carte scolaire
Question de :
M. Jean Auclair
Creuse (2e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Jean Auclair appelle l'attention de M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire sur le mode de gestion de la carte scolaire qui pose de nombreux problèmes dans les départements ruraux, et cette année, l'agitation est particulièrement vive. Il rappelle, au préalable, qu'en 2002 l'intervention du Gouvernement a permis de sauver six écoles à classe unique en Creuse, preuve que ce Gouvernement soutient l'éducation en milieu rural, et il tenait à le remercier. Il sait bien que pour répondre aux préoccupations d'aménagement du territoire et d'accueil de l'ensemble des élus locaux, il est nécessaire de maintenir un nombre suffisant d'écoles, de classes et de regroupements pédagogiques en zone rurale, A cet égard, lors de l'établissement de la carte scolaire, il serait judicieux de prendre en considération les investissements conséquents consentis par les communes (garderies, réfection des salles de cours, mise aux normes des cantines...) et leur accorder, en conséquence, un droit d'information pour les projets de fermeture et un droit d'intervention les autorisant à solliciter un moratoire pour une période d'observation dont la durée est à déterminer. En effet, il ne faut pas oublier que les petites communes rurales sont affectées par des fluctuations importantes des effectifs d'une rentrée à l'autre. Pour les zones dites de montagne, et en Creuse pour le secteur qu'il convient d'appeler le plateau de Millevaches, il serait souhaitable de classer cette zone géographique en zone d'éducation prioritaire ou en réseaux ruraux d'éducation, ce classement devant permettre de répondre aux difficultés engendrées par une densité de population inférieure à cinquante habitants au km², qui génère des temps de trajet longs et difficiles, notamment en période hivernale. Enfin, la carte scolaire ne pouvant être réduite à une question arithmétique, il serait nécessaire d'établir clairement, pour le département, le nombre d'enseignants en poste et de fixer les priorités lors des suppressions éventuelles. En effet, dans son département, les professeurs ne manquent pas, mais certains sont détachés au sein de différents organismes tels que la FOL, l'USEP, les EMALAS, etc. D'autres sont même animateurs en informatique ou initiateurs à l'anglais alors que la formation dispensée en IUFM devrait permettre aux professeurs des écoles de prodiguer ces initiations. Ces professeurs ont embrassé la fonction par vocation, et il lui propose de redéployer les postes à sa disposition pour que les enseignants retrouvent leur mission d'origine, et ce pour la plus grande satisfaction des élèves, de leurs parents et des élus locaux. Aussi, il rappelle que le plan Lang-Royal, qui prévoyait de réunir les classes primaires autour du collège local, a entraîné des fermetures de postes sans précédent puisque, dans son département, sur les cinq dernières années, trente-six postes ont été supprimés. Ceux qui, hier, regardaient passivement ces postes disparaître au lieu de réfléchir, mettent aujourd'hui les gens dans la rue car c'est leur mode de fonctionnement quotidien. Pour illustrer ce propos, il ajoute que le président socialiste du conseil général de la Creuse a inventé cette année des « assises départementales de l'école » et s'interroge sur les raisons pour lesquelles celles-ci n'ont pas été mises en place plus tôt. En conséquence, il lui demande de lui indiquer les éventuelles modifications du mode de gestion de la carte scolaire envisagées et de lui préciser les moyens qu'il entend déployer pour ce faire.
Réponse en séance, et publiée le 7 mai 2003
ÉLABORATION DE LA CARTE SCOLAIRE DANS LA CREUSE
M. le président. La parole est à M. Jean Auclair, pour exposer sa question n° 312, relative à la gestion de la carte scolaire dans la Creuse.
M. Jean Auclair. Monsieur le ministre délégué à l'enseignement scolaire, le mode de gestion de la carte scolaire pose de nombreux problèmes dans les départements ruraux, notamment dans celui de la Creuse. Comme par hasard, et le hasard fait parfois bien les choses, l'agitation est particulièrement vive cette année.
Ces problèmes ne sont pas nouveaux : l'an dernier, seule votre intervention « ultra rapide » permit de sauver six écoles à classe unique dans notre département. Cela prouve, contrairement à la rumeur répandue aujourd'hui, que ce gouvernement soutient l'éducation en milieu rural et je tiens à vous en remercier.
Pour répondre aux préoccupations de l'ensemble des élus locaux en matière d'aménagement du territoire et d'accueil, il est nécessaire de maintenir un nombre suffisant d'écoles, de classes ou de regroupements pédagogiques en zone rurale.
