Question orale n° 851 :
code des marchés publics

12e Législature

Question de : M. Frédéric Reiss
Bas-Rhin (8e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Frédéric Reiss interroge M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la réforme du code des marchés publics. La réforme peut être saluée en terme de souplesse, avec un plafond à 90 000 euros (HT). Si elle met en lumière la responsabilité des acheteurs publics, aujourd'hui encore il se pose un certain nombre de questions. Il l'interroge sur le contrôle effectué par les juges et par les chambres des comptes à l'égard des pratiques des collectivités et sur la nécessaire clarification des règles applicables pour rendre sérénité et efficacité aux élus locaux et aux fonctionnaires qui rédigent les marchés publics.

Réponse en séance, et publiée le 23 juin 2004

RÉFORME DU CODE DES MARCHÉS PUBLICS

Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Reiss, pour exposer sa question, n° 851.
M. Frédéric Reiss. Ma question s'adresse à M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
La parution du décret du 7 janvier 2004 portant réforme du code des marchés publics a donné lieu, à travers une multitude de publications, à autant d'interprétations divergentes qui ont semé le trouble dans le fonctionnement de nos communes, surtout au sein des plus petites et des moins structurées d'entre elles, notamment en ce qui concerne les marchés publics estimés à moins de 90 000 euros hors taxes.
Le trouble provient de l'incertitude juridique dans laquelle les élus et les fonctionnaires se trouvent placés, au quotidien, lors de leurs activités. Corruption, délit de favoritisme et risques pénaux divers leur sont opposés comme autant de menaces, comme si l'achat public dans nos communes était l'objet d'une suspicion permanente.
En tant que maire, je n'ai pas l'impression de dépenser les deniers publics sans respecter les règles fixées en la matière, même lorsque ces dernières se révèlent incompatibles avec les réalités du terrain et les impératifs de gestion.
Le ministre Christian Jacob a récemment annoncé devant cette assemblée un projet de décret fixant un seuil de 3 000 euros en dessous duquel les mesures de mise en concurrence préalable seront aménagées, voire supprimées. Il s'agit là d'une bonne initiative. Ce décret est attendu avec impatience.
Ma question porte sur deux points.
Le premier concerne les contrôles effectués par le juge et par les chambres des comptes à l'égard des pratiques des collectivités. Près de cinq mois après la parution du décret, les formations pour les élus et les agents peinent à se mettre en place et l'incertitude sur les modalités d'application du nouveau code des marchés publics reste entière sur certains points. Ces éléments seront-ils pris en compte lors de l'examen des affaires portées devant les juridictions compétentes ou lors de l'examen de la gestion des collectivités ?
Le second point concerne la nécessaire clarification des règles applicables pour rendre sérénité et efficacité à nos élus locaux et à nos fonctionnaires. Il n'est pas concevable, à mon sens, que dans le cadre d'un achat public responsable et transparent, le temps passé à élaborer le suivi des procédures, les règles de commande interne, la rédaction d'avis d'appel public à concurrence ou la discussion avec plusieurs fournisseurs - la liste n'est pas exhaustive - conduise à entraver le fonctionnement de nos collectivités, voire à générer des emplois supplémentaires, ayant pour seul raison d'être de sécuriser le fonctionnement de la collectivité, ce qui tend à annihiler purement et simplement l'effet des mesures de simplification.
Nos concitoyens sont en droit d'attendre droiture et transparence de la part des responsables des collectivités, mais les élus locaux doivent pouvoir exercer leur mandat dans un cadre juridique clair et bien délimité.
Quelles précisions le Gouvernement peut-il apporter sur ces points ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué aux relations du travail.
M. Gérard Larcher, ministre délégué aux relations du travail. Monsieur Reiss, Nicolas Sarkozy, ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, m'a prié de l'excuser et de vous assurer qu'il est personnellement disponible. Votre propos soulève deux grandes interrogations.
En ce qui concerne le contrôle effectué par les juges et les chambres régionales des comptes à l'égard des pratiques des collectivités territoriales relatives aux nouvelles règles du jeu, l'entrée en vigueur le 10 janvier dernier du nouveau code des marchés publics, issu du décret du 7 janvier 2004, est trop récente pour permettre l'établissement d'un bilan des jurisprudences des juridictions administratives, chargées de veiller à la régularité des procédures de marchés, ou des chambres régionales des comptes, compétentes pour examiner la régularité et la qualité de la gestion des collectivités territoriales.
Il n'existe pour l'instant, à la connaissance du Gouvernement, que quelques décisions de tribunaux administratifs statuant en référé, dont le nombre insuffisant ne permet pas d'établir une vision réellement exhaustive de l'évolution du contrôle du juge au regard de la nouvelle réglementation. Le ministère d'État en charge de l'économie, des finances et de l'industrie sera naturellement très attentif à cette question.
En ce qui concerne la nécessaire clarification des règles applicables, en vue de rendre sérénité et efficacité aux élus locaux et aux fonctionnaires qui rédigent les marchés publics - la seconde préoccupation que vous avez exprimée et que le Gouvernement partage -, le code des marchés publics prescrit des règles précises de procédure pour les marchés des collectivités locales au-dessus du seuil de 230 000 euros hors taxes.
Pour les marchés compris entre 90 000 et 230 000 euros hors taxes, le code impose une publication au BOAMP ou dans un journal habilité à recevoir des annonces légales. La règle est donc claire.
Pour les marchés d'un montant inférieur à 90 000 euros hors taxes, le code prévoit l'application des principes de transparence et d'égalité d'accès à la commande publique. Il ne précise pas, en revanche, les règles applicables, ne faisant que renvoyer au concept de " publicité adaptée ".
Afin de ne pas alourdir les procédures tout en garantissant l'efficacité de l'achat public - ce qui est l'objectif du nouveau code -, deux critères paraissent devoir déterminer le contenu de cette publicité en fonction du marché concerné.
D'une part, la publicité doit garantir l'efficacité de l'achat, c'est-à-dire qu'elle doit être à même de susciter la concurrence nécessaire.
D'autre part, le choix de la bonne publicité doit être guidé par l'équilibre économique général de l'opération et être en rapport avec l'objet et le montant estimé du marché. Il ne faut pas que l'investissement consacré à la mise en concurrence constitue un élément significatif de surcoût : lorsque la publication d'une annonce détaillée dans la presse écrite apparaît trop coûteuse au regard du montant de l'achat, il convient de trouver d'autres solutions.
Dans le cas des achats de faible montant, pour lesquels l'obligation de publicité n'implique pas forcément une publication, la mise en concurrence avérée de plusieurs prestataires ou fournisseurs constitue en elle-même un élément de publicité suffisant. Une demande de plusieurs devis à des fournisseurs préalablement repérés doit donc rester le bon réflexe.
Pour les achats d'un montant inférieur à 3 000 euros hors taxes, un décret en cours d'élaboration viendra enfin clarifier les règles applicables et dispenser ces marchés de toute procédure de publicité.
Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Reiss.
M. Frédéric Reiss. Je vous remercie, monsieur le ministre. L'efficacité du travail au quotidien dans nos collectivités ne doit pas être tributaire, j'en suis persuadé, de ces interrogations et de ces doutes permanents. Ces éléments de réponse permettent de franchir un pas supplémentaire, même si beaucoup de choses restent encore à clarifier.

Données clés

Auteur : M. Frédéric Reiss

Type de question : Question orale

Rubrique : Marchés publics

Ministère interrogé : économie

Ministère répondant : économie

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 22 juin 2004

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