bassin de Lacq
Question de :
M. David Habib
Pyrénées-Atlantiques (3e circonscription) - Socialiste
M. David Habib souhaite attirer l'attention de Mme la ministre déléguée à l'industrie sur la situation du bassin de Lacq. Le bassin de Lacq rencontre de nombreuses difficultés qui tiennent à l'absence de stratégie industrielle, de politique régionale, de reconnaissance du groupe Total, et au-delà de reconnaissance de l'État. L'implication financière de l'État dans le GIP Chemparc n'est pas décidée. Le chargé de mission à la réindustrialisation n'est pas remplacé. Nous avons engagé la mutation de notre industrie chimique et inscrit dans la loi la technique d'injection dite Crétacé 4000 qui, selon les patrons, était la condition d'investissements nourris sur ce bassin, et pourtant aucun investissement significatif n'a été décidé par le groupe Total depuis cette loi. Il lui demande quels moyens financiers et politiques l'État est disposé à consacrer à notre bassin industriel, comment elle entend agir pour que Total assume ses devoirs à l'égard du Béarn et pour que l'État replace le bassin de Lacq comme pôle prioritaire de son action en matière d'aménagement du territoire.
Réponse en séance, et publiée le 25 février 2004
SITUATION ÉCONOMIQUE DU BASSIN DE LACQ
Mme la présidente. La parole est à M. David Habib, pour exposer sa question n° 631, relative à la situation économique du bassin de Lacq.
M. David Habib. Madame la ministre déléguée à l'industrie, je souhaite appeler de nouveau votre attention sur la situation du bassin de Lacq.
De nouveau, disais-je, car vous avez eu l'amabilité de recevoir la semaine dernière une délégation composée d'élus du bassin de Lacq, que j'avais l'honneur de conduire. De nouveau aussi parce que je vous ai contactée jeudi dernier, après les annonces faites au comité central d'entreprise par M. Thierry Desmarest, président du groupe Total - j'y reviendrai dans un instant.
Permettez-moi tout d'abord de vous rappeler les enjeux : le bassin de Lacq, c'est 5 000 emplois, une production de gaz qui se poursuit, et ce pour encore une dizaine d'années, rapportant chaque année à son propriétaire 100 millions d'euros de bénéfice net après impôts ; c'est une région qui a su anticiper l'épuisement physique du gisement en basculant de la chimie de l'extraction à une chimie de la molécule indépendante de la matière première et capable de maintenir une culture industrielle appréciée et reconnue par tous.
Le bassin de Lacq, c'est aussi un urbanisme maîtrisé, un environnement préservé, des dispositifs de sécurité multipliés et testés. C'est également Crétacé 4000, technique sûre et contrôlée d'injection qui nous donne un atout compétitif par rapport à d'autres régions, grâce au précédent gouvernement qui l'avait officiellement admis à la faveur du CIADT du 18 mai 2000, mais aussi grâce à vous-même et à votre collègue Roselyne Bachelot qui en aviez accepté l'inscription dans la loi.
Le bassin de Lacq, c'est tout cela. De notre courte histoire industrielle, nous sommes fiers. Mais nous avons admis que nous devions engager la mutation de notre bassin industriel en nous accrochant notamment à la chimie fine, déjà largement développée sur notre territoire.
Aussi, lorsque nous mesurons tout ce que nous avons donné au groupe Elf, désormais Total, et à l'Etat, en termes de matière première et de recettes fiscales - considérables - et lorsque nous apprécions nos atouts présents, il y a de quoi nous sentir amers.
Depuis deux ans, l'Etat s'est totalement désinvesti du bassin de Lacq. Il a fallu notre rencontre du 17 février pour relancer un processus de partenariat. Nous vous avons demandé de pourvoir au remplacement du sous-préfet coordonnateur de l'action de l'Etat. Parti en retraite il y a deux ans, il n'a jamais été remplacé. Nous vous avons surtout demandé d'engager avec le territoire l'élaboration et la signature d'une convention spécifique qui fixe nos objectifs en matière d'attractivité de la zone, d'amélioration de notre compétitivité, de réalisation de grands équipements, comme la création d'un pipe entre le port de Bayonne et le complexe de Lacq. Pouvez-vous nous confirmer vos intentions en la matière ?
