âge de la retraite
Question de :
M. Jean Le Garrec
Nord (12e circonscription) - Socialiste
M. Jean Le Garrec attire l'attention de M. le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale sur la situation des personnels de l'usine des Dunes de Leffrinkoucke. En effet, la plupart d'entre eux sont victimes de maladies professionnelles liées à la présence d'amiante dans plusieurs étapes de l'activité de cette entreprise, notamment dans la récupération de ferrailles contenant de l'amiante pour fabriquer de l'acier ou l'utilisation de l'amiante comme calorifugeage. Eu égard aux conséquences sanitaires et sociales terribles de ces activités, le recours individuel prévu par l'arrêté du 3 décembre 2001 est une réponse totalement inadaptée. Il lui demande en conséquence d'envisager l'inscription de l'usine des Dunes sur la liste des établissements de matériaux contenant de l'amiante.
Réponse en séance, et publiée le 30 juin 2004
SITUATION DES SALARIÉS EXPOSÉS À L'AMIANTE
DE L'USINE DES DUNES DE LEFFRINCKOUCKE
DANS LE NORD
M. Jean Le Garrec. Monsieur le secrétaire d'État au logement, ma question concerne la situation de l'Usine des Dunes de Leffrinckoucke et sa pollution par l'amiante. En janvier dernier, j'ai adressé au précédent ministre chargé du travail et de l'emploi un dossier de deux cents pages, établi par le syndicat CGT de cette usine, remarquablement instruit et argumenté, tant sur la nature du " process " technique de fabrication que sur les terribles conséquences de la pollution par l'amiante. Il justifie et légitime la demande des salariés de l'usine de voir figurer celle-ci sur la liste des établissements dont les salariés peuvent bénéficier d'une cessation anticipée d'activité du fait de l'amiante.
L'article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 fait référence à " des établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante ". L'article 36 de la loi de financement du PLFSS pour 2000 ajoute la référence aux établissements de flocage et de calorifugeage. Il n'est fait référence à aucune branche industrielle précise. À preuve la parution régulière d'arrêtés, dont j'ai eu à connaître en plusieurs occasions, établissant des listes d'entreprises pouvant bénéficier de la cessation anticipée d'activité, ou corrigeant ces listes.
Les arguments en faveur de l'inscription de l'Usine des Dunes sont identifiés.
Premièrement, la spécificité de l'activité de l'usine et sa technologie particulière doivent être prises en considération.
Deuxièmement, depuis l'origine, le " process " de fabrication utilise des ferrailles de récupération ou de collecte contenant de l'amiante, l'acier pouvant être élaboré à partir de ferrailles sans trop de précaution de triage. Ces ferrailles de démolition pouvaient provenir de camions, wagons, bateaux et certaines de ces ferrailles contenaient ou étaient enrobées d'amiante.
Troisièmement, l'amiante était par ailleurs utilisée comme calorifugeage : plaques d'amiante disposées à l'intérieur du four martin, poudre d'amiante pour le masselotage de la lingotière. Cette présence d'amiante est évidente dans toute l'action de maintenance. Un document très intéressant sur le relevé de consommation montre le nombre très élevé d'utilisations de rondelles d'amiante.
Cette situation a des conséquences sociales terribles, qui se mesurent au nombre de cas d'asbestose, de décès ou de recours devant le TASS.
Dans ces conditions, le rejet de la demande d'inscription de l'usine n'est pas acceptable. La possibilité qui est proposée aux intéressés de déposer un recours individuel, conformément à l'arrêté du 3 décembre 2001, n'est pas une réponse adaptée.
Je suis persuadé que le Gouvernement saura entendre mes arguments et procédera à un réexamen favorable de ce dossier afin qu'un arrêté puisse être pris en faveur de l'Usine des Dunes.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État au logement.
M. Marc-Philippe Daubresse, secrétaire d'État au logement. Monsieur le député, vous voudrez bien excuser l'absence de M. le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale, retenu par une autre réunion. Il m'a chargé de répondre à votre question. D'ailleurs, Ascométal-Usine des Dunes est un établissement que je connais bien.
Vous avez donc appelé son attention sur la demande d'inscription de cette usine sur la liste ouvrant droit au dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante.
