coopératives
Question de :
M. Daniel Paul
Seine-Maritime (8e circonscription) - Député-e-s Communistes et Républicains
M. Daniel Paul interroge M. le secrétaire d'État aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation sur la situation des gérants non salariés des magasins des coopératives de consommateurs issue de la loi du 3 juillet 1944. Depuis plusieurs années, les aspects négatifs de cet « héritage » ont été mis en évidence et l'urgence commande de les corriger. 3 000 commerces sont concernés, souvent situés dans des zones fragiles. Alors que leur statut précise l'absence de lien de subordination vis-à-vis de la société avec laquelle ils ont contracté, la réalité les soumet totalement au contrôle de ce qui apparaît bien comme une hiérarchie : horaires, prix de vente, conditionnement des produits leur sont imposés. La rémunération à la commission - la seule possible puisqu'ils ne sont pas salariés ! - leur donne aujourd'hui au plus 1 800 euros pour un couple, avec des horaires d'ouverture atteignant 60 heures par semaine, auxquels il faut ajouter tout le travail en amont et en aval. Encore faut-il rappeler que les bulletins de commission (équivalents des bulletins de salaire) ne font état que de 169 heures 65 et que les heures supplémentaires ne sont pas rémunérées ! Et que dire des niveaux de retraites, inférieures bien souvent au minimum des ressources. L'ambiguïté permet aux sociétés de profiter totalement du système ! Les inspections du travail, comme les jugements des conseils de prud'hommes, comme la chambre sociale de la Cour de cassation, font régulièrement droit aux demandes des gérants. Il est temps d'entendre leurs revendications. Ils souhaitent que leurs responsabilités soient reconnues et prises en compte, que leurs rémunérations correspondent à leur charge de travail, que les jours fériés travaillés soient payés, que leur statut de gérant mandataire soit respecté. Ils souhaitent la mise en place d'une politique commerciale de proximité visant à mieux satisfaire la clientèle. La situation actuelle n'a que trop duré. Au moment où il est question de valoriser le travail, de répondre aux besoins de proximité, il lui demande s'il n'est pas temps d'entendre les demandes de ces gérants.
Réponse en séance, et publiée le 21 janvier 2004
STATUT DES GÉRANTS NON-SALARIÉS
DES COOPÉRATIVES DE CONSOMMATION
M. le président. La parole est à M. Daniel Paul, pour exposer sa question, n° 558, relative au statut des gérants non salariés des coopératives de consommation.
M. Daniel Paul. Madame la ministre déléguée à l'industrie, la situation des gérants non salariés des magasins de coopératives de consommateurs est définie par la loi du 3 juillet 1944. Depuis plusieurs années, les aspects négatifs de cet « héritage » ont été mis en évidence, et l'urgence commande de les corriger. Trois mille commerces sont concernés, souvent situés dans des zones fragiles.
Alors que le statut de ces gérants précise l'absence de lien de subordination vis-à-vis de la société avec laquelle ils ont contracté, la réalité les soumet totalement au contrôle de ce qui apparaît bien comme une hiérarchie : horaires, prix de vente, conditionnement des produits leur sont imposés.
La rémunération à la commission - seule possible, puisqu'ils ne sont pas salariés - leur donne aujourd'hui, au plus, 1 800 euros pour un couple, avec des horaires d'ouverture atteignant 60 heures par semaine, auxquels s'ajoute tout le travail en amont et en aval.
Encore faut-il rappeler que les bulletins de commission - l'équivalent des bulletins de salaire - ne font état que de 169,65 heures et que les heures supplémentaires ne sont pas rémunérées. Et que dire des niveaux de retraites, inférieurs bien souvent au minimum de ressources ? L'ambiguïté permet aux sociétés de profiter totalement du système.
Les inspections du travail, comme les jugements des conseils de prud'hommes et la chambre sociale de la Cour de cassation font régulièrement droit aux demandes des gérants. Il est temps d'entendre leurs revendications.
Ils souhaitent que leurs responsabilités soient reconnues et prises en compte, que leurs rémunérations correspondent à leur charge de travail, que les jours fériés travaillés soient payés et que leur statut de gérants mandataires soit respecté. Ils souhaitent également la mise en place d'une politique commerciale de proximité visant à mieux satisfaire la clientèle.
