alcoolisme
Question de :
Mme Françoise Branget
Doubs (1re circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
Mme Françoise Branget attire l'attention de M. le ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation sur la commercialisation des boissons alcoolisées dites premix. Il est aujourd'hui nécessaire de tirer la sonnette d'alarme face à la multiplication des conditionnements destinés à entraîner la consommation d'alcool chez les adolescents. Chacun peut voir, sur les rayons d'alcools, déferler des canettes métalliques et des petites bouteilles de sodas additionnées d'alcools forts comme la vodka ou la tequila et autres « prêts à boire », dont le conditionnement individuel vise le budget des plus jeunes. Plus grave encore, dans de nombreuses grandes surfaces, ces premix se trouvent sur le rayon des sodas, et non celui des alcools. De la même manière qu'il y a quelques mois le Gouvernement était intervenu dans le conditionnement du tabac en paquets de dix cigarettes à l'intention des jeunes consommateurs, il est aujourd'hui nécessaire de tirer la sonnette d'alarme face à la multiplication des conditionnements destinés à entraîner la consommation d'alcool chez les adolescents. Aussi, elle le prie de bien vouloir l'informer sur la position, voire les projets du ministère, concernant la réglementation des techniques de conditionnement et des méthodes publicitaires de ce type d'alcool à destination des jeunes consommateurs.
Réponse en séance, et publiée le 6 octobre 2004
CONSÉQUENCES DE LA COMMERCIALISATION
DES " PREMIX " SUR LA CONSOMMATION D'ALCOOL
DES JEUNES
Mme Françoise Branget. Madame la secrétaire d'État, je souhaite en effet attirer votre attention sur la commercialisation des boissons alcoolisées dites " premix ", qui pose un véritable problème de santé publique. L'alcoolisme continue de faire des ravages dans la jeunesse de notre pays. Il ne se passe pas une journée sans que l'on parle d'accident meurtrier impliquant des jeunes en état d'ébriété, ce qui pose clairement le problème de la prévention de l'alcoolisme.
Il y a quelques mois, le Gouvernement est intervenu pour interdire le conditionnement du tabac en paquets de dix cigarettes à l'intention des jeunes consommateurs. Aujourd'hui, il est nécessaire de tirer la sonnette d'alarme face à la multiplication des conditionnements destinés à encourager la consommation d'alcool chez les adolescents. Les jeunes appartenant à la tranche d'âge la plus fragile, c'est-à-dire entre treize et seize ans, ne sont pas préparés à une publicité aussi attractive pour un produit qui n'est pas explicitement présenté comme de l'alcool et qui, de fait, rend floue la distinction entre boissons alcoolisées et non alcoolisées.
Chacun peut voir déferler dans les rayons des grandes surfaces des canettes métalliques et de petites bouteilles de sodas sucrés additionnés d'alcools forts comme la vodka ou la tequila, titrant de 5 à 8 % en volume d'alcool et appelés " premix " ou autres " prêts à boire ". Ces breuvages, qui rivalisent de couleurs fluorescentes, de présentations résolument ludiques et d'appellations particulièrement attrayantes, sont clairement destinés aux plus jeunes. Leur conditionnement individuel vise d'ailleurs leurs budgets. De telles présentations sont particulièrement dangereuses, car en laissant supposer qu'elles ont moins d'effet que l'alcool fort, elles incitent à une consommation plus importante. Or, boire un premix ou un " alcopop " revient à consommer une bière de vingt-cinq centilitres, un verre de vin ou quatre centilitres d'un alcool fort sec. Plus grave encore, dans certaines grandes surfaces, on trouve ces boissons dans les rayons des sodas et non dans ceux des alcools. Dès lors, il est évident que ce genre de produits n'attire que les jeunes, voire les très jeunes, qui sont, de fait, la cible du marketing.
Il est de notre responsabilité d'intervenir dans la commercialisation de ce type d'alcools, d'autant plus que les parents, souvent plus effrayés par les drogues et les alcools durs, tolèrent leur consommation sans en mesurer les effets à long terme sur la santé des enfants.
Certains avertissements, tels que " Fumer tue ", qui doivent obligatoirement figurer sur les paquets de cigarettes, seraient transposables aux petites bouteilles d'alcool. Un contrôle des conditionnements colorés et festifs, destinés à attirer les plus jeunes, est également envisageable. Il existe déjà, au Royaume-Uni, où les " alcopops " ont été introduits en 1995, un code de bonne conduite en matière de dénomination, d'emballage et de commercialisation des boissons alcoolisées et une commission indépendante y est chargée d'enregistrer toutes les plaintes contre les produits en infraction avec ce code.
Pourriez-vous, madame la secrétaire d'État, m'informer de la position, voire des projets du ministère concernant les techniques de conditionnement, qui comprennent la mise en rayons dans les supermarchés, de ce type d'alcools à destination des jeunes consommateurs ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées.
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État aux personnes handicapées. Madame la députée, je partage votre préoccupation face à l'augmentation de la consommation d'alcool chez les jeunes. Ces dernières années, la proportion de buveurs réguliers d'alcool chez les garçons de dix-sept ans a considérablement augmenté, passant, selon l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies, de 16 % en 2000 à 21,2 % en 2003. À titre de comparaison, au cours de la même période, la prévalence de l'usage quotidien du tabac a diminué, passant de 41,9 % en 2000 à 38,1 % en 2003, notamment sous l'effet de notre politique contre le cancer.
Comme vous le soulignez et comme a déjà pu le déclarer le ministre de la santé et de la protection sociale, les boissons premix et autres " alcopops " sont destinés à fidéliser les publics les plus jeunes avec des boissons alcoolisées dont le fort goût en alcool ou l'amertume ont été masqués par l'ajout d'autres produits. C'est pourquoi nous avons fait adopter, dans le cadre de la loi du 9 août 2004 relative à la santé publique, une surtaxe pour en dissuader la consommation. Cette mesure entraînera très certainement la disparition du marché français de ces produits particulièrement attractifs pour les jeunes.
Toutefois, comme vous le rappelez, l'imagination des fabricants est sans fin et d'autres produits sont toujours susceptibles d'être mis sur le marché. Les services du ministère de la santé y seront attentifs et, si tel était le cas, nous proposerions des solutions adaptées.
Par ailleurs, il faut aller plus loin pour assurer une prévention efficace de l'alcoolisme chez les jeunes. C'est ainsi que les services du ministère de la santé préparent l'évaluation de l'interdiction de la vente d'alcool aux mineurs de moins de seize ans, qui démarrera avant la fin de cette année, ce qui n'avait jamais été entrepris dans notre pays. Des rapports internationaux récents soulignent l'efficacité de la réduction de l'accès à l'alcool pour les jeunes. Nous sommes convaincus qu'il s'agit là d'une mesure forte qu'il nous faut expérimenter et qui nous conduira vers une plus grande maîtrise des méthodes de marketing qui font peser sur nos jeunes de véritables risques sanitaires.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Branget.
Mme Françoise Branget. Je vous remercie, madame la secrétaire d'État. J'approuve l'interdiction de la vente d'alcool aux moins de seize ans, mais ne peut-on envisager une mesure plus drastique ? Je tiens à rappeler, à cet égard, qu'il y a quelques années, le Gouvernement avait pris une disposition très claire en décidant d'interdire les paquets de cigarettes de certaines marques dont les emballages étaient destinés à séduire la jeunesse.
Auteur : Mme Françoise Branget
Type de question : Question orale
Rubrique : Santé
Ministère interrogé : PME, commerce, artisanat, professions libérales et consommation
Ministère répondant : santé
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 octobre 2004