aéroports
Question de :
M. Jacques Alain Bénisti
Val-de-Marne (4e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Jacques-Alain Bénisti interroge M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer sur les suites de l'effondrement d'une partie du toit du terminal 2 E de Roissy. Aéroport de Paris (ADP) a demandé à la Direction Générale de l'Aviation Civile (DGAC) l'autorisation de transférer une quinzaine de vols long-courriers de Roissy vers Orly. Cette annonce a soulevé de vives inquiétudes non seulement chez les élus des communes concernées par les nuisances aériennes dans le Val-de-Marne, mais également et surtout par les riverains de l'aéroport Orly. Accepter le transfert de ces 15 vols long-courriers sur Orly, c'est remettre en cause la limitation réglementaire instituée par l`arrêté ministériel du 6 octobre 1994 qui fixe la capacité d'accueil de l'aéroport d'Orly à 250 000 créneaux horaires annuels correspondant à environ 200 000 mouvements. Les chiffres fournis par ADP prouvent que cette limitation est déjà atteinte puisqu'en 2003, 206 767 mouvements totaux ont été enregistrés. Or cette limitation réglementaire a été instituée par les autorités pour répondre aux nuisances de l'aéroport d'Orly implanté dans une zone francilienne fortement urbanisée. En effet la situation d'Orly n'est pas comparable à celle de Roissy. Le décollage d'un gros porteur du fait de l'urbanisation dense autour de l'aéroport, dans l'axe des pistes, va nuire à 2 millions d'habitants, là ou le même avion à Roissy ne nuira qu'à 5 000 personnes. Les vols long-courriers sont effectués par les appareils gros porteurs particulièrement bruyants au décollage et à l'atterrissage (entre 85 et 95 décibels). A l'approche de la période estivale, ces nuisances sont d'autant plus insupportables pour les riverains, qu'ils ne peuvent insonoriser leurs jardins ou vivre constamment les fenêtres fermées ! Quant au caractère provisoire de ces transferts, invoqué par ADP, il ne permet pas non plus de calmer les esprits. Il lui demande de s'engager à ce que le plafonnement d'Orly ne soit pas remis en cause, à ce que l'arrêté de 1994 soit strictement appliqué et à agir en faveur d'un redéploiement d'une partie du trafic vers les aéroports de province, pour désengorger le trafic aérien francilien.
Réponse en séance, et publiée le 23 juin 2004
RESPECT DE LA CAPACITÉ D'ACCUEIL
DES LONG-COURRIERS À L'AÉROPORT D'ORLY
M. Jacques-Alain Bénisti. Monsieur le secrétaire d'État aux transports et à la mer, suite à l'effondrement d'une partie du toit du terminal 2E de Roissy, Aéroports de Paris a demandé à la direction générale de l'aviation civile l'autorisation de transférer une quinzaine de vols long-courriers de Roissy vers Orly.
Cette annonce a soulevé de vives inquiétudes, non seulement chez les élus des communes concernées par les nuisances aériennes dans le Val-de-Marne - dont plusieurs villes de ma circonscription -, mais aussi et surtout par l'ensemble des riverains autour de l'aéroport d'Orly. Une association regroupant des élus de trente-cinq communes du Val-de-Marne, dont je suis membre, a d'ailleurs été créée le 17 juin dernier, pour réitérer notre refus de voir le trafic de l'aéroport d'Orly augmenter, et pour le maintien du couvre-feu nocturne.
Accepter le transfert de ces quinze vols long-courriers sur Orly, c'est remettre en cause la limitation réglementaire instituée par l'arrêté ministériel du 6 octobre 1994, qui fixe la capacité d'accueil de l'aéroport d'Orly à 250 000 créneaux horaires annuels, correspondant à environ 200 000 mouvements au maximum. Or, les chiffres fournis par ADP prouvent que cette limitation est déjà atteinte, puisqu'en 2003, 206 767 mouvements totaux ont été enregistrés.
Je vous rappelle que cette limitation réglementaire a été instituée par les autorités pour répondre aux nuisances de l'aéroport d'Orly, implanté dans une zone francilienne fortement urbanisée. En effet, la situation d'Orly n'est pas comparable à celle de Roissy. Du fait de l'urbanisation dense autour de l'aéroport, le décollage d'un gros-porteur, dans l'axe des pistes, va nuire à près de deux millions d'habitants, là où le même avion à Roissy nuira seulement - si j'ose dire - à 5 000 personnes. Or vous n'êtes pas sans savoir que les vols long-courriers sont effectués par des appareils gros-porteurs, particulièrement bruyants au décollage et à l'atterrissage - on note entre 85 et 95 décibels. À l'approche de la période estivale, ces nuisances sont d'autant plus insupportables pour les riverains, qui ne peuvent insonoriser leurs jardins ou vivre constamment les fenêtres fermées. Quant au caractère provisoire de ces transferts, invoqué par ADP, il ne permet pas non plus de calmer les esprits.
Monsieur le secrétaire d'État, ma question est double.
Premièrement, pouvez-vous vous engager devant la représentation nationale à ce que le plafonnement d'Orly ne soit pas remis en cause et à ce que l'arrêté de 1994 soit strictement appliqué ?
Deuxièmement, lors du débat sur le troisième aéroport, le Gouvernement a tranché en faveur d'un redéploiement d'une partie du trafic vers les aéroports de province, pour désengorger le trafic aérien francilien. L'accident - évidemment regrettable - du terminal 2E ne serait-il pas l'occasion de mettre en place ce redéploiement ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État aux transports et à la mer.
