zonage
Question de :
M. Pierre Morel-A-L'Huissier
Lozère (2e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Pierre Morel-A-L'Huissier attire l'attention de M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire sur le devenir des zonages dans le cadre des politiques territorialisées de l'Etat. Lors du comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire (CIADT) qui s'est réuni le 13 décembre 2002, en complémentarité avec les mesures de simplification souhaitées par le Gouvernement, il a été affirmé que l'amélioration des procédures communautaires passe notamment par l'abandon des zonages a priori dont les effets pervers ont été maintes fois soulignés. A cet égard, il faut rappeler que la définition du zonage de la PAT a exclu la Lozère. Le Gouvernement a également décidé de mettre à plat les « zonages économiques ruraux », territoires ruraux de développement prioritaire (TRDP) et zones de revitalisation rurale (ZRR) de la loi Pasqua, en vue d'en améliorer l'efficacité. Le moment semble venu de procéder à une évaluation des TRDP et des ZRR afin d'en déterminer leurs impacts sur les territoires concernés. En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui préciser si le Gouvernement a l'intention de s'orienter sur la définition non pas d'un nouveau zonage mais d'un dispositif de type « zone franche rurale » pour les territoires ruraux les plus fragiles.
Réponse en séance, et publiée le 26 février 2003
POLITIQUE D'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE
DANS LES ZONES RURALES
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Morel-A-L'Huissier, pour exposer sa question n° 156 relative à la politique d'aménagement du territoire dans les zones rurales.
M. Pierre Morel-A-L'Huissier. Monsieur le ministre de l'aménagement du territoire, lors du CIADT du 13 décembre 2002, en complémentarité avec les mesures de simplification souhaitée par le Gouvernement, il a été affirmé que l'amélioration des procédures communautaires passe notamment par l'abandon des zonages a priori, dont les effets pervers ont été maintes fois soulignés. A cet égard, comment ne pas rappeler la définition du zonage de la PAT, qui a exclu la Lozère, département hautement symbolique, et d'une réalité profonde, avec moins de 14 habitants au kilomètre carré, une altitude moyenne de 1 000 mètres, et qui est constitué d'un tissu rural encore fortement axé sur l'agriculture. Je ne crains pas d'affirmer ici que cette exclusion, qui repose sur des critères peu objectifs, est une véritable aberration. Comment ne pas dénoncer, à ce niveau, la faible programmation des crédits européens et, par suite, leur faible consommation en France, alors même que nos territoires ruraux ont besoin d'aides publiques, notamment communautaires ?
Concernant toujours la notion de zonage, je rappelle que la loi Pasqua de 1995 avait créé les territoires ruraux de développement prioritaire, les TRDP, et les zones de revitalisation rurale, les ZRR, et que, lors de la réunion du CIADT de décembre 2002, le Gouvernement a décidé de mettre à plat ces zonages économiques ruraux, en vue d'en améliorer l'efficacité. Monsieur le ministre, le moment me semble aujourd'hui venu de procéder à une véritable évaluation des TRDP et des ZRR, afin de déterminer leur impact véritable sur les territoires concernés.
Je suis d'autant plus convaincu de cette nécessité que l'ensemble du dispositif des zones franches urbaines a précisément fait l'objet d'une évaluation dans le rapport élaboré par le sénateur Pierre André au nom de l'action économique. Je tairai, bien évidemment, les conclusions du rapport scandaleux de l'IGAS commandité par l'ancien ministre Aubry.
Monsieur le ministre, à l'heure de la prorogation du dispositif des zones franches urbaines, le Gouvernement a-t-il l'intention de s'orienter à la fois vers l'évaluation des ZRR et des TRDP et vers la définition non pas d'une nouvelle zone, mais d'un dispositif qui pourrait s'apparenter à des zones franches rurales pour les territoires ruraux les plus fragiles ? En d'autres termes, quels dispositifs dérogatoires entendez-vous mettre en place pour recréer l'attractivité des territoires ruraux à handicaps permanents ?
M. Jean Auclair. Bonne question !
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.
M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Je connais bien, monsieur Pierre Morel-A-L'Huissier, votre engagement - pour ne pas dire votre mobilisation - en faveur des territoires ruraux, et notamment de ceux de votre département, la Lozère. Cette question est en effet importante. On ne peut pas un seul instant imaginer que la mondialisation et le développement économique de l'espace européen nouveau puissent se traduire par des structures territoriales qui laisseraient certains pans de notre territoire national sur le chemin de la désespérance et du déclin. Il n'y a pas de fatalité du déclin, tant dans le milieu urbain que dans le milieu rural où, paradoxalement, les mêmes causes engendrent les mêmes effets : d'un côté, une concentration des misères urbaines qui ouvre le chemin de la violence ; de l'autre, un sentiment de désertification et d'abandon.
C'est la raison pour laquelle, nous préparons, avec mon collègue Hervé Gaymard, et à la demande du Premier ministre, un projet de loi sur le développement rural, à un moment où la révision de la politique agricole commune suscite aussi quelques interrogations sur les évolutions des économies agricoles, et où les espaces ruraux voient apparaître de nouveaux facteurs d'attractivité tout autant que d'abandon.
