Question orale n° 191 :
retraites complémentaires

12e Législature

Question de : M. Jean-Paul Dupré
Aude (3e circonscription) - Socialiste

M. Jean-Paul Dupré attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales sur les conditions d'attribution de la retraite complémentaire aux non-salariés agricoles. La création d'un régime de retraite complémentaire obligatoire pour les non salariés agricoles adoptée par le Parlement en février 2002 constitue une avancée importante. Il s'agit en effet d'une mesure de justice sociale attendue depuis longtemps par le monde agricole et qui devrait permettre en particulier de porter les plus petites retraites agricoles à un niveau décent. Or des inquiétudes apparaissent aujourd'hui parmi les retraités agricoles au sujet des conditions d'attribution de cette retraite complémentaire. Une différenciation est en effet prévue entre ceux dont la retraite a pris effet avant le 1er janvier 1997, et ceux dont la retraite a pris effet entre le 1er janvier 1997 et le 31 décembre 2002. Il serait demandé aux premiers de justifier de 32,5 années d'activité non salariée agricole, dont 17,5 années en qualité de chef d'exploitation et aux seconds de justifier de 37,5 années de cotisations tous régimes confondus, dont 17,5 années en qualité de chef d'exploitation. Ces dispositions auraient pour effet d'écarter du bénéfice de la retraite complémentaire un nombre considérable des retraités dont la retraite a pris effet avant le 1er janvier 1997. Ces derniers ne remplissent pas en effet la condition des 32,5 années d'exercice d'activité non salariée agricole, ce qui est le cas de nombreux retraités qui ont commencé par être salariés agricoles, bien souvent d'ailleurs chez leurs parents. Il résulte de ce qui précède que dans le département de l'Aude par exemple sur 20 000 retraités environ, seuls 1 700 percevraient une retraite complémentaire complète et 1 600 une retraite minorée. Il y a là visiblement une iniquité de traitement que les retraités agricoles souhaiteraient très légitimement voir, disparaître et qui va à l'encontre des objectifs visés par la loi adoptée par le Parlement en février 2002. Il lui demande quelles sont ses intentions en la matière.