M. François Goulard, secrétaire d'État aux transports et à la mer. Monsieur Bénisti, votre question m'amène à vous présenter les dispositions prises ou envisagées pour assurer l'indispensable traitement du trafic aérien sur les aéroports parisiens à la suite de la catastrophe survenue le 23 mai dernier, qui a entraîné une perte brutale de capacité de l'aéroport de Roissy. Cette situation est d'autant plus préoccupante que nous sommes au début de la période la plus chargée de l'année, en raison des traditionnelles pointes de trafic de l'été, aux mois de juillet et d'août.
Un certain nombre de décisions ont été prises dans l'urgence pour décharger l'aérogare Charles de Gaulle 2 : d'abord le maintien dans l'aérogare Charles de Gaulle 1 de compagnies long-courrier qu'il était prévu de transférer à l'aérogare Charles de Gaulle 2 dès le mois de juin, mais aussi la réaffectation de certains transporteurs entre terminaux et entre aérogares de Roissy, et la modification d'horaires, y compris de vols d'Air France, pour éviter les phénomènes de concentration des vols incompatibles avec les capacités disponibles, même si ces décisions ont des conséquences quelquefois dommageables pour la commodité des voyageurs.
Par ailleurs, nous examinons avec Aéroports de Paris les conditions dans lesquelles le terminal 2E pourrait être partiellement utilisé, puisqu'une partie de l'aérogare n'a pas subi de dommages lors de l'accident, ainsi que la mise en place de structures provisoires.
J'en viens à votre question spécifique concernant le transfert de vols sur l'aéroport d'Orly. Vous l'avez compris, la situation créée par l'effondrement du terminal est telle que toutes les voies doivent être explorées afin que le trafic puisse être écoulé dans les meilleures conditions possibles pour les passagers. Aucune décision n'est prise à ce stade, mais des transferts vers Orly sont effectivement à l'étude.
Je voudrais vous rassurer sur un certain nombre de points que vous avez évoqués. En tout état de cause, l'arrêté de plafonnement de l'activité d'Orly à 250 000 créneaux horaires attribuables - et non pas forcément attribués - par an sera strictement respecté, et les transferts ne peuvent être envisagés que dans les limites des créneaux horaires qui seront rendus à Orly. De plus, je répète que nous n'accepterons pas, dans ce contexte, le transfert de vols réalisés avec des appareils particulièrement bruyants, tels que les quadriréacteurs. Les nuisances occasionnées sont en effet très variables en fonction du type d'appareil. Les avions les plus anciens sont évidemment les plus bruyants, ainsi que les quadriréacteurs, qui prennent de l'altitude plus lentement que les biréacteurs et sont donc plus gênants pour les populations survolées. Par ailleurs, les appareils d'une grande compagnie américaine sont en moyenne beaucoup plus bruyants que ceux produits par Airbus.
Je peux vous assurer que la préoccupation des riverains d'Orly est totalement prise en compte. Cela étant, il faut bien que nous assurions le trafic sur l'ensemble des aéroports de notre région capitale.
Quant au redéploiement d'activité sur les aéroports de province ou vers ce que l'on appelle le troisième réseau d'aéroports d'Île-de-France, il s'agit d'une démarche qui ne saurait être que progressive, les capacités aéroportuaires ne pouvant évoluer qu'à moyen ou long terme. Cette démarche ne saurait donc apporter une solution au problème immédiat de l'aéroport de Charles de Gaulle. Néanmoins, la possibilité de détourner une partie du trafic vers le troisième réseau d'aéroports est l'une des solutions que nous privilégions actuellement. Ce troisième réseau est d'ailleurs en forte croissance - je pense notamment à Beauvais, qui a connu au cours des dernières années une remarquable progression du trafic.
Pour terminer, je voudrais rendre hommage aux entreprises et à leurs collaborateurs, qui s'efforcent depuis le 23 mai d'offrir le meilleur service aux passagers, dans un contexte particulièrement difficile suite à ce dramatique accident. Je les assure - en même temps que je rassure les riverains d'Orly - de notre volonté de minimiser les contraintes autant que faire se peut et le plus rapidement possible, mais chacun comprendra que la situation exceptionnelle que nous connaissons commande de prendre des dispositions elles-mêmes exceptionnelles.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques-Alain Bénisti.
M. Jacques-Alain Bénisti. Je conçois, monsieur le secrétaire d'État, que la situation exige des décisions urgentes et exceptionnelles. Cela étant, le terminal 2E qui vient d'être inauguré n'existait pas auparavant. J'aurais donc pu vous poser une troisième question : comment faisait ADP avant sa mise en service ? En fait, l'entreprise s'est toujours parfaitement arrangée, notamment l'année dernière, où le trafic était sensiblement le même qu'actuellement.
Vous avez pris l'engagement que les 200 000 mouvements ne seront pas dépassés à Orly et que les avions les plus bruyants en seront écartés : j'en prends acte et je m'en réjouis. J'espère que cette décision sera respectée par ADP et qu'il n'y aura effectivement pas de transfert de vols effectués par des gros-porteurs.
Auteur : M. Jacques Alain Bénisti
Type de question : Question orale
Rubrique : Déchets, pollution et nuisances
Ministère interrogé : équipement
Ministère répondant : équipement
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 22 juin 2004