Lors de l'établissement de la carte scolaire, il serait judicieux de prendre en considération les investissements conséquents consentis par les petites communes rurales - garderie, réfection des salles de cours, mise aux normes des cantines - et de leur accorder un droit d'information sur les projets de fermeture ainsi qu'un droit d'intervention les autorisant à solliciter un moratoire, pour une période d'observation dont la durée reste à déterminer. En effet, les petites communes rurales connaissent d'importantes fluctuations d'effectifs d'une rentrée à l'autre, fluctuations liées à la réhabilitation des logements sociaux.
Les zones dites de « montagne » - et, en Creuse, le secteur du plateau de Millevaches - devraient être classées en zone d'éducation prioritaire ou en réseaux ruraux d'éducation. Ce classement permettrait de répondre aux difficultés engendrées par une densité de population inférieure à cinquante habitants au kilomètre carré, qui génère des temps de trajet longs et difficiles, notamment en période hivernale.
Enfin, la carte scolaire ne pouvant être réduite à une question arithmétique, il serait nécessaire d'établir clairement, pour notre département, le nombre d'enseignants en poste et de fixer des priorités.
Dans le département de la Creuse, les professeurs ne manquent pas, mais certains sont détachés au sein de différents organismes tels que la MGEN, la FOL, l'USEP, les EMALA, etc. D'autres sont animateurs en informatique ou font de l'initiation à l'anglais, alors que la formation dispensée en IUFM devrait permettre aux professeurs des écoles d'intervenir en ces domaines. Ces professeurs ont embrassé la fonction par vocation. Je vous propose, monsieur le ministre, de redéployer les postes à votre disposition pour leur permettre de retrouver enfin leur mission d'origine, et ce pour la plus grande satisfaction des élèves, de leurs parents et des élus.
Le plan Lang-Royal, qui prévoyait de réunir les classes primaires autour du collège local, a entraîné des fermetures de postes sans précédent dans mon département ; sur les quatre dernières années, trente-trois postes ont été supprimés dans l'indifférence la plus totale !
Ceux qui, hier, ont assisté passivement à la disparition de ces postes mettent aujourd'hui les gens dans la rue, car tel est leur mode de fonctionnement quotidien. Le président socialiste du conseil général de la Creuse, par exemple, a inventé cette année les « assises départementales de l'école ». Pourquoi n'y avoir pas songé plus tôt ? Sous la précédente législative, rien n'a été fait !
Monsieur le ministre, vous qui vous préoccupez réellement de l'aménagement du territoire, pouvez-vous m'indiquer si vous envisagez de modifier la gestion de la carte scolaire sont envisagées et quels moyens vous entendez redéployer ?
Certaines communes ou RPI rencontrent des problèmes sensibles. Allez-vous gérer ces problèmes avec souplesse, en maintenant le poste de professeur des écoles qui devait être supprimé ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire.
M. Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire. Monsieur le député, cher ami, vous m'interrogez sur la préparation de la rentrée scolaire dans le département de la Creuse et, plus généralement, sur la situation des départements ruraux s'agissant de la carte scolaire.
Je tiens d'abord à saluer votre engagement pour la défense de l'école rurale, particulièrement dans le département de la Creuse, pour lequel, vous vous battez beaucoup, avec une conviction qui a souvent emporté l'adhésion des ministres. Le Gouvernement faisant du monde rural l'une de ses priorités, nous nous sommes souvent rencontrés et j'ai eu plusieurs fois la joie de profiter de vos conseils et de vos analyses.
Venons-en maintenant à votre question. La méthode que nous utilisons pour répartir les emplois d'enseignants vise d'abord à assurer l'équité entre les académies, en tenant compte à la fois de la démographie, des disparités et de la diversité des situations géographiques et sociales, et en accordant une attention toute particulière aux zones rurales. J'ai été moi-même, avant d'être ministre, l'élu d'un département rural et je sais que le taux d'encadrement doit y être supérieur à celui des zones urbaines. C'est précisément le cas de la Creuse, qui est le troisième département de France en termes de taux d'encadrement. Sans doute est-ce parce que vous vous êtes bien battu... Reste que le résultat est là : à la prochaine rentrée scolaire, aucune école n'aura des effectifs supérieurs à vingt-quatre élèves par classe ; la moyenne départementale ne dépassera pas vingt élèves par classe. Le taux de scolarisation des enfants de deux ans en Creuse dépasse 50 %, alors que la moyenne nationale est inférieure à 34 %.
On peut donc dire, monsieur le député, que votre département n'est pas mal traité. Cela dit, nous ne considérons pas qu'il faut s'en tenir là. Notre politique est claire : nous voulons maintenir les écoles, même lorsque leurs effectifs sont faibles, parce que c'est une manière de maintenir un service public d'éducation proche des populations.