Réponse en séance, et publiée le 19 mars 2003

CONDITIONS D'ATTRIBUTION DE LA RETRAITE
COMPLÉMENTAIRE DES NON-SALARIÉS AGRICOLES

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Dupré, pour exposer sa question n° 191, relative aux conditions d'attribution de la retraite complémentaire des non-salariés agricoles.
M. Jean-Paul Dupré. Madame la ministre de l'écologie et du développement durable, ma question s'adresse à votre collègue, M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.
La création d'un régime de retraite complémentaire obligatoire pour les non-salariés agricoles, adoptée par le Parlement en février 2002, sous le précédent gouvernement, a constitué une avancée très importante. Cette mesure de justice sociale, attendue depuis longtemps par le monde agricole, devrait notamment permettre de porter les plus petites retraites agricoles à un niveau décent.
Or le décret du 20 février 2003, relatif aux conditions d'organisation et à l'organisation du régime de retraite complémentaire obligatoire pour les non-salariés, remet gravement en cause cet objectif. Il instaure en effet une différenciation entre ceux dont la retraite a pris effet avant le 1er janvier 1997 et ceux dont la retraite a pris effet entre le 1er janvier 1997 et le 31 décembre 2002.
Il est demandé aux premiers de justifier de trente-deux années et demie d'activité non salariée agricole, dont dix-sept années et demie en qualité de chef d'exploitation, et aux seconds de justifier de trente-sept années et demie de cotisation, tous régimes confondus, dont dix-sept années et demie en qualité de chef d'exploitation.
Ces dispositions, si elles sont appliquées, auront pour effet d'écarter du bénéfice de la retraite complémentaire un nombre considérable de retraités dont la retraite a pris effet avant le 1er janvier 1997. Ces derniers ne remplissent en effet que très rarement la condition des trente-deux années et demie d'exercice d'activité non salariée agricole ; c'est le cas de nombreux retraités qui ont commencé par être salariés agricoles, bien souvent d'ailleurs chez leurs parents.
Il résulte de ce qui précède que, dans le département de l'Aude, par exemple, sur environ 20 000 retraités de l'agriculture, seuls 1 700 percevront une retraite complémentaire complète et 1 600 une retraite minorée. Il y a là visiblement une iniquité de traitement que les retraités agricoles souhaiteraient très légitimement voir disparaître et qui va à l'encontre des objectifs visés par la loi adoptée par le Parlement en février 2002.
Je demande donc à M. le ministre de l'agriculture de faire en sorte qu'aucun de ces retraités de l'agriculture ne reste sur le bord du chemin et de nous préciser quelles assurances il peut donner aujourd'hui aux retraités non salariés agricoles quant à un traitement équitable de leur droit légitime à cette retraite complémentaire qu'ils attendaient depuis des décennies.
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le député, permettez-moi tout d'abord de revenir un instant sur les principes ayant présidé à la création du régime de retraite complémentaire obligatoire pour les non-salariés agricoles.
Il s'agissait de créer un système de retraite complémentaire qui, à l'instar de ceux qui existent pour les salariés, permette aux actifs de se constituer une retraite complémentaire par leurs cotisations.
Concernant les actuels retraités, le nouveau régime leur permet d'obtenir une retraite complémentaire sans avoir eu à cotiser. Il était nécessaire de déterminer dans quelles conditions celle-ci serait octroyée.
Le principe retenu a été de privilégier les carrières longues avec une partie importante en tant que chef d'exploitation. C'est pourquoi il est demandé à ceux qui ont cessé leur activité après 1997 de faire état de quarante ans d'activité tous régimes confondus et dix-sept années et demie en tant que chef d'exploitation.
Ces dispositions particulières ont été prises pour les personnes ayant pris leur retraite avant le 1er janvier 1997. Ces dispositions étaient nécessaires par le fait que le système d'information sur les retraites ne permettait pas de reconstituer la carrière des non-salariés pour la partie chefs d'exploitation. Un nouvel équilibre a donc été choisi : les dix-sept années et demie de chef d'exploitation ont été reconstituées à partir des informations existantes, en retenant des critères favorables aux intéressés. Parallèlement, il a été retenu une carrière complète de trente-deux années et demie dans le régime des non-salariés agricoles au lieu des quarante ans tous régimes.
Un tel dispositif oblige actuellement à fixer des frontières, avec une part d'arbitraire, entre bénéficiaires et non bénéficiaires. Le Gouvernement est ouvert à une réflexion sur les conséquences des seuils existant et sur les aménagements envisageables. Toutefois, il faudra tenir compte des contraintes financières, sachant que toute dépense supplémentaire doit être financée soit par une augmentation des cotisations des actifs, soit par une hausse de la subvention de l'Etat.
Le régime de retraite complémentaire obligatoire constitue une avancée sociale majeure, qui bénéficiera dès le mois d'avril 2003 à plus de 400 000 anciens chefs d'exploitation agricole.
Rappelons pour terminer que c'est l'engagement du Gouvernement qui aura permis de sauver cette avancée sociale trouvée à l'état de stricte promesse : en effet, et vous le savez, monsieur le député, le précédent gouvernement n'avait pas prévu de financement pour cette mesure.
M. François Rochebloine. Excellent rappel !
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Dupré.
M. Jean-Paul Dupré. Madame la ministre, je vous remercie de ces informations. Malheureusement, je doute qu'elles répondent totalement aux attentes des retraités de l'agriculture qui, lorsqu'ils étaient actifs, ont bien souvent énormément apporté à notre pays, en particulier dans des moments très difficiles de son histoire. Les voilà aujourd'hui atteignant l'âge de la retraite après des décennies d'un très dur labeur ; il est essentiel que leur situation soit prise en considération.
J'ose espérer que ce texte pourra être modifié et amélioré. Je crois savoir qu'une délégation de retraités de l'agriculture sera reçue très prochainement par M. le ministre de l'agriculture. Ils ne manqueront pas de reconfirmer eux-mêmes à M. le ministre et à ses services ce qu'ils attendent du Gouvernement : la mise en place effective de ce qui leur avait été promis en février 2002.

Données clés

Auteur : M. Jean-Paul Dupré

Type de question : Question orale

Rubrique : Retraites : régime agricole

Ministère interrogé : agriculture, alimentation et pêche

Ministère répondant : agriculture, alimentation et pêche

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 17 mars 2003

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