calamités agricoles
Question de :
M. Jean-Paul Bacquet
Puy-de-Dôme (4e circonscription) - Socialiste
M. Jean-Paul Bacquet souhaite appeler l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales sur les dispositifs en faveur des agriculteurs adoptés pas certaines régions suite à la sécheresse de 2003. Les conditions climatiques de l'été 2003 ont en effet amené certaines collectivités locales à mettre en place des dispositifs d'aides, notamment par l'adoption de systèmes d'aides à l'affouragement dans les limites fixées par l'Union européenne (45 euros par tonne et/ou 60 % d'aide publique par tonne). Ce dernier mécanisme a été adopté par la région Auvergne en septembre 2003 par une subvention de 24 euros par tonne de fourrage, la part de l'État s'élevant alors à 21 euros la tonne pour une aide publique maximum de 45 euros. Mais une mauvaise évaluation des besoins se traduit aujourd'hui pour le conseil régional par un total de 18 millions d'euros de subventions aux agriculteurs (contre 6 millions prévus initialement). À cela s'ajoute le fait que pour l'hypothèse d'un prix de la tonne rendue à 40 euros, la charge des 60 % d'aides publiques (soit 24 euros) se trouve intégralement financée par le conseil régional, ce qui va à l'encontre du devoir de solidarité de l'État. Il lui demande donc de bien vouloir veiller à une répartition équitable entre l'État et la région Auvergne du poids de cette solidarité nécessaire en introduisant, pour l'ensemble de cette opération, une répartition à parité de l'aide publique ou selon le ratio de 24/45 pour le conseil régional d'Auvergne et de 21/45 pour l'État, une compensation globale intervenant en fin d'opération.
Réponse en séance, et publiée le 23 juin 2004
INDEMNISATION DES AGRICULTEURS
APRÈS LA SÉCHERESSE DE 2003 EN AUVERGNE
M. Jean-Paul Bacquet. Je souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales sur les dispositifs en faveur des agriculteurs adoptés par certaines régions après la sécheresse de 2003.
Les conditions climatiques de l'été 2003 ont en effet amené certaines collectivités locales à mettre en place des dispositifs d'aide en faveur des agriculteurs. Certaines l'ont fait à juste raison en complément des aides de l'État - ce que l'État avait appelé une " solidarité partagée ". D'autres - par effet d'annonce plus que par la recherche de résultats - ont mis en place, avant même de les soumettre au vote de leur assemblée, des systèmes d'aide à l'affouragement dans les limites fixées par l'Union européenne, à savoir 45 euros par tonne et/ou 60 % d'aide publique par tonne maximum.
Ainsi, un dispositif d'aide à l'affouragement a été adopté par la région Auvergne en septembre 2003 par une subvention de 24 euros par tonne de fourrage rendue à la ferme, la part de l'État s'élevant à 21 euros la tonne pour une aide publique maximum de 45 euros.
Cependant, une mauvaise évaluation des besoins se traduit aujourd'hui pour le conseil régional d'Auvergne par un total de 19 millions d'euros de subventions aux agriculteurs, contre 6 millions d'euros prévus initialement. Bien sûr, personne ne remet en cause le bienfait des aides aux agriculteurs.
Un tel écart s'explique par différentes causes : une sous-estimation de la demande, l'inflation des coûts de transport, la disparité des prix selon les lieux de livraison et une part résiduelle de l'État très variable.
En effet, dans l'hypothèse d'un prix de la tonne rendue à 40 euros, la charge des 60 % d'aide publique, soit 24 euros, se trouve intégralement financée par le conseil régional. Il va de soi qu'il n'est pas question de remettre en cause la nécessaire solidarité en faveur des agriculteurs, mais la part résiduelle revenant à l'État étant de zéro, cela est totalement incompatible avec la volonté gouvernementale de solidarité partagée, avec le devoir de solidarité de l'État vis-à-vis des agriculteurs, lequel repose, dans ce cas précis, sur le seul contribuable de la région Auvergne.
C'est pourquoi, en tant que parlementaire, mais aussi en tant que conseiller régional d'Auvergne, je demande au ministre de bien vouloir veiller à une répartition équitable entre l'État et la région Auvergne - même si l'État n'est pas responsable de cette erreur de gestion de la région - pour que le poids de cette solidarité ne repose pas uniquement sur le contribuable auvergnat, en introduisant, pour l'ensemble de cette opération, une répartition à parité de l'aide publique, selon le ratio de 24/45 pour le conseil régional d'Auvergne et de 21/45 pour l'État, une compensation globale intervenant en fin d'opération.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales.
M. Nicolas Forissier, secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. Monsieur Bacquet, j'ai récemment évoqué ce sujet de l'évolution des besoins en matière d'aide au transport de fourrages avec le bureau de la chambre régionale d'agriculture à Clermont-Ferrand et le bureau de la chambre d'agriculture du Puy-de-Dôme. L'été 2003 a en effet connu une sécheresse exceptionnelle. Les élevages ont été particulièrement touchés, notamment dans les zones herbagères du Massif Central, par le manque de fourrage qui en a résulté. La région Auvergne, dont vous êtes l'élu, est évidemment concernée au premier chef.
