EDF
Question de :
M. Jean-Michel Bertrand
Ain (1re circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Jean-Michel Bertrand appelle l'attention de Mme la ministre déléguée à l'industrie sur la situation actuelle et les perspectives de l'évolution de la demande d'EDF en matière de câbles isolés moyenne tension (20 kW). Il rappelle que, à la suite de la tempête de décembre 1999, EDF avait engagé d'urgence des travaux de sécurisation et de consolidation puis avait annoncé un programme de « reconstruction » du réseau à réaliser sur une période de quinze années. En moyenne tension, les travaux prévus concernaient principalement l'enfouissement de lignes aériennes en zones boisées, comme cela avait été recommandé par la commission technique de l'électricité et repris dans le nouvel arrêté technique sur les réseaux publics de distribution d'électricité. A ce jour, le programme de reconstruction n'a toujours pas démarré. Au contraire avec 5 350 kilomètres de câbles moyenne tension achetés par EDF, l'année 2002 se situe au plus bas niveau depuis quinze ans. Il souligne que la France est l'un des pays de l'Union européenne où le taux d'enfouissement du réseau moyenne tension est le plus bas, avec 32 %. Il rappelle que l'industrie du câble moyenne tension est une industrie qui requiert du personnel qualifié. Les capacités installées par l'industrie française l'ont été pour faire face à la demande de 11 000 à 12 000 kilomètres par an de lignes, demande qui fut celle d'EDF dans la première moitié des années 1990. Aujourd'hui, le niveau de la demande ne permettra pas de maintenir les capacités existantes, ni l'emploi à son niveau actuel. Cela est d'autant plus vrai qu'EDF a décidé, nonobstant la baisse de son volume d'achat, d'introduire deux nouveaux fournisseurs étrangers, l'espagnol General Cable et l'allemand NKT en sus des quatre fournisseurs français. La pérennité de l'outil industriel français en câbles moyenne tension est ainsi menacée, et ce alors que les besoins sont substantiels (environ 400 000 kilomètres de lignes moyenne tension aériennes). Enfin, dans le cadre de la nouvelle directive européenne sur la libéralisation du marché intérieur de l'électricité, il sera probablement obligatoire de créer un gestionnaire du réseau de distribution (GRD) français, indépendant du producteur historique EDF. En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui indiquer, d'une part, les objectifs qui seront fixés au futur GRD en matière d'enfouissement des lignes, de sécurité des personnes, de fiabilité d'approvisionnement en cas d'aléas climatiques et en régime normal et, d'autre part, les modes et le niveau de financement qui seront retenus pour le GRD. En effet, le volume d'achats de câbles électriques moyenne et basse tension dépendra pour l'avenir du contenu de la transposition dans la loi française de la future directive européenne sur la libéralisation du marché intérieur de l'électricité.
Réponse en séance, et publiée le 30 avril 2003
CONSÉQUENCES DE L'OUVERTURE DU MARCHÉ
DE L'ÉLECTRICITÉ SUR LA RESTRUCTURATION
DES RÉSEAUX ÉLECTRIQUES D'EDF
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Bertrand, pour exposer sa question, n° 276, relative aux conséquences de l'ouverture du marché de l'électricité sur la restucturation des réseaux électriques d'EDF.
M. Jean-Michel Bertrand. Je souhaite associer mon collègue Jean-Claude Decagny, député du Nord, à ma question adressée à Mme la ministre déléguée à l'industrie relative à la situation actuelle et aux perspectives d'évolution de la demande d'Electricité de France en matière de câbles isolés moyenne tension, généralement 20 kilowatts.
La tempête qu'à connue la France en décembre 1999 a conduit EDF, après les premiers travaux de sécurisation, à réaliser un programme de consolidation du réseau moyenne tension qui a été achevé à la fin de 2001. Parallèlement, l'entreprise avait annoncé un programme de renouvellement du réseau s'étendant sur une période de quinze années.
Pour ce qui est de la moyenne tension, les projets concernaient principalement l'enfouissement de lignes aériennes en zones boisées, comme cela avait été recommandé par la commission technique de l'électricité et repris par le nouvel arrêté technique sur les réseaux publics de distribution d'électricité.
Or, à ce jour, ce programme n'a toujours pas démarré. Au contraire, avec 5 350 kilomètres de câbles moyenne tension achetés par EDF, l'année 2002 se situe au plus bas niveau depuis quinze ans. La France demeure ainsi l'un des pays de l'Union européenne où le taux d'enfouissement du réseau moyenne tension est le plus bas : 32 %, contre 100 % aux Pays-Bas, 85 % en Belgique et 60 % en Allemagne.
On ne saurait trop souligner que les lignes aériennes présentent, outre leur inconvénient esthétique, une moindre fiabilité en raison des aléas climatiques, et qu'elles sont plus accidentogènes. Au rythme actuel d'investissement d'EDF, il faudra plus de trente ans pour atteindre le taux d'enfouissement de l'Allemagne.
A cet égard, je tiens à souligner que l'industrie du câble moyenne tension requiert du personnel qualifié. Les capacités installées par l'industrie française ont été conçues pour faire face à une demande de 11 000 à 12 000 kilomètres de lignes par an, celle d'EDF dans la première moitié des années 90. Aujourd'hui, le volume de la demande ne permettra pas de maintenir les capacités existantes ni, bien entendu, l'emploi à son niveau actuel.
