bibliothèques publiques
Question de :
M. Philippe Pemezec
Hauts-de-Seine (12e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Philippe Pemezec interroge M. le ministre de la culture et de la communication au sujet des crédits accordés aux établissements culturels de proximité dans les zones les plus défavorisées, et en particulier dans les quartiers dits sensibles de la banlieue parisienne. La gravité des évènements qui se sont produits dans ces quartiers a rappelé avec force la nécessité de retisser du lien social, de transmettre une culture du vivre ensemble et de promouvoir les valeurs de la République. Les établissements culturels de proximité sont au centre de cet engagement. Il est donc de notre devoir de responsable politique d'en assurer la pérennité et le développement. Pourtant, certains de ces établissements rencontrent d'importantes difficultés, à savoir la bibliothèque la Joie par les livres de Clamart. Cette bibliothèque est une institution pilote qui a mis en place depuis ses débuts un concept novateur où les enfants étaient au coeur du projet. Ils s'occupaient eux-mêmes du prêt des livres et étaient ainsi responsabilisés. Ils s'ouvraient au monde et aux autres grâce aux rencontres organisées par la bibliothèque, rencontres qui généralement avaient lieu à la demande des enfants. Près de trois milles médiathèques se sont inspirées de ce modèle en France. Il a fait ses preuves ! Cette bibliothèque est située au coeur de la cité de la Plaine qui est classée en ZEP. Elle est le symbole de cette intégration par le savoir, de la culture pour tous, de l'engagement citoyen. Des valeurs chères à notre République. Comment pourrait-on laisser disparaître ce projet fédérateur ? Voilà au contraire un exemple dont il faut s'inspirer ! C'est pourtant ce qu'il risque d'arriver puisque la mairie de Clamart a laissé délibérément se dégrader ce bâtiment public, par défaut d'entretien, pour servir les intérêts de projets dispendieux, comme la construction, en l'espèce, d'une médiathèque. Un projet dont le fondement est l'exact opposé de ce qu'est la bibliothèque la Joie par les livres. Mais les Clamartois refusent cette dérive. Leur mobilisation contre la fermeture de la bibliothèque est exemplaire. Ils sont attachés à ce lieu qui fait vivre la cité. Il lui demande s'il peut lui donner l'assurance de la continuité de cette structure si la mairie de Clamart s'engage à réaliser les travaux de sécurité nécessaires.
Réponse en séance, et publiée le 1er mars 2006
BIBLIOTHEQUE PUBLIQUE DE CLAMART
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Domergue, pour exposer la question n° 1461 de M. Philippe Pemezec.M. Jacques Domergue. M. Pemezec, retardé par les embouteillages, m'a prié de poser sa question. Il souhaitait interroger M. le ministre de la culture et de la communication sur les crédits accordés aux établissements culturels de proximité dans les zones les plus défavorisés, et en particulier dans les quartiers dits sensibles de la banlieue parisienne.
La gravité des événements qui se sont produits dans ces quartiers a rappelé avec force la nécessité de retisser le lien social, de transmettre une culture du vivre-ensemble et de promouvoir les valeurs de la République. Ce défi passe nécessairement par la transmission de savoirs, par la culture, par la défense des droits de tous et l'apprentissage des devoirs qui y sont immanquablement associés. Les établissements culturels de proximité jouent à cet égard un rôle essentiel. Il est de notre devoir de responsables politiques d'en assurer la pérennité et le développement.
Pourtant, certains de ces établissements rencontrent d'importantes difficultés. C'est le cas de la bibliothèque La Joie par les livres à Clamart, dans la circonscription de M. Pemezec. Cette institution pilote a mis en place depuis ses débuts un concept novateur mettant les enfants au coeur du projet. Ceux-ci s'occupent eux-mêmes du prêt des livres et sont ainsi responsabilisés. Ils s'ouvrent au monde et aux autres grâce aux rencontres organisées, généralement à leur demande, par la bibliothèque.
Près de trois mille médiathèques se sont inspirées de ce modèle en France. Il a donc fait ses preuves ! En outre, cette bibliothèque est située au coeur de la cité de la Plaine, laquelle, je vous le rappelle, est classée en ZEP. Elle y est le symbole de l'intégration par le savoir, de la culture pour tous, de l'engagement citoyen, toutes valeurs qui sont chères à notre République. Comment pourrait-on laisser disparaître ce projet fédérateur, alors qu'il constitue un exemple dont il faut s'inspirer ?
C'est pourtant ce qui risque d'arriver, puisque la mairie de Clamart a délibérément laissé ce bâtiment public se dégrader par défaut d'entretien, au profit d'autres projets dispendieux - en l'espèce, la construction d'une médiathèque, projet dont la conception est diamétralement opposée. Mais les Clamartois refusent cette dérive et hommage doit être rendu à leur mobilisation exemplaire contre la fermeture de la bibliothèque et à leur attachement à ce lieu qui fait vivre la cité.
