Question orale n° 360 :
indemnité de résidence

12e Législature

Question de : M. Claude Birraux
Haute-Savoie (4e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Claude Birraux appelle l'attention de M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire sur les revendications d'organisations syndicales concernant l'obtention d'une prime mensuelle compensatrice de vie chère en Haute-Savoie. En effet, les agents de la fonction publique et des entreprises publiques de la Haute-Savoie soulignent la cherté de la vie en général et des loyers en particulier, phénomène aggravé par la proximité de la Suisse. Ils demandent en conséquence une prime de 150 euros par mois pour tous les contractuels et fonctionnaires de la Haute-Savoie, ou le classement du département en zone de salaire plus élevé.

Réponse en séance, et publiée le 28 mai 2003

OCTROI AUX FONCTIONNAIRES DE HAUTE-SAVOIE
D'UNE PRIME COMPENSATRICE DE VIE CHÈRE

M. le président. La parole est à M. Claude Birraux, pour exposer sa question, n° 360, relative à l'octroi aux fonctionnaires de Haute-Savoie d'une prime compensatrice de vie chère.
M. Claude Birraux. Monsieur le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire, l'intitulé de la question pourrait faire accroire que j'entonne à mon tour une ritournelle catégorielle sur le faible pouvoir d'achat de certains personnels de la fonction publique. Mais, si la Haute-Savoie est un département dynamique, les disparités de revenus y sont importantes en raison notamment de la différence de pouvoir d'achat générée par le phénomène frontalier, lequel sera aggravé par la mise en oeuvre des accords bilatéraux Suisse-Union européenne.
En effet, au 1er juin 2004, la libre circulation s'appliquera uniquement aux citoyens suisses, ce qui aura pour conséquence une augmentation des loyers, du prix du foncier et de la construction. Or, en dépit des efforts consentis par l'Etat, le conseil général, les communes et les bailleurs sociaux, pour favoriser la création et la construction de logements sociaux, les listes de demandeurs de ces logements sociaux ne font déjà que s'allonger et la question du logement des fonctionnaires se pose avec de plus en plus d'acuité.
Si vos services centraux veulent bien interroger leurs homologues départementaux, ils auront une vision différente de cette zone que l'on considère comme riche et que l'INSEE ou la DATAR qualifient même de « partie française de l'agglomération de Genève ».
Lors de sa visite de courtoisie, après sa prise de fonctions, le nouveau trésorier-payeur général m'a fait part de sa surprise de constater la très forte rotation des personnels des trésoreries. Le problème se pose pour les fonctionnaires d'Etat comme pour les fonctionnaires territoriaux.
Au cours d'une réunion de suivi des conséquences des accords bilatéraux Suisse-Union européenne, tenue en préfecture de région avec les représentants des administrations centrales et les élus, sous la présidence du préfet de région, ce problème a été évoqué. Lors de la première réunion de ce type, en février 2002, cette question avait été soulevée et il avait été demandé d'étudier la possibilité de classement en zone II, c'est-à-dire en zone de salaire la plus élevée.
Aucune réponse n'a été apportée par les administrations centrales, ce qui est, me semble-t-il, une forme de mépris à l'égard des élus et ce qui m'a incité à vous poser cette question orale. La seule indication qui nous a été donnée, c'est que le Fonds social des fonctionnaires a pu intervenir dans quelques cas - ce qui est bien - en substitution du CILSE, le comité interprofessionnel du logement social et de son environnement, pour permettre une réservation sociale au profit des fonctionnaires.
Je le répète, je ne me fais pas ici le porte-parole d'une revendication catégorielle, je décris le malaise profond ressenti par la population du fait de la situation frontalière de la Haute-Savoie. Nous commençons à voir des fonctionnaires refuser leur mutation ou signer leur feuille de mutation dès leur prise de fonctions. C'est le bon fonctionnement des services de l'Etat qui est en jeu, et la question se pose d'une manière à peu près analogue pour les collectivités territoriales.
Faute d'une réponse sur la zone de salaire, les organisations syndicales demandent, en compensation de vie chère, une « nouvelle bonification indiciaire » qu'ils ont fixée à 150 euros.
Ne croyez-vous pas, monsieur le ministre, qu'il est temps d'engager vraiment une réflexion pour une remise à plat objective des paramètres sur la réalité du coût de la vie en zone frontalière et de donner une réponse concrète aux demandes des fonctionnaires ?
M. le président. La parole est à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.
M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Monsieur le député, je ne prends pas votre question pour une demande catégorielle de plus car je connais, par votre intermédiaire et par vos collègues, la situation de la région frontalière de Haute-Savoie.
