Question orale n° 1854 :
taxe intérieure sur les produits pétroliers

12e Législature

Question de : M. Jean-Pierre Decool
Nord (14e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Jean-Pierre Decool attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la modulation de la taxe intérieure sur les produits pétroliers jusqu'alors réservée à l'État, qui a été accordée aux régions par l'Union européenne. Après avoir augmenté la fiscalité régionale de 17,5 % en deux ans (taxes foncières, taxe professionnelle), l'exécutif de la région Nord - Pas-de-Calais d'apprête donc à utiliser pour 2007 une nouvelle arme de fiscalisation : la TIPP régionale ! Ainsi, malgré les efforts déployés par la majorité gouvernementale pour baisser la fiscalité et augmenter la prime pour l'emploi destinée à redonner du pouvoir d'achat aux plus bas revenus, certains exécutifs départementaux et régionaux surfiscalisent le contribuable et lui reprennent de la main gauche ce que notre Gouvernement lui avait donné de la main droite. Pire encore, pour ces mêmes exécutifs, cette nouvelle taxation permettrait le remboursement de grands emprunts contractés sur de longues durées alors que l'Union européenne n'a autorisé la modulation de TIPP régionale que pour une période de trois ans... Il souhaiterait donc que, dans un souci de clarification et pour rétablir certaines vérités, il expose à la représentation nationale et à nos concitoyens les éléments qu'il possède quant à l'avenir de la TIPP régionale en termes d'avancée des négociations avec l'Union européenne.

