contrats d'agriculture durable
Question de :
M. Jean-Louis Léonard
Charente-Maritime (2e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Jean-Louis Léonard appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales sur la question du financement des contrats d'agriculture durable et des opérations locales agro-environnementales. Les zones humides d'élevage et les prairies naturelles bénéficiaient des OLAE ou de CTE. Pour tous les bénéficiaires d'OLAE qui n'ont pas de CTE, la transition vers les CAD sera insupportable en terme de trésorerie et en conduira beaucoup à labourer les prairies naturelles pour y planter fétuques ou céréales de printemps. Pour la Charente-Maritime, 9000 hectares se retrouvent sans OLAE ni CTE ; dans le meilleur des cas, les 470 éleveurs concernés ne pourront bénéficier des retombées des CAD avant mi-2004. En outre, il tient à souligner l'inquiétude de nombreux éleveurs des marais, en particulier communaux, de Charente-Maritime et de Vendée ainsi que des communes propriétaires et gestionnaires de ces espaces, quant à la reconduction des aides financières destinées au pâturage et à la conservation du patrimoine biologique et culturel. Il lui demande donc quelles mesures il entend proposer afin de prolonger les contrats OLAE de un à deux ans en attendant le paiement des CAD, ainsi que de lui confirmer son accord pour la création d'une indemnité spéciale « zones humides » de 150 euros/hectare qui préfigure le volet financier de la future politique d'agriculture de marais pour laquelle son collègue Didier Quentin et lui-même travaillent à ses côtés. Par ailleurs, il souhaiterait également savoir s'il est dans ses intentions d'intégrer les marais communaux dans le nouveau dispositif des contrats d'agriculture durable et sous quelles conditions.
Réponse en séance, et publiée le 7 mai 2003
APPLICATION AUX ZONES DE MARAIS
DES CONTRATS D'AGRICULTURE DURABLE
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Léonard, pour exposer sa question, n° 316, relative à l'application aux zones de marais des contrats d'agriculture durable.
M. Jean-Louis Léonard. Monsieur le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, le 6 août dernier, vous mettiez fin aux CTE, les centrals territoriaux d'exploitation, et vous les remplaciez par un nouveau système de soutien à l'agriculture : les contrats d'agriculture durable. Parallèlement, je vous avais parlé des problèmes que nous connaissons dans l'ouest de la France, mais également dans la Manche, dans les zones humides, qui ont leur propre agriculture. Vous m'aviez répondu très gentiment et, avec beaucoup d'efficacité, vous avez engagé une grande réforme de la loi sur l'espace rural, dans laquelle vous intégrerez les zones humides.
Néanmoins, un certain nombre d'incertitudes subsistent, sur lesquelles j'aurais aimé avoir quelques précisions ce matin.
En Vendée, vous vous êtes récemment engagé à soutenir cette agriculture des zones humides, principalement l'élevage, par le recours à une indemnité, qui serait cofinancée par l'Europe et la France, en remplacement des anciennes OLAE, les opérations locales agro-environnementales. Au-delà de cette déclaration, d'autres points doivent être réglés pour sauver l'agriculture et l'élevage de marais, tels que la poursuite des aides, l'exonération du foncier, qui fait l'objet d'une demande importante et qui a déjà été adopté par un certain nombre de pays, l'utilisation de ressources comme le produit de la taxe sur les espaces naturels sensibles, qui pourrait permettre non seulement à nos agriculteurs, mais également à l'ensemble des acteurs des zones humides, d'entretenir à la fois les réseaux et les accès aux marais. Je n'oublierai pas cette indemnité socle que nous appelons de nos voeux, l'ICHN, l'indemnité compensatoire du handicap naturel, qui viendrait parachever le dispositif permettant le maintien de l'agriculture de marais.
L'agriculture de marais ne demande pas à être aidée mais simplement à être indemnisée pour son handicap, d'autant plus que le montant total des indemnités qui pourraient lui être allouées ne dépasserait pas, tant s'en faut, la pénalité qui pourrait nous être infligée par l'Union européenne au cas où nous ne respecterions pas nos engagements en matière de respect des zones humides, notamment en référence à Natura 2000.
Les CTE avaient exclu de leurs zones d'influence l'ensemble des marais communaux, qui représentent en Vendée, en Charente-Maritime et dans les Deux-Sèvres plus de 15 000 hectares. Ils sont à la fois des propriétés communales et le lieu où sont mis en pacage des troupeaux qui assurent aux communes une ressource qui n'est pas négligeable, les marais communaux représentant près de 20 % du budget de certaines petites communes.
L'exclusion de ces zones des CTE et de l'ensemble des mesures agro-environnementales par le précédent gouvernement a provoqué un véritable malaise.
Ma question sera très claire : monsieur le ministre, qu'il s'agisse de la réforme de la loi sur l'espace rural, des décrets qui l'accompagnent ou des décisions que vous avez déjà prises, avez-vous prévu, et si oui, sous quelle forme, l'éligibilité des marais communaux aux mesures agro-environnementales ?
Pouvons-nous réellement envisager d'intégrer dans la loi que nous préparons des mesures comme l'exonération du foncier, le recours à la TDENS, la taxe départementale des espaces naturels sensibles, ou de la taxe des espaces naturels sensibles en général, et d'autres mesures socles comme l'ICHN, ou faudra-t-il attendre d'autres dispositifs pour les voir aparaître ? Telle est la question que nous nous posons, monsieur le ministre. Il est urgent d'y répondre car l'été approche et les troupeaux sont prêts à partir dans les marais.
