Question orale n° 759 :
Nestlé Waters France

12e Législature

Question de : Mme Sylvie Andrieux
Bouches-du-Rhône (7e circonscription) - Socialiste

Mme Sylvie Andrieux-Bacquet souhaite appeler l'attention de M. le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale sur la fermeture de l'usine Nestlé à Marseille. Cette fermeture, qui interviendra dans un délai de six mois à un an, plonge en effet les 427 salariés et leurs familles dans la plus vive inquiétude, et ce d'autant qu'elle a été préparée dans la plus grande opacité. La fermeture du site de Saint-Menet, qui fait suite aux nombreux plans de licenciements qui ont touché la région (Lustucru, GEM Plus, Avenir Télécom...), est vécue comme un véritable traumatisme social supplémentaire. La décision prise par Nestlé est d'autant plus injuste et révoltante que, dans le même temps, le groupe Nestlé affiche pour le premier trimestre 2004 une hausse de plus de 5 % de ses ventes et de plus de 3 % de son chiffre d'affaires. Elle souhaite donc savoir ce que le Gouvernement compte entreprendre pour que les droits des salariés victimes de cette fermeture de site soient respectés et que leur reclassement soit effectué dans les meilleurs délais et conditions.

Réponse en séance, et publiée le 26 mai 2004

FERMETURE DE L'USINE NESTLÉ À MARSEILLE

M. le président. La parole est à M. Serge Janquin, pour exposer la question n°759 de Mme Sylvie Andrieux-Bacquet, relative à la fermeture de l'usine Nestlé à Marseille.
M. Serge Janquin. C'est en effet au nom de ma collègue Sylvie Andrieux-Bacquet, députée des Bouches-du-Rhône, empêchée, que je vous interroge, monsieur le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Le Nord-Pas-de-Calais ayant connu tant de fermetures de sites industriels ces derniers temps, ses parlementaires comprennent l'émotion et l'angoisse qui étreignent la population et les salariés quand les mêmes problèmes surgissent ailleurs en France, en l'occurrence à Marseille.
Même si l'annonce officielle ne devrait intervenir que demain 26 mai, le groupe Nestlé a récemment annoncé la fermeture de son site de Saint-Menet dans un délai de six mois à un an.
Cette annonce plonge 427 personnes, sans compter leurs familles, dans la détresse et l'inquiétude, d'autant que la préparation de cette fermeture a été faite dans l'opacité la plus totale vis-à-vis des salariés, qui la vivent comme un véritable coup de massue, mais aussi vis-à-vis des pouvoirs publics, qui n'en ont pas été informés.
À Marseille, comme dans toute la région, qui a vu ces derniers mois se multiplier les plans sociaux - Avenir Télécom, Lustucru, GEM Plus, les laboratoires Veyron et Froment, et tant d'autres encore -, cette décision est vécue comme un traumatisme social de plus.
La direction de l'usine a pris pour motif la diminution des commandes, mais, dans le même temps, on peut lire dans la presse que le groupe Nestlé a connu au cours du premier trimestre 2004 une augmentation de plus de 5 % de ses ventes et de plus de 3 % de son chiffre d'affaires.
Les dégraissages successifs connus par le site de Saint-Menet avaient pour but d'améliorer la productivité de l'usine, poussant les employés à toujours plus de sacrifices. Aujourd'hui, ce ne sont même plus des raisons concurrentielles qui poussent aux licenciements, mais la recherche pure et simple de la maximisation des profits d'une multinationale !
Monsieur le secrétaire d'État, il n'est plus tolérable de laisser des vies et des familles se briser sur l'autel du libéralisme ! Quelles perspectives s'ouvrent aux salariés ? Le maire de Marseille suggérait le reclassement de certains d'entre eux dans le centre fermé pour mineurs proche de l'usine. Imagine-t-on sérieusement un instant qu'un employé qui a travaillé tant d'années chez Nestlé aura la force morale, la ressource nécessaire pour devenir éducateur d'enfants en difficulté ?
La seule bouffée d'air a été apportée par le groupe Legal, qui a évoqué son intention de reprendre les activités du site, voire de maintenir l'ensemble des emplois. Mais face aux réserves du groupe Nestlé devant une telle éventualité, la prudence et la vigilance restent de mise.