Avant d'évoquer ce cas particulier, je rappelle que les services de l'Etat sont tenus, pour ce type d'inscription, par un cadre législatif très strict, dont vous avez rappelé quelques articles.
Les lois de financement de la sécurité sociale pour 1999 et 2000 n'ont en effet retenu que les activités pour lesquelles les maladies professionnelles liées à l'amiante apparaissent dans une proportion sensiblement plus importante que dans l'ensemble de la population. Seuls les établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, les établissements de flocage, de calorifugeage, de construction ou de réparation navale sont actuellement éligibles à ce dispositif de préretraite, et ce pour l'ensemble de leurs salariés.
Pour l'établissement Usine des Dunes, une demande d'inscription a été déposée en 2001 et a donné lieu à une enquête approfondie. Elle a fait l'objet d'une décision de refus d'inscription présentée à la commission compétente de la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés dans sa séance du 30 avril 2003 et notifiée le 23 mai 2003. En effet, il a été considéré que l'activité de cet établissement, à savoir la fabrication d'acier, ne relevait pas du champ d'application du dispositif tel que fixé par la loi.
Les listes d'établissements éligibles sont toutefois régulièrement complétées et corrigées pour tenir compte de l'évolution des situations et des informations disponibles. Les pouvoirs publics veillent en effet à ce qu'elles soient établies avec la plus grande objectivité au terme d'analyses détaillées, en liaison avec l'ensemble des acteurs locaux de la prévention.
Dès lors, dans le cas où il y aurait des éléments nouveaux réellement probants pour l'établissement Usine des Dunes, une nouvelle demande pourrait être déposée. Cette demande serait instruite selon les modalités de droit commun prévues par la circulaire du 6 février 2004. L'inscription ne pourrait toutefois être envisagée que s'il apparaissait que l'établissement respecte le champ défini par la loi. Soyez assuré, monsieur le député, que je suivrai tout particulièrement ce dossier en fonction des éléments que vous nous donnerez.
Je peux toutefois vous indiquer que, depuis l'arrêté du 3 décembre 2001, tous les salariés qui sont reconnus atteints d'une maladie professionnelle liée à l'amiante, quelle qu'elle soit, peuvent bénéficier de la cessation anticipée d'activité directement, sans qu'il soit nécessaire que les établissements dans lesquels ils ont travaillé soient inscrits sur les listes. Dans ce cas, tout salarié ou ancien salarié peut, à titre individuel et dès l'âge de cinquante ans, faire valoir auprès de la caisse régionale d'assurance maladie compétente son souhait de bénéficier de l'allocation. Cette voie est d'ores et déjà ouverte aux salariés et anciens salariés de 1'Usine des Dunes qui seraient victimes d'une maladie professionnelle liée à l'amiante.
Tels sont les éléments de réponse que je peux vous apporter, monsieur Le Garrec.
M. le président. La parole est à M. Jean Le Garrec.
M. Jean Le Garrec. Je vous ai écouté avec beaucoup d'attention, monsieur le secrétaire d'État et je vous demande de suivre tout spécialement ce dossier. Il existe et, pour avoir suivi l'affaire de très près et en avoir discuté avec les organisations syndicales, je puis vous assurer qu'il a été complètement refait et complété. Vous pouvez donc, dès à présent, en prendre connaissance.
Comme vous le verrez, la situation de l'usine ressortit tout à fait aux deux articles des lois de financement de la sécurité sociale que j'ai cités et que je connais bien, pour avoir joué un rôle dans leur élaboration.
Les salariés de l'Usine des Dunes parlaient de " poudre de la mort ". L'analyse des rondelles pour le calorifugeage et des ferrailles est probante. L'utilisation d'amiante est avérée.
Ce dossier a été étudié trop hâtivement. Certes le dossier complet de deux cents pages n'a été fourni qu'en janvier 2004, mais je voudrais que, en votre qualité de ministre du Nord, vous demandiez communication de ce dossier, afin de le suivre attentivement.
Vous pouvez être certain de ma mobilisation à cet égard et de ma capacité à continuer à interroger le Gouvernement, car les éléments indiscutables dont nous disposons montrent que ce cas entre bien dans le cadre législatif que nous venons d'évoquer.
Auteur : M. Jean Le Garrec
Type de question : Question orale
Rubrique : Retraites : généralités
Ministère interrogé : emploi
Ministère répondant : emploi
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 29 juin 2004