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.
M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Monsieur le député, comme vous le savez, les acteurs concernés par les zones humides de l'Ouest, notamment dans votre département, ont été des précurseurs dans la mise en oeuvre des mesures agro-environnementales en France dès le début des années 90. Ces mesures ont alors pris la forme d'opérations locales agro-environnementales, les OLAE, spécifiques à des territoires bien délimités, avec l'objectif de maintenir les milieux humides constitués par les marais, qui recèlent une forte diversité biologique. Le maintien, voire le renforcement des mesures agro-environnementales dans les marais côtiers de l'Ouest constitue une priorité environnementale, notamment dans le marais poitevin, qui fait l'objet d'un plan d'action gouvernemental.
Le maintien d'un financement pour les agriculteurs qui sauvegardent les marais est également primordial pour assurer la viabilité de nombreuses exploitations agricoles. Sinon les exploitants pourraient être amenés à retourner leurs prairies afin de bénéficier d'un meilleur revenu grâce aux cultures.
La nécessité de définir un dispositif pour pérenniser les mesures agro-environnementales dans les marais côtiers de l'Atlantique a d'autant plus d'acuité que de nombreuses OLAE arrivent à échéance ou sont arrivées à échéance à la fin de l'année dernière. Comme je l'ai annoncé le 10 avril dernier, j'ai décidé la mise en place d'un dispositif spécifique aux zones des marais côtiers de l'Atlantique en attendant la mise en oeuvre opérationnelle des contrats d'agriculture durable.
Pour les marais de Charente-Maritime, des Deux-Sèvres, de Vendée et de Loire-Atlantique, tous les bénéficiaires d'OLAE arrivées à échéance fin 2002 ou avant la fin de l'été 2003 qui n'ont pas reconduit leurs mesures dans un contrat territorial d'exploitation, se verront proposer un renouvellement de leur engagement. Le dispositif auquel ils seront éligibles, très simple, est fondé sur la contractualisation, pour une période de cinq ans, de la mesure agro-environnementale de base, dite 18.06, des synthèses régionales Poitou-Charentes et Pays de la Loire. Le montant de cette mesure sera identique à celui auquel pouvaient prétendre les bénéficiaires de CTE et le premier paiement interviendra à partir du deuxième mois suivant la signature de l'engagement agro-environnemental. La procédure administrative devant être opérationnelle au cours du mois de mai, ce premier paiement pourra intervenir bien avant la fin de l'année 2003, et je confirme qu'une enveloppe spécifique hors CAD de 4,4 millions d'euros, reconductible, est affectée à ce dispositif.
Pour les agriculteurs qui le souhaitent, les engagements, à partir de la deuxième année, pourront être intégrés dans un contrat d'agriculture durable contenant des mesures de gestion plus fines, avec une rémunération plus élevée et des mesures concernant plus globalement le système marais, comme l'entretien des fossés.
Différentes mesures spécifiques à la gestion des zones couvertes par une OLAE sont prévues dans la mise en oeuvre des contrats d'agriculture durable. De ce point de vue, les marais communaux, qui n'étaient pas éligibles au CTE, comme vous l'avez rappelé, monsieur le député, pourront faire l'objet d'un engagement agro-environnemental dans un contrat d'agriculture durable. Le calcul des enveloppes de droits à engager notifiées aux préfets de région pour financer les contrats d'agriculture durable tient compte de la superficie couverte par les OLAE venant à échéance dans chaque région.
Ces diverses actions coordonnées vont permettre à tous les agriculteurs qui le souhaitent et aux maires disposant de terrains communaux dans les marais de poursuivre les actions agro-environnementales entamées dans le cadre des OLAE. Est également mise en place, cette année, à titre expérimental et conformément aux préconisations du rapport Roussel, une indemnité compensatrice de handicap naturel spécifique pour le Marais poitevin, correspondant à un montant d'aides de 170 euros par hectare dans le marais mouillé et de 109 euros par hectare dans le marais desséché.
J'ajoute que les zones humides, en tant qu'espaces sensibles à enjeux spécifiques, feront l'objet de discussions et de dispositions particulières dans le cadre du projet de loi sur les affaires rurales dont le Premier ministre m'a confié la préparation. Je pense notamment, monsieur le député, à tout ce qui concerne l'exonération de taxe foncière ou les problèmatiques liées à la taxe sur les espaces sensibles, dont nous allons discuter dans les prochaines semaines.
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Léonard.
M. Jean-Louis Léonard. Monsieur le ministre, permettez-moi de vous exprimer ma grande satisfaction. Vous venez de faire la synthèse de toutes les demandes émises, qui correspondent à de réels problèmes. Avec les mesures que vous nous avez exposées et les décisions que vous avez prises, on peut considérer que vous sauvez une grande partie de l'élevage extensif en zone de marais. Vous pourrez naturellement compter sur notre soutien attentif pour poursuivre cette action et pour intégrer à votre projet de loi les deux dernières mesures que vous avez citées, auxquelles nous sommes très attachés. Au nom de tous les maraîchins, je tiens à vous remercier, monsieur le ministre.
Auteur : M. Jean-Louis Léonard
Type de question : Question orale
Rubrique : Agriculture
Ministère interrogé : agriculture, alimentation et pêche
Ministère répondant : agriculture, alimentation et pêche
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 mai 2003