Dès le mois de juillet, Hervé Gaymard a mis en place une cellule nationale de crise associant les services de l'État et les organisations professionnelles. Cette cellule a tenu vingt réunions depuis, ce qui prouve le suivi que nous avons souhaité donner à l'évolution de ce dossier.
Le Gouvernement a voulu, par une aide au transport de fourrages, aider les éleveurs pour leur permettre de conserver leur cheptel et, ainsi, préserver le potentiel de leurs exploitations.
Cinquante-trois départements ont bénéficié de ce dispositif qui a mobilisé 50 millions d'euros, somme importante.
En mai dernier, nous avons décidé d'affecter une enveloppe complémentaire de 8 millions d'euros. Le ministère de l'agriculture a porté une attention toute particulière aux difficultés rencontrées par la région Auvergne : un tiers de ce nouvel engagement de l'État, soit 2,6 millions d'euros sur 8 millions, y est consacré.
Monsieur le député, il ne faut pas que la part résiduelle de l'État soit de zéro, dites-vous - même si vous reconnaissez que l'évolution de l'estimation des besoins n'est pas imputable à l'État, mais s'explique par différentes causes. Certes, je comprends votre raisonnement mais, dans ce domaine, les estimations sont très difficiles à faire. Je n'ai pas envie de porter un quelconque jugement sur cette estimation et, à la limite, on peut comprendre qu'elle ait évolué. Vous ne pouvez pas présenter les choses en affirmant qu'il ne faut pas que la part résiduelle de l'État soit de zéro et que l'État ne remplit pas son devoir de solidarité.
En effet, au total, avec l'enveloppe initiale et l'enveloppe complémentaire, l'État va consacrer 13,8 millions d'euros aux départements auvergnats, soit près du quart de l'ensemble des 58 millions d'euros affectés, au niveau national, à l'aide au transport de fourrages.
Certes, cette aide est plutôt concentrée dans la région Auvergne et le Grand Centre - et vous savez que je connais bien cette région Mais notons tout de même que l'État a pleinement pris part à cette aide au regard de la réalité des chiffres. Vous en avez d'ailleurs vous-même convenu tout à l'heure. C'est dans cet esprit que je tenais à vous redire l'attachement que nous portons à ce dossier.
Une question subsidiaire concerne quelques besoins supplémentaires évoqués par la profession agricole lorsque je l'ai rencontrée. Je fais étudier cette question de façon très précise et, ayant bien noté vos propres demandes, je resterai attentif à son suivi jusqu'au bout.
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Bacquet.
M. Jean-Paul Bacquet. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de cette réponse. Malheureusement, elle ne peut me satisfaire.
19 millions d'euros - solidarité régionale, je le rappelle, vis-à-vis des agriculteurs - c'est deux fois le budget annuel de l'agriculture de la région Auvergne. C'est trop, non pas pour les agriculteurs, mais pour le budget régional, faute de solidarité partagée avec l'État, en raison d'une mauvaise gestion par la région Auvergne de la crise !
Je ne fais pas le procès de l'État, mais bien celui de la sous-évaluation et de la recherche d'un effet d'annonce dans une année électorale, alors qu'il aurait été plus intelligent d'étudier la situation de crise.
Vous avez multiplié les réunions, et vous avez eu raison. Nous les avons multipliées pour notre part localement. Cependant, l'État a-t-il joué son rôle de conseiller de la région pour l'alerter et lui dire : " Vous vous trompez, les estimations sont fausses. " ? Absolument pas ! J'ai assisté à ces réunions et j'ai posé des questions. Le préfet était présent. On se souvient pourtant des séances où, pour l'ESB, on faisait immédiatement référence à la MSA et au Crédit agricole pour retrouver les agriculteurs en difficulté.
Aujourd'hui, la réglementation européenne des 45 euros par tonne interdit à l'État d'intervenir, puisque la région Auvergne s'est mise dans l'obligation de tout payer !
Oui, je demande une dérogation pour que le contribuable auvergnat ne soit pas pénalisé par l'incompétence, l'irresponsabilité et la recherche d'un petit profit électoral par la région Auvergne.
Je sais que, dans certains départements voisins, l'État a pleinement pris ses responsabilités, comme la Corrèze. La région Limousin - que d'ailleurs l'ancien président de la région Auvergne voulait annexer -, elle, a heureusement fait une estimation différente et, surtout, elle a fait jouer le principe de solidarité partagée.
Aujourd'hui, monsieur le secrétaire d'État, nous avons tout à payer. L'État ne participe pas. Vous n'en avez pas la responsabilité initiale, j'en ai tout à fait conscience. J'espérais néanmoins obtenir une dérogation et quelque aide pour nous sortir de cette situation très délicate.
Auteur : M. Jean-Paul Bacquet
Type de question : Question orale
Rubrique : Agriculture
Ministère interrogé : agriculture, alimentation et pêche
Ministère répondant : agriculture, alimentation et pêche
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 22 juin 2004