Sans entrer dans les querelles et les polémiques, il est essentiel de dénoncer l'instrumentalisation politique de ce dossier au détriment des enfants clamartois. En annonçant il y a quelques semaines que le ministère de la culture imposait la fermeture de l'établissement et en prétextant que l'État coupait les crédits à l'association gestionnaire, le maire de Clamart a oublié de signaler, comme l'atteste le rapport d'activité pour 2004 de l'association des amis de La Joie par les livres, la " dégradation constante de l'état du bâtiment et de ses abords " et le fait que, " bien qu'alertée de nouveau cette année à plusieurs reprises et assurée de l'aide de l'État, la ville n'a ni engagé, ni programmé, ni même mis à l'étude, les travaux nécessaires ". L'État ne pouvait raisonnablement pas laisser cet établissement ouvert alors qu'un rapport des pompiers dénonçait des risques d'hydrocution pour les enfants !
Une seule chose compte aujourd'hui : l'assurance du maintien des crédits pour ce type d'établissement, et en particulier ceux de la bibliothèque La Joie par les livres, dont le rôle redeviendra essentiel pour peu que la mairie de Clamart s'engage à réaliser les travaux de sécurité nécessaires.
Je connais votre action en ce sens, monsieur le ministre, et ne voudrais surtout pas laisser accroire que la direction du livre de votre ministère nourrirait un quelconque mépris envers cette magnifique initiative. Afin de rassurer tous les Clamartois sur le fait que leur bibliothèque, qui a fait la joie de tant d'enfants, continuera de vivre, pouvez-vous m'assurer que les crédits de votre ministère seront maintenus si la mairie de Clamart s'engage à réaliser les travaux de sécurité nécessaires ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de la culture et de la communication.
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le député, vous soulignez à juste titre le rôle fondamental joué par les établissements culturels de proximité, à commencer par les bibliothèques, pour illustrer et promouvoir par leur action quotidienne les valeurs fondatrices de notre société et de notre République. À la suite des douloureux événements de l'automne dernier dans plusieurs quartiers de nos villes, j'ai tenu à m'assurer, de concert avec le ministre en charge de la cohésion sociale, M. Jean-Louis Borloo, qu'une partie des crédits supplémentaires prévus seraient bien affectés à des opérations culturelles, en sus de celles que je mène directement. Mon département ministériel soutient la création de tels équipements, tant dans les zones rurales isolées que dans les quartiers urbains périphériques.
Dans le cas particulier de la bibliothèque pour enfants La Joie par les livres, implantée dans le quartier de la cité de la Plaine à Clamart, c'est une association subventionnée par le ministère de la culture et de la communication qui assure cette activité de desserte locale dans un bâtiment dont la ville est propriétaire. En raison de problèmes de sécurité - et il y va de la responsabilité de l'État et des collectivités territoriales de veiller à la sécurité des publics, qu'ils soient jeunes ou adultes - relevés dans un rapport commandé par la direction du livre et de la lecture et concernant tant les personnes que les collections et l'édifice lui-même, il a été demandé à l'association de cesser, à titre conservatoire, ses activités sur place. Je comprends l'émotion soulevée par cette décision, mais il convenait d'être intransigeant : les questions de sécurité doivent passer avant toute autre considération.
Au terme d'une première réunion de concertation organisée au ministère à la demande la direction du livre et de la lecture, la mairie de Clamart a accepté de mettre en oeuvre les premières mesures d'urgence afin de rétablir la possibilité d'utiliser le bâtiment.
Cette condition préalable remplie, la direction du livre et de la lecture a fait savoir qu'elle garantissait le maintien des moyens matériels et humains nécessaires qu'elle accordait jusqu'ici, parallèlement à la ville, aux activités de sa bibliothèque, qui a donc pu être rouverte le 18 février dernier. Toutefois, des travaux plus importants restent à mener par la ville de Clamart sur un bâtiment remarquable inscrit à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques, en particulier pour assurer l'étanchéité, afin de prévenir tout risque d'incendie.
Il reste à envisager l'avenir d'un équipement qui a joué un rôle pilote voilà quarante ans et dont le modèle a largement essaimé en France et à l'étranger. La municipalité ayant, comme vous le rappelez, décidé de bâtir une importante médiathèque dans le voisinage, il importe que les deux lieux proposent une offre culturelle en totale complémentarité. Le ministère et la direction du livre réuniront, le 2 mars prochain, l'ensemble des partenaires concernés par cette question, à commencer par la municipalité de Clamart, pour qu'une réflexion commune se poursuive à ce sujet. À titre personnel, je souhaite réaffirmer ma volonté que cet équipement redevienne un pôle d'excellence à vocation nationale et internationale, justifiant pleinement l'engagement de l'État. Naturellement, cette ambition est subordonnée au dynamisme et à la volonté de dialogue des autres partenaires. L'État s'engage, mais il attend que la ville fasse de même.
Auteur : M. Philippe Pemezec
Type de question : Question orale
Rubrique : Archives et bibliothèques
Ministère interrogé : culture et communication
Ministère répondant : culture et communication
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 28 février 2006