Question orale n° 1480 :
armes et véhicules militaires de collection

12e Législature

Question de : M. Maurice Giro
Vaucluse (2e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Maurice Giro appelle l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, sur le décret n° 2005-1463 du 23 novembre 2005 qui concerne la détention et l'acquisition d'engins militaires de collection. Ce décret, très attendu par les collectionneurs, devait fixer, selon la loi, les conditions selon lesquelles certains matériels et véhicules militaires de la 2e catégorie pourraient être acquis et détenus à fin de collection par des personnes physiques, sous réserve des engagements internationaux en vigueur et des exigences de l'ordre et de la sécurité publique. Avec l'application de l'article 8 de ce décret, ces véhicules, qui faisaient partie de la 8e catégorie (armes et munitions historiques et de collection) se retrouvent en 2e catégorie (matériels destinés à porter ou à utiliser au combat les armes à feu). Il n'y a pas de notion d'obsolescence : une galère romaine ou un porte-avion récent sont sur le même pied d'égalité ! De ce fait, leur acquisition et leur détention deviennent soumises à une autorisation qui devra être effectuée avant novembre 2006. Cela paraît totalement irréalisable dans ce laps de temps vu qu'il y a entre 30 000 et 40 000 exemplaires en France. De plus, lors de la demande de détention auprès de la préfecture, il faudra fournir un certificat de neutralisation de l'arme et sur ce point il n'y a aucune directive. Qui peut effectuer la neutralisation ? Il n'y a aucun service habilité à y procéder. De même, le dossier de demande devra comprendre un rapport sur les moyens de protection contre le vol. Mais le texte ne précise pas ce qu'il considère comme un « endroit sécurisé ». Enfin, il n'est pas inutile de préciser que sans cette autorisation, des poursuites et des sanctions pénales pour détention illégale de matériels de guerre sont applicables. Aussi, il lui demande de bien vouloir préciser le contenu de ce texte afin de pouvoir rassurer ces collectionneurs qui contribuent à la conservation du patrimoine national.