Nous avons donc pour priorité de favoriser l'émergence des projets de territoires qui intègrent les espaces ruraux, avec la volonté de concilier l'attractivité des villes et des campagnes avec l'espace périurbain ou l'espace rural profond. C'est dans cette optique privilégiant une logique de projet que nous avons simplifié la procédure des pays et mis à la disposition des acteurs du développement, notamment rural, les ingénieries qui leur permettront de concevoir des projets, éligibles aux fonds européens, voire, dans le cadre des contrats de plan Etat-régions, de susciter le développement de ces territoires.
Vous avez raison d'indiquer qu'un long débat a eu lieu sur les zones franches urbaines, avec des évaluations, selon les auteurs, tantôt positives tantôt négatives. Nous avons le même souci à propos des zones de revitalisation rurale, dont il faudra tenir compte pour améliorer les dispositifs que nous entendons mettre en oeuvre dans le cadre de cette future loi sur le développement rural.
Nous travaillons actuellement sur plusieurs pistes. Il s'agit premièrement d'assurer une utilisation optimale de ce que peut permettre le dispositif des ZRR, éventuellement en l'adaptant pour tenir compte des conclusions de l'audit engagé par le Gouvernement à la suite du CIADT. L'outil doit être lisible et crédible.
Deuxièmement, il faut mobiliser d'autres mesures existantes, en particulier le dispositif dérogatoire de sortie de zonage PAT et la règle « de minimis ».
Troisièmement, il importe de négocier dans le cadre communautaire les interprétations concernant notamment les aides directes aux entreprises, comme la valeur de l'immobilier ou les surcoûts d'infrastructure liés à une mise à niveau équivalente à celle que l'on trouve en milieu urbain. Ne pas en tenir compte revient en effet paradoxalement à créer un handicap supplémentaire au détriment des territoires ruraux. Et dans les négociations sur les fonds structurels, introduire davantage de souplesse, notamment en direction du territoire rural, peut constituer une réponse.
Quatrièmement, enfin, il faut réussir à mettre en oeuvre les subventionnements publics dérogatoires nécessaires pour assurer certains services de proximité en milieu rural, à l'instar de l'accord que j'ai pu obtenir du commissaire européen Mario Monti, qui m'a été confirmé par le commissaire Michel Barnier, sur la téléphonie mobile.
L'ensemble de ces dispositifs est très encadré au niveau de l'Union européenne. C'est pourquoi nous avons rencontré dès le 29 novembre 2002 des membres du cabinet de Michel Barnier, commissaire chargé de la politique régionale, et j'aurai dans les meilleurs délais un entretien, à ce sujet, avec M. Mario Monti, commissaire chargé de la concurrence. Avec ma collègue Noëlle Lenoir, nous mettrons tout en oeuvre pour que les politiques européennes nous autorisent une plus grande souplesse dérogatoire en faveur des territoires pour lesquels vous manifestez votre attachement et votre motivation.
La dynamique globale du pays ne peut pas se limiter à certains espaces. Votre engagement autour du thème de la ruralité me permet, monsieur le député, de confirmer celui du Gouvernement d'assurer le plus possible le développement des richesses sur l'ensemble du territoire, et de garder cette cohésion territoriale en offrant une égalité des chances quels que soient les territoires, et notamment les territoires ruraux à démographie très faible.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Morel-A-L'Huissier.
M. Pierre Morel-A-L'Huissier. Merci, monsieur le ministre, pour votre réponse très circonstanciée, très technique. Permettez-moi de rebondir sur le problème de la ruralité profonde. Ma question allait en effet un peu au-delà des problèmes de zonages. Les territoires étant divers, je m'étais concentré davantage sur le rural isolé, le rural profond que vous connaissez bien. Je veux parler de ces régions faiblement peuplées, notamment de ces vingt-quatre départements bénéficiaires de la DFM, comme la Lozère, le Cantal, la Creuse, la Haute-Loire, l'Aveyron et bien d'autres, qui sont confrontés à une baisse de la population, à des fermetures d'écoles, à la disparition du dernier commerce rural, bref à la déchirure de leur tissu social.
Certains maires ruraux - je suis moi-même maire d'une commune de 320 habitants - me disent qu'ils ont le sentiment de gérer la décrépitude face à une déprise permanente et continue. Certes, on nous parle de solidarité des territoires, de devoir de péréquation, de simplification, et d'un projet de loi sur la ruralité et d'aménagement du territoire. Mais alors, que l'on sorte de vingt ans de fausse idéologie sur l'aménagement du territoire, y a-t-il, monsieur le ministre, une volonté gouvernementale très forte d'agir en faveur de la ruralité, de ces territoires ruraux les plus fragiles ? C'est un député UMP qui vous pose la question.
Auteur : M. Pierre Morel-A-L'Huissier
Type de question : Question orale
Rubrique : Aménagement du territoire
Ministère interrogé : fonction publique, réforme de l'Etat et aménagement du territoire
Ministère répondant : fonction publique, réforme de l'Etat et aménagement du territoire
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 24 février 2003