décentralisation
Question de :
M. Jean-Louis Léonard
Charente-Maritime (2e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Jean-Louis Léonard attire l'attention de M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire sur le projet de réseaux d'écoles, et plus spécialement leur gestion par des établissements publics de coopération intercommunale. La mutualisation des moyens afin d'offrir les mêmes chances d'accès au savoir et à la formation au nom de l'égalité républicaine a présidé au développement de regroupements pédagogiques. Les communes ont compris la nécessité de ces regroupements, notamment dans les zones rurales. Néanmoins, un lien fondamental, presque viscéral, entre l'école et la commune existe depuis toujours. En effet, elles ont toujours joué un rôle essentiel dans leur fonctionnement et leur gestion. En conséquence, il lui demande de bien vouloir préciser les rôles et pouvoirs respectifs des communes et des EPCI dans le projet de loi de décentralisation afin de rassurer les élus.
Réponse en séance, et publiée le 3 décembre 2003
CRÉATION DES RÉSEAUX D'ÉCOLES
DANS LE CADRE D'UN EPCI
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Léonard, pour exposer sa question, n° 494.
M. Jean-Louis Léonard. Monsieur le ministre délégué à l'enseignement scolaire, ma question concerne votre projet supposé de réseaux d'écoles, et plus spécialement leur gestion par les établissements publics de coopération intercommunale.
La coopération entre les communes et l'idée de regrouper des équipements scolaires ne sont pas récentes. Elles n'ont pas besoin d'être imposées car la problématique est parfaitement comprise par les communes. En effet, l'utilité de la mutualisation des moyens afin d'offrir les mêmes chances d'accès au savoir et à la formation, au nom de l'égalité républicaine, n'est plus à démontrer et a présidé au développement des regroupements pédagogiques. On constate par exemple une progression importante et régulière du nombre de RPI, les regroupements pédagogiques intercommunaux, mis en place grâce à des conventions entre les communes. Celles-ci ont largement compris la nécessité de tels regroupements, notamment dans les zones rurales. Dans mon pays rochefortais ou dans le pays d'Aunis, situé dans ma circonscription, ils ont permis aux communes, entre autres, de conserver les écoles dans des conditions qu'elles avaient choisies et de jouer pleinement le rôle qui leur a été conféré par le suffrage universel.
Cependant, votre projet reviendrait à remettre en question le lien fondamental école-commune et le rôle des élus municipaux. Ce lien fondamental, presque viscéral, entre l'école et la commune existe depuis toujours. En effet, les communes ont toujours joué un rôle essentiel dans le fonctionnement et la gestion de leurs écoles. D'ailleurs, l'article L. 211-1 du code de l'éducation rappelle que « l'éducation est un service public de l'Etat » mais que la commune y joue un rôle essentiel pour la mise à disposition des locaux et des équipements, et c'est la grande fierté de nos institutions.
Aussi faut-il, même si l'on comprend bien la volonté de rationaliser les moyens, être particulièrement prudent vis-à-vis d'une approche plutôt comptable, efficace, certes, mais qui enlèverait à nos communes, c'est-à-dire aux élus municipaux, l'essentiel de leur vocation à s'investir dans la formation.
Vous comprendrez alors, monsieur le ministre, l'inquiétude ressentie par les maires de nos circonscriptions à dominante rurale lorsque vous évoquez le transfert à un EPCI de leurs compétences en matière de fonctionnement et de gestion des écoles, et plus encore lorsque les propos qui vous sont attribués - sans doute à tort - pourraient laisser penser que les incitations financières permettant la modernisation et le développement des infrastructures scolaires seraient désormais destinées aux EPCI, et non plus aux communes, comme c'est le cas jusqu'à présent.
Je sais que la concertation se poursuit mais, à ce stade de la réflexion, et afin de rassurer les élus - c'est-à-dire nous-mêmes - pourriez-vous préciser les rôles respectifs des communes et des EPCI en matière scolaire dans le projet de loi sur la décentralisation : quel est votre sentiment en la matière, quels seront vos objectifs et vos directives, et quel sera le réel pouvoir de décision des communes dans le cadre de ce projet de loi ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire.
M. Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire. Monsieur le député, vous avez raison de rappeler l'attachement viscéral des élus de la commune à leur école et le lien profond qui lie un maire à celle-ci. Ayant moi-même été élu d'un département rural, je comprends que chaque maire souhaite garder son école, car c'est un symbole de vie, d'avenir pour sa commune. Mais hélas ! les évolutions démographiques et la concentration des activités économiques ont bouleversé le paysage scolaire, en particulier en milieu rural, dans des départements comme le vôtre ou comme le mien. Nous le savons, aujourd'hui, près d'une commune sur trois n'a plus d'école, et près du tiers de nos écoles sont de très petites structures qui ne comptent qu'une ou deux classes. Pour tenter de freiner l'exode des élèves vers des centres plus importants, nous recommandons, mais nous n'imposons pas, de constituer des réseaux d'écoles adossées aux structures intercommunales. L'objectif est d'offrir aux élèves des zones rurales les mêmes conditions de travail, d'encadrement, les mêmes conditions pédagogiques que celles qu'ils pourraient rencontrer dans des écoles aux effectifs plus nombreux.
La mutualisation des moyens et la constitution d'équipes pédagogiques ne peuvent se faire qu'en rassemblant les écoles autour d'un projet éducatif qui réponde aux besoins d'un enseignement moderne, dynamique et efficace. J'ai donc demandé à chaque inspection d'académie de préparer, dans le cadre d'une très large concertation, un schéma territorial qui prenne en compte les données et les tendances démographiques, sociales ou économiques. Le conseil départemental de l'éducation nationale sera associé à sa rédaction et à sa mise en oeuvre. Ce schéma constituera une base de réflexion et de travail qui devrait améliorer sensiblement les conditions d'élaboration de la carte scolaire annuelle en permettant d'anticiper largement les évolutions prévisibles. La mise en réseaux, sans contrainte, des écoles, appuyée sur un schéma territorial pluriannuel, contribuera ainsi à un aménagement équilibré du territoire.
J'en viens à la question qui vous préoccupe, à savoir le développement de l'intercommunalité. C'est une chance pour les écoles et les communes qui pourront associer leurs forces et offrir aux parents une école performante. L'organisation que je propose ne modifie pas l'équilibre actuel, fixé par la loi, entre les compétences des communes et celles de l'Etat pour l'organisation et le fonctionnement de l'école primaire. La mise en réseau des écoles accompagne le mouvement volontaire vers l'intercommunalité et profite de sa dynamique. J'ajoute qu'il n'est nullement dans nos intentions de favoriser financièrement les intercommunalités par rapport aux communes.
Le projet de loi relatif aux responsabilités locales contient plusieurs dispositions de nature à faciliter le traitement des questions scolaires dans un cadre intercommunal et à favoriser la fréquentation effective des écoles situées dans le périmètre de l'intercommunalité par les enfants qui y résident. Mais ce sont les élus qui décideront finalement de s'engager ou pas dans cette voie. Bien entendu, chaque fois que cela sera possible, nous ferons tout pour qu'une école rurale soit maintenue dans le cadre communal strict.
Voilà, monsieur le député, je pense vous avoir rassuré : le projet du Gouvernement est non seulement d'encourager l'intercommunalité lorsqu'elle semble nécessaire, mais aussi, évidemment, d'apporter un soutien appuyé aux écoles communales rurales.
Auteur : M. Jean-Louis Léonard
Type de question : Question orale
Rubrique : État
Ministère interrogé : enseignement scolaire
Ministère répondant : enseignement scolaire
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 1er décembre 2003