Réponse en séance, et publiée le 8 mars 2006

REGLEMENTATION DE LA DETENTION
D'ENGINS MILITAIRES DE COLLECTION

M. le président. La parole est à M. Maurice Giro, pour exposer sa question, n° 1480, relative à la réglementation de la détention d'engins militaires de collection.
M. Maurice Giro. Monsieur le ministre délégué aux collectivités territoriales, ma question s'adresse à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire et concerne le décret n° 2005-1463 du 23 novembre 2005 relatif à la détention et l'acquisition d'engins militaires de collection.
Ce décret, très attendu par les collectionneurs, devait fixer les conditions selon lesquelles certains matériels et véhicules militaires de 2e catégorie pouvaient être acquis et détenus à fin de collection par des personnes physiques, sous réserve des engagements internationaux en vigueur et des exigences de l'ordre et de la sécurité publique.
En application de l'article 8 de ce décret, les véhicules qui faisaient partie de la 8e catégorie - armes et munitions historiques et de collection - se retrouvent en 2e catégorie - matériels destinés à porter ou à utiliser au combat les armes à feu. Il n'y a pas de notion d'obsolescence, ce qui fait qu'une galère romaine ou un porte-avions récent sont soumis au même régime !
De ce fait, l'acquisition et la détention de ces véhicules seront soumises à une autorisation à partir de novembre 2006. Ce délai paraît totalement impossible à tenir puisqu'on dénombre entre 30 000 et 40 000 exemplaires en France.
Par ailleurs, lors de la demande de détention auprès de la préfecture, il faudra fournir un certificat de neutralisation de l'arme, mais il n'y a aucune directive sur ce point, notamment aucune précision quant aux services qui seront habilités à procéder à cette opération. De même, alors que le dossier de demande devra comprendre un rapport sur les moyens de protection contre le vol, le texte ne précise pas ce qu'il convient de considérer comme un " endroit sécurisé ".
Il n'est pas inutile de préciser qu'à défaut d'autorisation, des poursuites et des sanctions pénales pour détention illégale de matériels de guerre sont applicables.
Je voudrais rappeler que le régime actuel des matériels de guerre, armes et munitions, pierre d'angle de la réglementation moderne de la matière, a été fixé par le décret-loi du 18 avril 1939, un texte de circonstance pris à la veille de la Seconde Guerre mondiale en vertu de l'octroi de pouvoirs exceptionnels votés par le Parlement de l'époque. Depuis, à aucun moment le Parlement n'a eu à se prononcer sur l'intégralité de la législation sur les armes. Cela relève pourtant de sa compétence exclusive, en vertu de l'article 34 de la Constitution,
Pourriez-vous, monsieur le ministre, préciser le contenu de ce texte, afin de rassurer les milliers, voire les millions de collectionneurs qui contribuent à la conservation du patrimoine national et jouent par là même un rôle très important dans le devoir de mémoire ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales.
M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le député, M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, malheureusement empêché, m'a chargé de vous répondre aussi précisément que possible.
Vous vous faites l'écho des préoccupations des collectionneurs de véhicules militaires d'époque en ce qui concerne l'application d'un décret de novembre 2005 relatif aux matériels de guerre, armes et munitions. Ces préoccupations, comme vous le savez certainement, ont été exprimées par le président de la fédération française des véhicules d'époque, M. Claude Delagneau, au cours d'une réunion qui s'est tenue fin février au cabinet du ministre d'État.
Je voudrais vous apporter des précisions de nature, je l'espère, à rassurer les collectionneurs de véhicules militaires. L'administration a, à l'évidence, l'obligation et le devoir d'appliquer la loi du 18 mars 2003 sur la sécurité intérieure, - toute la loi, mais rien que la loi. Celle-ci confirme que l'acquisition et la détention des matériels de guerre des 2e et 3e catégories sont interdites en principe, mais contient toutefois des exceptions, concernant essentiellement les collectionneurs. Précisément, la loi dispose qu'un décret en Conseil d'État fixera les conditions dans lesquelles les organismes d'intérêt général ou à vocation culturelle, historique ou scientifique, peuvent être autorisés à acquérir et détenir les matériels des 2e et 3e catégorie. Ce décret devra également préciser les conditions dans lesquelles certains matériels de la 2e catégorie peuvent être acquis et détenus aux fins de collection par des personnes physiques. Il s'agit en réalité, comme vous l'aurez compris, ni plus ni moins de définir par un décret le régime par lequel les personnes privées, c'est-à-dire des particuliers ou des associations, pourront à des fins de collection être autorisées à détenir des matériels de guerre déjà classés comme tels. En revanche, il ne s'agit pas, dans l'esprit du législateur, de reclasser dans la 2e catégorie des matériels dont la détention et l'acquisition demeurent, elles, libres.
Je vous confirme donc que le décret du 23 novembre 2005, préparé conjointement, comme il se doit, par le ministère de l'intérieur et le ministère de la défense, et publié après l'avis conforme du Conseil d'État, n'a aucunement modifié le classement des engins militaires. Je tiens d'ailleurs à insister sur un point particulier : la très grande majorité des véhicules militaires de collection, qu'il s'agisse notamment des jeeps, des motos, des Dodge, des ambulances ou des GMC, restent libres de détention et d'acquisition. Je le répète, ces véhicules ne sont en aucun cas concernés par la nouvelle procédure, à laquelle seuls les engins qui étaient et demeurent classés comme matériels de guerre de 2e catégorie sont soumis. Je vous rappelle qu'il s'agit des matériels de guerre roulants, chars de combat, véhicules blindés, ainsi que des véhicules non blindés lorsqu'ils sont équipés à poste fixe ou munis d'un dispositif spécial, tel qu'une rampe de lancement, permettant le montage ou le transport d'armes.
Les engins concernés sont ceux qui, par leur ancienneté, peuvent être regardés comme des pièces de collection. Les détenteurs de ces matériels de guerre de 2e catégorie doivent solliciter une autorisation auprès du préfet et ont jusqu'au 30 novembre 2006 pour déposer leur demande. J'insiste sur le fait que ce délai n'est qu'un délai de dépôt de dossier. Le dossier devra comporter des pièces démontrant que le matériel de guerre est bien protégé contre le vol ou les intrusions et que les systèmes d'arme ont bien été neutralisés. Il appartiendra aux préfets d'instruire les demandes d'autorisation en prenant le temps nécessaire à la concertation avec les associations ou les collectionneurs.
Enfin, dans le souci de dissiper tout malentendu, le ministre d'État compte adresser aux préfets, avec son homologue du ministère de la défense, une circulaire précisant le régime juridique des collectionneurs de matériels de guerre. Ce texte sera lui aussi élaboré en concertation avec leurs représentants. J'espère, monsieur le député, vous avoir complètement rassuré sur ce point.
M. le président. Êtes-vous rassuré, monsieur Giro ?
M. Maurice Giro. Ce n'est pas tant moi, que les collectionneurs, qui vont être rassurés par les réponses qui leur ont été apportées car elles correspondent à ce qu'ils attendaient. Je vous remercie en leur nom, monsieur le ministre.

Données clés

Auteur : M. Maurice Giro

Type de question : Question orale

Rubrique : Patrimoine culturel

Ministère interrogé : intérieur et aménagement du territoire

Ministère répondant : intérieur et aménagement du territoire

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 7 mars 2006

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