Pouvez-vous également nous indiquer quelles initiatives vous entendez prendre pour mobiliser le groupe Total et lui rappeler ses obligations régionales à l'égard du Béarn et du bassin de Lacq ?
Total méprise notre complexe industriel. Il n'a aucune perspective, aucun projet et se borne à supprimer des activités comme la filière éthylène - 170 emplois directs, 600 emplois indirects - sans proposer la moindre alternative industrielle.
La décision prise le 19 février dernier par Total de réorganiser sa branche chimie va distendre davantage encore les liens entre ce groupe et le Béarn.
Madame la ministre, comment entendez-vous agir pour que Total assume ses devoirs à notre égard ? Comment comptez-vous intervenir pour que le groupe pétrochimique Total investisse et crée de l'activité sur ce territoire qui a donné naissance et richesse à Elf, devenu une de ses composantes ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée à l'industrie.
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie. Monsieur Habib, ainsi que j'ai eu l'occasion de vous le dire ainsi qu'à tous les élus concernés, lors de notre réunion de la semaine dernière, je suis très attachée à l'avenir du bassin de Lacq. C'est une nécessité économique, sociale et humaine et nos devons mener ensemble une démarche résolue d'anticipation et de mutation.
L'exploitation du gaz naturel, vous l'avez bien dit, est désormais entrée dans une phase de déclin régulier pour s'achever en 2012 ; il convient donc de développer des activités de substitution. C'est aussi un devoir moral car la nation ne saurait oublier sa dette à l'égard d'un bassin qui a tant contribué au rayonnement de la France.
Heureusement, Lacq ne manque pas d'atouts et possède en particulier un savoir-faire reconnu dans le domaine de la chimie. Le Gouvernement entend donc, aux côtés des élus, soutenir le développement de ces activités. C'est le sens de notre engagement et de notre soutien - y compris financier - au projet Chemparc. J'attends personnellement beaucoup de l'action de ce GIP pour élaborer et mobiliser les énergies autour d'un projet de développement industriel du bassin, auquel l'Etat apportera bien sûr son concours.
Cette initiative ne saurait toutefois réussir, vous-même l'avez rappelé, sans un soutien résolu des entreprises, au premier rang desquels le groupe Total. Celui-ci reste en effet le premier responsable de l'indispensable action de réindustrialisation de la région. Je m'engage, monsieur le député, à rappeler à Total ses obligations : poursuivre ses investissements sur le site tout en renforçant l'action de sa filiale de reconversion SOFREA.
Par ailleurs, je puis vous assurer que, dans le cadre de l'aménagement du territoire, une personne chargée spécifiquement du développement sera missionnée dans les meilleurs délais et à un niveau, je l'espère, le plus proche possible du terrain. Plus largement, j'ai bien entendu votre souhait de voir un texte signé avec l'Etat, qui prendrait en considération, dans le cadre d'un réel partenariat, l'ensemble des aspects du devenir économique du bassin de Lacq. J'ai d'ores et déjà mis ce projet à l'étude.
Mme la présidente. La parole est à M. David Habib.
M. David Habib. Je me réjouis des propos que vous venez de tenir, madame la ministre.
Quand, il y a quelques mois, Nicolas Sarkozy est venu en visite en Béarn, il nous a, pendant deux heures, exclusivement parlé du Pays basque !
Je vous remercie, madame la ministre, d'avoir considéré que notre département avait non seulement une façade occidentale, mais aussi une façade orientale et d'avoir pris la mesure de notre inquiétude et de notre impatience en matière de développement économique. Je suis persuadé que les annonces que vous avez faites ainsi que l'appel à la responsabilité collective et citoyenne que vous avez lancé dans cet hémicycle en direction du groupe Total auront des effets localement et permettront de mobiliser l'ensemble des acteurs en faveur de la réindustrialisation du site.
Auteur : M. David Habib
Type de question : Question orale
Rubrique : Énergie et carburants
Ministère interrogé : industrie
Ministère répondant : industrie
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 24 février 2004