Comme dans d'autres régions, elle éprouve de grandes difficultés à attirer les fonctionnaires car le pouvoir d'achat net est inférieur à celui d'autres régions, notamment à cause de la cherté de vie. A tel point que, dans certaines régions du sud ou dans les vôtres, des fonctionnaires refusent leur mutation ou demandent une nouvelle affectation dès leur arrivée pour retrouver des conditions de vie plus normales.
Les textes prévoient que les fonctionnaires peuvent percevoir, en plus de leur traitement de base, une indemnité de résidence. Celle-ci, définie dans le statut général des fonctionnaires, est proportionnelle au traitement de base et ses modalités font appel à plusieurs taux, entre lesquels existe un écart de 3 %. Cet écart a été réduit car, dans les années soixante, il pouvait atteindre 20 %.
Des assouplissements sont possibles, mais la règle veut, vous la connaissez aussi bien que moi, que les agents affectés dans une commune faisant partie d'une unité urbaine au titre de l'INSEE bénéficient du taux applicable à la commune la plus favorisée de l'ensemble.
Pour l'instant, nous sommes dans l'incapacité de modifier les taux de l'indemnité de résidence par rapport à ces textes. Les difficultés sont multiples. En effet, après le dernier recensement général effectué en 1999, qui déterminait les unités urbaines multicommunales qui servent de référence à l'octroi de cette indemnité de résidence, nous devons procéder dorénavant à une révision annuelle du recensement, les recensements de caractère général disparaissant. De plus, la montée en charge de la coopération intercommunale crée des besoins de compétences territoriales et de fonctionnaires nouveaux.
Je suis donc tout à fait conscient du problème et je suis prêt à engager la discussion dans le cadre des travaux de mise à jour de la gestion de la fonction publique territoriale. Nous avons ouvert, avec le Centre national de la fonction publique territoriale et le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, toute une série de chantiers qui posent le problème de l'attractivité de la fonction publique, certes quant aux compétences nécessaires mais aussi quant à leur localisation et à la pertinence qu'il y a, dans le cadre d'une politique sociale de gestion des ressources humaines, à accompagner, par des compléments d'indemnités, des affectations dans les territoires où la vie est chère. Nous risquons sinon d'être confrontés au phénomène qui frappe la fonction publique hospitalière, où l'on déplore des évasions de personnels vers des hôpitaux situés de l'autre côté de la frontière.
Ce sujet est donc au coeur de nos préoccupations. Je serai très attentif aux contributions que vous pourriez apporter pour donner une réponse nécessaire au problème important que vous avez soulevé : offrir aux collectivités territoriales les moyens d'avoir les compétences dont elles ont besoin.
M. le président. La parole est à M. Claude Birraux.
M. Claude Birraux. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse et de votre ouverture d'esprit.
J'ai bien dit que le problème se posait tant pour les fonctionnaires territoriaux que pour les fonctionnaires d'Etat. Des professeurs exerçant au lycée d'Annemasse habitent à trente kilomètres de l'établissement à cause de la cherté des loyers et de la difficulté même qu'il y a à se loger. La situation est la même pour le personnel hospitalier : les hôpitaux de Genève forment cinquante infirmières, mais ils en engagent trois cents par an car, lorsque nos infirmières traversent la frontière, elles doublent leur salaire.
Si l'on ne peut jouer à la fois sur une offre de logement social pour nos infirmières et sur quelques bonifications en compensation de la vie chère, nous aurons de plus en plus de mal à garder ces personnels.
L'INSEE a un peu trop tendance à considérer les choses globalement, comme la DATAR : pour ces deux organismes, notre région forme la partie française de l'agglomération de Genève, et il est clair dès lors qu'ils ne vous proposeront jamais de modifier les indices de salaire ou de bonifications pour l'agglomération de Genève, puisque celle-ci se trouve hors du territoire national.
C'est la raison pour laquelle je suis fortement décentralisateur car c'est en l'étant que l'on tient compte des adaptations aux réalités du terrain.
Je vous remercie à nouveau de votre ouverture d'esprit. Si vous envoyiez sur les lieux un inspecteur général ou un autre fonctionnaire de votre ministère afin qu'il vous rende compte de la réalité telle qu'il l'aura constatée sur le terrain, vous feriez un premier pas significatif.

Données clés

Auteur : M. Claude Birraux

Type de question : Question orale

Rubrique : Fonctionnaires et agents publics

Ministère interrogé : fonction publique, réforme de l'Etat et aménagement du territoire

Ministère répondant : fonction publique, réforme de l'Etat et aménagement du territoire

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 mai 2003

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