins de rue, où les portes cochères sont défoncées, et dont la partie haute, devenue inaccessible, ne peut plus vivre.
Nous devons absolument renouer avec ce projet, présenter un nouveau dossier acceptable. Dans quelle direction faut-il travailler ? Quelles mesures faut-il privilégier pour que ce parking puisse être réalisé dans le respect de la sécurité des usagers, en vue de redynamiser la partie haute du centre-ville et de revaloriser l'ensemble des monuments historiques de Montpellier ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de la culture et de la communication.
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le député, vous avez raison de défendre avec passion la nécessaire conciliation entre les racines, la fierté, la mémoire et l'identité de votre ville et de votre région, et les objectifs du développement économique et de l'accueil des touristes qui veulent visiter le centre de cette magnifique ville de Montpellier. Je partage votre préoccupation.
La Place Royale du Peyrou constitue un ensemble monumental d'une exceptionnelle qualité, classé comme tel parmi les monuments historiques. La conjonction de ses trois chefs-d'oeuvre, la porte du Peyrou, la promenade et l'aqueduc, forment, avec le secteur sauvegardé de l'Écusson, tout proche, un ensemble architectural intact, qui a conservé au-delà de l'histoire toute sa cohérence et qui doit être traité avec le plus grand respect. Autrement dit, l'État doit consacrer de l'argent à la restauration de ces monuments historiques.
Le projet de création d'un parc de stationnement dans le terre-plein de la Place du Peyrou a été longuement débattu par la commission supérieure des monuments historiques le 7 février 2005. Les débats ont fait apparaître que, dans sa conception même, ce projet se heurte à des difficultés insurmontables d'intégration des équipements qu'une telle construction suppose : cheminements, accès de surface, ventilation. En outre, les membres de la commission ont unanimement exprimé leur opposition de principe à ce que le terre-plein de la Place Royale, perçue comme une acropole, puisse être fouillé et excavé pour l'implantation d'un tel équipement. Il est à noter, en effet, que la Place du Peyrou n'a jamais subi de circulation automobile et présente toutes les caractéristiques d'un espace paysager à caractère naturel. Confirmant cette conclusion unanime, j'ai donc donné un avis défavorable, tout en étant bien entendu conscient que la question du stationnement des véhicules constitue un élément clé de l'animation et du développement économique du quartier de l'Écusson.
Vous m'informez de la création prochaine d'un tramway, dont le tracé ceinturera le Peyrou, et me demandez de revoir ma position à la lumière de cet élément nouveau. Il ne me semble pas cependant que cet équipement collectif, certainement bienvenu en vue de faciliter la desserte du quartier de l'Écusson, soit de nature à changer l'appréciation rendue s'agissant de la conservation du terre-plein du Peyrou.
Comme je l'ai indiqué à plusieurs reprises, j'ai en revanche donné instruction à la direction régionale des affaires culturelles de poursuivre, avec la ville de Montpellier, la recherche de solutions alternatives pour l'implantation d'un parc de stationnement à proximité du Peyrou, sans porter atteinte à ce monument majeur. On me dit qu'un projet pourrait être envisageable à proximité immédiate, dans le secteur de la place des Arceaux.
Je mesure l'importance de votre projet. Comme je l'ai fait à Nice lorsque la question très conflictuelle de la démolition ou non de l'ancienne gare s'est posée au regard de sa compatibilité avec un projet municipal d'architecture contemporaine, je viendrai sur place pour me rendre compte par moi-même au moment de prendre une décision définitive.
Je sais combien cette question vous passionne. Vous votez les crédits de mon ministère et il est normal qu'ils puissent être affectés à votre ville. Je prends l'engagement d'accompagner prioritairement et substantiellement la ville de Montpellier dans des travaux de restauration de la Place Royale, actuellement dégradée, mais qui n'a pour autant rien perdu de sa majesté et de sa valeur historique. J'espère qu'il me restera suffisamment de crédits pour cette opération, dans cette région où les ruptures d'intervention de la part du conseil régional vis-à-vis de grandes manifestations culturelles ne sont pas sans poser des problèmes au ministre de la culture et de la communication. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Domergue.
M. Jacques Domergue. À l'heure où des propos inacceptables font parler de Montpellier souvent de manière négative, je vous remercie, monsieur le ministre, de vos commentaires positifs et de votre souhait de venir vous rendre compte sur place de la situation locale. Il n'est pas question, comme à Nice, de construire un édifice moderne qui viendrait dénaturer le paysage. L'Esplanade du Peyrou ressemblera demain à ce qu'elle est aujourd'hui si l'on aménage un parking en dessous.
Vos services nous ont proposé des solutions alternatives. La première était de construire un parking sous la Place des Arceaux. Ces gens ne sont jamais venus sur place, ils n'ont même pas survolé l'esplanade en hélicoptère. Il faut que vous veniez pour vous rendre compte de la situation. À proximité de cette esplanade existe déjà un parking : il n'est jamais plein parce qu'il est mal situé, à un kilomètre de l'esplanade. C'est pourquoi il ne pourrait pas avoir de rôle majeur dans l'intermodalité que nous souhaitons mettre en place demain si nous avons la chance de changer l'image de la ville. Quant à creuser un parking sous les Arceaux, compte tenu de la proximité de la mer - chacun sait que Saint-Louis s'est embarqué à Aigues-Mortes -, il suffira de vingt centimètres pour arriver à l'eau ! Je sais bien que tout est possible techniquement, mais alors, pourquoi pas un parking sous l'esplanade du Peyrou ?
Une autre solution proposée serait de faire un parking sous le boulevard Henri IV, qui sépare la fac de médecine, c'est-à-dire la science, du Jardin des plantes, la nature. Là aussi, monsieur le ministre, il faut que vous veniez voir à quoi ressemblent les lieux. Si l'on creuse sous le boulevard Henri IV, la cathédrale Saint-Pierre va s'effondrer et le Jardin des plantes va être inondé. Cela ne résoudrait pas un problème qui a pourtant aujourd'hui une solution facile, pragmatique, cohérente et qui préserve notre patrimoine. Ces trois exigences ne sont pas inconciliables, surtout quand la survie d'un centre-ville comme l'Écusson, qui est l'un des plus beaux centres historiques de France, est en jeu. Monsieur le ministre, nous vous attendons à Montpellier, avec des crédits !
Mme la présidente. Le débat se poursuivra sans doute entre le ministre et les élus de Montpellier...
Auteur : M. Jacques Domergue
Type de question : Question orale
Rubrique : Patrimoine culturel
Ministère interrogé : culture et communication
Ministère répondant : culture et communication
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 28 février 2006