Autre aspect de votre question : la carte scolaire et les réseaux. Nous travaillons actuellement à donner un statut aux réseaux d'écoles, forme améliorée des regroupements pédagogiques intercommunaux, afin d'offrir les mêmes conditions d'enseignement à tous les élèves, qu'ils soient scolarisés en zone rurale ou en ville. Nous proposerons donc aux communes de participer à la mise en réseau de leurs écoles, en s'appuyant sur le développement de l'intercommunalité.
La constitution de réseaux d'écoles favorisera la réalisation d'un projet pédagogique dynamique grâce à un travail d'équipe. La mutualisation des moyens permettra une meilleure utilisation des budgets de fonctionnement. Surtout, nous sommes convaincus que, grâce à cette nouvelle organisation, l'école rurale pourra demeurer auprès des populations un service d'éducation de grande qualité, et nous éviterons par là d'amplifier l'exode des élèves vers les écoles des centres urbains les plus importants du département.
Cela exigera une attention plus soutenue encore des élus en ce qui concerne la carte scolaire. L'un des objectifs possibles du projet de décentralisation - nous devons naturellement en discuter - est que les élus la fixent avec nous.
Pour les secteurs fragiles, cette réponse me paraît d'ailleurs plus convaincante encore qu'un classement en ZEP, comme vous le souhaitez, par exemple, pour le plateau de Millevaches. En effet, le classement en ZEP, en particulier en ZEP rurale, n'a pas vraiment pour objet de répondre à des réalités sociales. Le recours à cette technique, qui vise essentiellement à faciliter l'organisation des services - de police, de santé de proximité - a, évidemment, plus de sens dans des quartiers urbains difficiles. Nous avons plutôt tendance à considérer qu'en zone rurale, les ZEP ne sont pas la réponse idéale. C'est une solution que l'on peut envisager, je n'exclus rien, mais il faudra en discuter avec l'inspecteur d'académie du département.
Enfin, vous m'interrogez à juste titre sur les postes d'enseignants dits « hors classe ». Dans la Creuse, les enseignants détachés ou mis à disposition sont au nombre de six. J'ai vérifié, avant de vous répondre, quelles missions leur étaient confiées ; elles sont bien liées au service public de l'éducation nationale, puisque ces enseignants participent notamment à l'enseignement des langues vivantes et à l'apprentissage de l'informatique. Je rappelle en outre que ces six postes ne sont pas prélevés sur les dotations départementales mais font l'objet de conventions passées entre le ministère et l'association au niveau national.
Quant aux dix-sept enseignants affectés par l'inspection d'académie à des missions plus particulières, ils ont précisément pour mission d'apporter une aide pédagogique à de très petites écoles - en particulier pour l'enseignement précoce des langues vivantes - et si nous les supprimions, nous fragiliserions encore la situation de ces écoles.
Monsieur le député, vous avez souligné que nous avons pu, ensemble, sauver six classes à la rentrée 2002. Nous poursuivrons cette politique de soutien au monde rural. Nous examinerons à la fin de ce trimestre ce qu'il en est du seul poste qui reste en suspens, en fonction des effectifs qui vont se dessiner. Je n'exclus rien, car je veux être attentif à vos demandes. Mais sachez que, d'une manière générale, cette politique de soutien au monde rural ne pourra se faire, comme vous l'avez souligné vous-même, qu'en élaborant de véritables schémas territoriaux pour les écoles.
M. le président. La parole est à M. Jean Auclair.
M. Jean Auclair. Monsieur le ministre, je vous remercie pour votre réponse, mais nous avons le sentiment, sur le terrain, que ceux qui manifestent aujourd'hui sont d'affreux conservateurs dont la seule volonté est de laisser les choses en l'état. Cela ne peut plus durer. Les Français ont voté pour le changement, il faut absolument que ça change. Il est inadmissible que, dans un département comme la Creuse, quatre instituteurs travaillent à la FOL. Quand cela se saura - et je vais le faire savoir -, les élus comme les parents seront scandalisés que des professeurs des écoles pantouflent dans cette association alors que nous en avons tellement besoin dans nos écoles rurales.
Du courage, monsieur le ministre ! Nous sommes là pour vous soutenir. Il faut absolument faire bouger les choses, car cette situation est intolérable.
Auteur : M. Jean Auclair
Type de question : Question orale
Rubrique : Enseignement
Ministère interrogé : enseignement scolaire
Ministère répondant : enseignement scolaire
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 mai 2003