Cette situation sera encore aggravée par la décision récente d'EDF, nonobstant la baisse de son volume d'achats, de recourir à deux nouveaux fournisseurs étrangers, l'espagnol General Cable et l'allemand NKT, en sus des quatre fournisseurs français : Draka, Nexans, Pirelli et Sagem. La pérennité de l'outil industriel français du câble moyenne tension est ainsi menacée, alors que les besoins sont substantiels, puisqu'il existe environ 400 000 kilomètres de lignes aériennes moyenne tension.
Enfin, dans le cadre de la nouvelle directive européenne sur la libéralisation du marché intérieur de l'électricité, il sera probablement obligatoire de créer un gestionnaire du réseau de distribution français indépendant du secteur historique EDF.
Dans ce contexte, le développement du réseau français de distribution électrique dans les décennies futures et, indirectement, la pérennité de l'industrie française du câble dépendront, d'une part, des objectifs qui seront fixés au futur gestionnaire du réseau de distribution en matière d'enfouissement des lignes, de sécurité des personnes et de fiabilité de l'approvisionnement en cas d'aléas climatiques et en cas de régime normal, et, d'autre part, des modes et du niveau de financement qui seront retenus pour ce gestionnaire du réseau de distribution. En effet, le volume d'achat de câbles électriques moyenne et basse tension sera fonction dans l'avenir du contenu de la transposition dans la loi française de la future directive européenne sur la libéralisation du marché intérieur de l'électricité. Je remercie par avance le Gouvernement de m'apporter des éclaircissements sur tous ces points.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au commerce extérieur.
M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur. Monsieur le député, je pense que la question que vous posez est inspirée à la fois par le souci de préserver l'environnement et par celui de préciser les prévisions de travail des industriels, ce qui est tout à fait légitime.
Tirant les conséquences des tempêtes de décembre 1999, l'Etat a conclu au début de 2002 un accord avec EDF et RTE prévoyant un engagement renforcé des entreprises pour assurer une meilleure insertion dans l'environnement et une plus grande sécurisation des réseaux électriques. Ainsi, 90 % des nouveaux ouvrages en moyenne tension et plus des deux tiers en basse tension doivent être réalisés en souterrain ou selon des techniques « discrètes ». Concernant les ouvrages les plus sensibles aux intempéries, 6 000 kilomètres de réseaux aériens à moyenne tension et 8 000 kilomètres à basse tension doivent également être déposés chaque année. Cela représente 14 000 kilomètres, à mettre en regard des 10 000 ou 11 000 que vous avez cités, représentant la capacité de l'industrie française, et des 5 000 kilomètres réalisés l'année dernière.
Un bilan des actions menées dans ce cadre par EDF pour l'année 2002 sera remis prochainement à l'Etat. Le Gouvernement veillera à ce que des mesures correctrices soient prises si l'application de l'accord ne donnait pas satisfaction. Mme Fontaine a également demandé à EDF de se rapprocher des industriels du secteur du câble afin de leur fournir une plus grande visibilité quant à l'évolution de ses commandes et de permettre à cette industrie, qui est une force de la France, de mieux s'adapter.
En revanche, concernant le recours à des fournisseurs étrangers, je ne peux que vous rappeler qu'EDF est soumis à la directive 93/38 du 14 juin 1993 qui l'oblige à procéder à une mise en concurrence à l'échelle européenne.
Quant à la transposition du projet de seconde directive sur le marché intérieur de l'électricité, elle devra se traduire par une identification plus forte et une plus grande autonomie du gestionnaire de réseau public de distribution au sein d'EDF. Les objectifs en matière d'enfouissement des réseaux seront ainsi reconduits et renforcés avec l'accord du gestionnaire de réseau public de distribution identifié au sein d'EDF.
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Bertrand.
M. Jean-Michel Bertrand. Je vous remercie, monsieur le ministre, pour ces indications. S'il est vrai que des considérations environnementales m'ont poussé à demander que ces travaux soient assurés dans l'urgence et avec une grande vigilance, le souci du maintien de l'activité industrielle motivait aussi ma question et c'est également à ce titre que je suis intervenu.
Les 5500 kilomètres de câbles sont une réalité : c'est ce qu'a acheté EDF en 2002. Vous m'annoncez la mise en réseau souterrain de 14 000 kilomètres de câbles. Mais ce ne sont encore que des orientations et il est urgent que les entreprises aient une meilleure visibilité si vous voulez que la gestion prévisionnelle des personnels et des infrastructures soit compatible avec l'engagement d'un opérateur pratiquement en situation de monopole. Il faut éviter une ouverture trop rapide et débridée de tous les marchés. Il faut prévoir un passage en douceur et programmé du tout monopole à ce nouveau type d'économie.
Après les indications que vous venez de donner, monsieur le ministre, j'attends maintenant la concrétisation rapide des orientations et la publication du bilan d'EDF, et je compte sur la vigilance du Gouvernement dans cette affaire.
Auteur : M. Jean-Michel Bertrand
Type de question : Question orale
Rubrique : Énergie et carburants
Ministère interrogé : industrie
Ministère répondant : industrie
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 28 avril 2003