Monsieur le secrétaire d'État, que va faire le Gouvernement pour que les 427 salariés concernés par cette fermeture retrouvent dans les plus brefs délais un emploi ? Quelles garanties pouvez-vous leur apporter que l'offre faite par Legal sera pleinement encouragée par les pouvoirs publics et qu'aucun d'entre eux ne restera à l'écart ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes.
M. Laurent Hénart, secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Monsieur le député, c'est une question importante que celle que vous posez, le projet de restructuration de Nestlé France entraînant la fermeture de l'usine Nestlé de Saint-Menet. Comme Mme Sylvie Andrieux-Bacquet, je regrette évidemment que Nestlé n'ait pas pu reconvertir cette usine vers de nouvelles fabrications, garantissant l'avenir industriel du site. Comme elle, je déplore la disparition de 427 emplois dans le département des Bouches-du-Rhône.
Dès l'annonce de ce projet de fermeture, mon collègue Gérard Larcher, ministre délégué aux relations du travail, a demandé au président de Nestlé France de venir exposer devant lui les éléments économiques à l'origine de cette décision, et surtout ce que la société entendait faire. Car la première position du Gouvernement, c'est que Nestlé ne peut pas partir comme cela. La discussion avec le président de Nestlé France a établi que du point de vue de la société, il n'y avait pas d'alternative économique à cette fermeture. Vous l'avez dit, ce site industriel de Saint-Menet produit du café et du chocolat essentiellement pour l'exportation, et non pas pour le marché intérieur, et souvent à destination de pays situés en dehors de l'Union européenne. Il n'aura bientôt plus de charge de travail du fait de l'évolution des marchés mondiaux et de la réorganisation interne du groupe.
Néanmoins, il n'était pas question pour le Gouvernement que la société puisse partir ainsi. Le président de Nestlé France a pris une série d'engagements clairs, dont le Gouvernement est dorénavant comptable, et qu'il veillera à faire exécuter par la société.
Premièrement, Nestlé s'est engagé à proposer aux salariés concernés une offre de mutation au sein d'un groupe qui compte encore de nombreuses unités en France.
Deuxièmement, Nestlé s'est engagé à prendre en charge l'offre de reclassement. Vous connaissez la capacité qu'a l'État d'accompagner ce type de processus. Il sera donc vigilant. La société s'est engagée à proposer ces offres de reclassement dans le bassin d'emploi de Marseille pour les salariés qui ne souhaiteraient pas déménager et qui voudraient rester dans la ville ou dans son agglomération.
Enfin, le président de Nestlé France a clairement dit que la société accompagnerait la reconversion du site de Saint-Menet vers de nouvelles activités industrielles ou de services qui seraient porteuses d'emplois.
C'est dans cet esprit que nous entendons la solution que vous évoquez d'un repreneur éventuel des installations industrielles. En même temps, la société s'engageant, elle, en première ligne, à assurer la reconversion industrielle du site, vous comprendrez que nous ne voulons pas lui imposer une reprise foncière qui pourrait être pour elle une solution de dégagement.
Quoi qu'il en soit, voilà les trois engagements pris par la direction de Nestlé France. Gérard Larcher entend bien sûr veiller, dans les semaines qui viennent, à ce que ces engagements soient scrupuleusement respectés, notamment pour chacun des 427 membres du personnel concernés.
M. le président. La parole est à M. Serge Janquin.
M. Serge Janquin. Monsieur le secrétaire d'État, votre réponse pleine est de compassion et se veut rassurante. C'est bien le moins que l'on puisse faire dans ce genre de circonstances. Toutefois, je n'y vois pas vraiment de garanties, et des engagements bien faibles de la part du groupe Nestlé. Permettez-moi de vous dire que lorsque le Gouvernement a renoncé aux possibilités que lui offrait la loi de modernisation sociale, il a évidemment rendu les armes devant des délocalisations à motif financier.

Données clés

Auteur : Mme Sylvie Andrieux

Type de question : Question orale

Rubrique : Agroalimentaire

Ministère interrogé : emploi

Ministère répondant : emploi

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 mai 2004

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