La situation actuelle n'a que trop duré. Au moment où il est question de valoriser le travail, de répondre aux besoins de proximité, n'est-il pas temps d'entendre les demandes de ces gérants ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à l'industrie.
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie. Monsieur le député Daniel Paul, la préoccupation que vous venez d'exprimer à l'égard des gérants non salariés des magasins des coopératives de consommateurs est, sur le principe, partagée par le Gouvernement.
Votre question pose deux problèmes juridiques distincts.
Le premier tient à la nature du contrat des gérants non salariés. Si ce type de contrat est présumé être de nature non salariale, cette présomption reste simple, et les conditions concrètes d'exercice du contrat restent sous le contrôle du juge. Celui-ci, comme vous le rappelez, peut, en cas de contentieux, décider de la requalification en contrat de travail dans les cas d'abus flagrants où les conditions d'indépendance dans la réalisation du contrat ne sont pas respectées par la société donneuse d'ordres.
Le second problème tient au niveau de rémunération de ces gérants non salariés, dont la situation est comparable à celle de certains gérants salariés ou de représentants de commerce exclusivement ou essentiellement rémunérés à la commission. Comme c'est le cas pour de nombreux petits commerçants, implantés notamment en zone rurale ou en zone urbaine sensible, il peut arriver que leur rémunération, comparée à leur charge de travail, soit inférieure à l'équivalent du SMIC pour un salarié. Je rappelle, toutefois, que bon nombre de ces gérants touchent, heureusement, un montant de commissions plus élevé que les 1 800 euros que vous mentionnez.
Le Gouvernement est très soucieux d'améliorer à la fois la protection statutaire des indépendants et leur situation économique et financière. La loi pour l'initiative économique du 1er août 2003 comporte déjà, vous le savez, des dispositions en ce sens, telles que la protection du domicile personnel ou un dispositif de report de charges sociales personnelles.
Un deuxième projet de loi, relatif au statut de l'entrepreneur et à la modernisation des entreprises, est actuellement en préparation. Il comportera plusieurs mesures importantes pour sécuriser l'exercice d'une profession indépendante. Je puis vous assurer que le Gouvernement s'attache ainsi à une question sociale et économique importante, qui, malgré de fréquentes interpellations de la part des professionnels concernés, n'avait pas suscité jusqu'alors la réponse qu'elle méritait en termes de politique publique.
Je vous remercie d'ores et déjà pour l'attention et le soutien de principe que vous ne manquerez pas d'apporter à nos projets en la matière.
Enfin, pour ce qui est d'une couverture plus équilibrée du territoire par les différents types d'équipements commerciaux, le Gouvernement entend poursuivre et intensifier la politique de revitalisation commerciale des centres urbains, des zones rurales et des zones urbaines sensibles.
M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.
M. Daniel Paul. Merci, madame la ministre, de confirmer la réponse que nous avons déjà reçue du cabinet de M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises. Nous attendons ce deuxième projet de loi.
A l'heure actuelle, un grand nombre de ces petits commerces de proximité sont menacés. Ayant été implantés dans ces zones urbaines sensibles à une époque où le pouvoir d'achat - c'est, évidemment, relatif - y était un peu plus élevé qu'aujourd'hui, ils subissent les contrecoups de la dégradation de la situation dans ces quartiers.
Cela est d'autant plus vrai que les chaînes ou les coopératives de consommateurs auxquelles ils appartiennent ne se privent pas d'implanter dans les mêmes quartiers d'autres magasins qui avivent la concurrence. De la sorte, elles assurent à la chaîne l'intégralité de la clientèle, mais elles mettent les uns et les autres en très grande difficulté.
Ne croyez pas que je serai très perméable au projet de loi que vous nous promettez. Mais sachez que je suis soucieux de l'avenir de ces commerces de proximité, qui sont souvent les seuls qui subsistent dans certains quartiers.
Auteur : M. Daniel Paul
Type de question : Question orale
Rubrique : Économie sociale
Ministère interrogé : PME, commerce, artisanat, professions libérales et consommation
Ministère répondant : PME, commerce, artisanat, professions libérales et consommation
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 20 janvier 2004