Réponse en séance, et publiée le 31 janvier 2007

MISE EN OEUVRE DE LA TIPP REGIONALE

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour exposer sa question, n° 1854.
M. Jean-Pierre Decool. Ma question s'adresse à M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'État. La modulation de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, jusqu'alors réservée à l'État, a été accordée aux régions par l'Union européenne. Après avoir augmenté la fiscalité régionale de 17,5 % en deux ans - taxes foncières, taxe professionnelle -, l'exécutif de la région Nord-Pas-de-Calais s'apprête donc à utiliser pour 2007 une nouvelle arme de fiscalisation : la TIPP régionale ! Ainsi, malgré les efforts déployés par la majorité gouvernementale pour baisser la fiscalité et augmenter la prime pour l'emploi destinée à redonner du pouvoir d'achat aux plus bas revenus, certains exécutifs départementaux et régionaux " surfiscalisent " le contribuable. Ils reprennent de la main gauche ce que le Gouvernement avait donné de la main droite.
Pire : pour ces mêmes exécutifs, cette nouvelle taxation permettrait le remboursement de grands emprunts contractés sur de nombreuses années, alors que l'Union européenne n'a autorisé la modulation de la TIPP régionale que pour une période de trois ans.
Je souhaiterais donc, madame la ministre déléguée au commerce extérieur, que, dans un souci de clarification et pour rétablir certaines vérités, vous exposiez à la représentation nationale et à nos concitoyens les éléments que vous possédez quant à l'avenir de la TIPP régionale en termes d'avancée des négociations avec l'Union européenne.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée au commerce extérieur.
Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur. Vous avez appelé l'attention de mon collègue Jean-François Copé - que je vous remercie de bien vouloir excuser ce matin et que je vais m'efforcer de remplacer - sur ce qui a été " donné de la main droite et repris de la main gauche ". M. Copé m'a fait part d'un certain nombre de chiffres précis sur les augmentations qui ont eu lieu dans ce domaine, en particulier dans la région Nord-Pas-de-Calais.
La France a obtenu à l'unanimité du Conseil de l'Union européenne le 6 octobre 2005, deux ans après en avoir fait la demande, une dérogation à la directive restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l'électricité. Cette dérogation a été accordée à la France pour trois ans, c'est-à-dire pour la période 2007-2009.
Cette dérogation conditionnait la faculté pour les régions de métropole de moduler les tarifs de la taxe intérieure sur les produits pétroliers - la fameuse TIPP - qui leur est affectée pour la compensation des transferts de compétences. La TIPP n'étant pas levée outre-mer, les régions ultra-marines bénéficient d'une compensation par dotation. La capacité de modulation des tarifs par les régions a été conçue comme un élément de leur autonomie financière, dans le cadre de la mise en oeuvre de l'acte II de la décentralisation et de la loi organique relative à l'autonomie financière des collectivités territoriales.
Alors que les régions avaient déjà fait littéralement exploser leur taux de fiscalité directe ces deux dernières années, à hauteur de 21 % en 2005 et 7,5 % en 2006, et ce de manière préventive, c'est-à-dire avant de bénéficier des transferts de compétences les plus lourds qui entrent en vigueur en 2007, on ne peut que déplorer qu'elles aient à nouveau fait le choix d'augmenter aussi massivement la pression fiscale en mobilisant au maximum dans la plupart des cas leurs marges de modulation de la TIPP.
En effet, sur vingt-deux régions de métropole, dix-huit ont utilisé la faculté maximale, augmentant de ce fait d'environ 520 millions d'euros la charge pesant sur le contribuable.
La région Nord-Pas-de-Calais n'est pas en reste ; elle s'est également saisie pleinement de cette capacité de modulation, en portant pour 2007 les tarifs sur le gazole et le super sans plomb au maximum des limites fixées par la dérogation du Conseil de l'Union. Le surplus de recettes attendu en 2007 est de l'ordre de 38 à 40 millions d'euros pour la région, à la charge de l'automobiliste régional.
S'agissant des ressources de la région Nord-Pas-de-Calais, nous observons que le conseil régional a voté de 2004 à 2006 des progressions des taux d'impôts directs de près de 17 % pour les taxes foncières et de plus de 18 % pour la taxe professionnelle. Cette hausse de taux, conjuguée avec l'évolution des bases fiscales, entraîne une augmentation du produit fiscal de 17,5 % pour la seule année 2005.
Avec le transfert de la TIPP et l'imposition maximale dont la région a fait le choix, l'ensemble des ressources fiscales de la région Nord-Pas-de-Calais augmente de 24,3 % entre 2004 et 2005.
Il ne paraît pas raisonnable de justifier cette décision du conseil régional par la prétendue insuffisance de la compensation financière des transferts de compétences aux régions. Je rappelle que le calcul de cette compensation intervient sous le contrôle de la Commission consultative d'évaluation des charges, dont le vice-président est M. Michel Sapin, président du conseil régional du Centre.
Le Gouvernement est en outre allé au-delà de ses obligations légales, concernant la compensation du transfert aux régions des formations sanitaires : pour le calcul, il a ainsi été fait référence à l'année 2005, plus favorable, et non à la moyenne des trois dernières années. Quant au transfert des agents techniciens, ouvriers et de service, les TOS, dans les lycées, la compensation a porté sur la cotisation au CNFPT et sur les charges sociales, en évaluant le coût supporté par les collectivités. Le rapport de MM. Bonrepaux et Laffineur du 14 décembre 2006 sur ce sujet a d'ailleurs conclu que " l'État remplit - et parfois au-delà - les obligations qu'il s'est fixées dans la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales ".
M. Maxime Gremetz. On l'a déjà entendue, celle-là !
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool.
M. Jean-Pierre Decool. Madame la ministre, votre analyse et les conclusions que vous en tirez confirment mes inquiétudes quant à la surfiscalisation qui pèse sur les habitants du Nord-Pas-de-Calais du fait des décisions du conseil régional. Il s'agit bien là d'une confiscation de leur pouvoir d'achat : il fallait le dire, même si vous n'en portez pas la responsabilité.

Données clés

Auteur : M. Jean-Pierre Decool

Type de question : Question orale

Rubrique : Impôts et taxes

Ministère interrogé : affaires étrangères

Ministère répondant : budget et réforme de l'Etat

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 30 janvier 2007

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