Question orale n° 963 :
plans de prévention des risques

12e Législature

Question de : M. André Gerin
Rhône (14e circonscription) - Député-e-s Communistes et Républicains

M. André Gerin attire l'attention de M. le ministre de l'écologie et du développement durable sur les difficultés rencontrées par les communes du Sud-Est et du Sud-Ouest lyonnais du fait des lenteurs de l'application de la loi du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques. En effet, le préfet du Rhône a élaboré des « porters à connaissance » qui figent le développement de ce secteur de l'agglomération lyonnaise. Les risques technologiques et la sécurité des populations, des salariés, des usagers du réseau ferré, des utilisateurs des voies routières et autoroutières nécessitent une approche de dimension globale où la prévention, l'environnement, la sécurité et le développement durable sont intégrés dans les prises de décisions. En conséquence, il lui demande quelles mesures il compte prendre pour permettre une prévention et un développement efficaces du Sud-Est et du Sud-Ouest lyonnais.

Réponse en séance, et publiée le 8 décembre 2004

APPLICATION DE LA LOI RELATIVE
À LA PRÉVENTION DES RISQUES
DANS L'AGGLOMÉRATION LYONNAISE

M. le président. La parole est à M. André Gerin, pour exposer sa question, n° 963.
M. André Gerin. Depuis plus d'un siècle, l'agglomération lyonnaise cohabite avec les industries chimiques. Entreprises et centres de recherche, parfois de renommée mondiale, sont implantés en très grand nombre sur son territoire. Au-delà du " couloir de la chimie " connu de tous ceux qui empruntent la route du soleil, cette industrie constitue l'un des atouts du développement et de la croissance de la région Rhône-Alpes.
Créatrice d'emplois, de richesse et d'innovation, elle est également source de risques industriels. Chacun garde en mémoire l'explosion survenue à la raffinerie de Feyzin en 1966. Depuis, habitants, salariés, élus et entreprises se sont attachés à une meilleure prise en compte des risques. Dans les dernières décennies, les entreprises ont consacré des investissements importants à la sécurité et mis en application des règles plus strictes. Cependant, des influences contradictoires peuvent contrarier ces efforts. Je pense en particulier à la précarité de l'emploi et au recours massif à l'externalisation et la sous-traitance, qui fragilisent les savoir-faire.
Populations et élus ont accru leurs exigences en matière de prévention. Dans le domaine urbanistique, des avancées certaines ont eu lieu. La réglementation et la législation ont été renforcées, notamment pour les périmètres de sécurité autour des installations industrielles à risque. À ce titre, la maîtrise de l'urbanisation est l'une des pièces centrales du dispositif. C'est l'un des objectifs de la loi relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages du 30 juillet 2003, qui comporte différentes mesures dont l'une des plus importantes est le PPRT, plan de prévention des risques technologiques. Une dizaine de ces plans ont été élaborés, dont l'application est prévue jusqu'en 2008. Pour l'agglomération lyonnaise, 23 sites Seveso de haut niveau sont concernés, le premier site expérimental étant situé à Feyzin.
Toutefois, pour une réelle mise en oeuvre des PPRT, nous sommes dans l'attente des mesures relatives au financement par défaut en cas d'absence d'accord local. Or les textes réglementaires - décrets, circulaires et arrêtés - sont toujours en cours d'élaboration. Ces retards entravent l'application du dispositif prévu par la loi et, dans le Rhône, ont donné lieu à des décisions administratives inopinées et sans consultation. À plusieurs reprises, en mars en août 2004, le préfet du Rhône a, par " porter à connaissance ", procédure de la compétence exclusive de l'État, défini des zones totalement ou partiellement inconstructibles. De nombreux projets des collectivités territoriales du Sud lyonnais, à savoir des communes de Saint-Fons, Feyzin, Solaize, Oullins, Pierre-Bénite, mais aussi de Lyon, avec l'aménagement du confluent et de Gerland, vont être touchés. Cette extension des zones inconstructibles est en totale contradiction avec le projet d'intérêt général élaboré en 1991, document qui a jusqu'à présent servi de base de travail à la réflexion sur la réduction des risques industriels.
La politique du " tout ou rien " n'est pas concevable, et la gestion des risques industriels ne peut se régler au moyen de quelques actes administratifs qui ont pour effet de geler les situations. Plusieurs dizaines de milliers d'habitants sont domiciliés dans cette zone ; des milliers de salariés y travaillent ; une voie de chemin de fer à haute densité de trafic, ainsi que des axes routiers ou autoroutiers d'intérêt européen, passent à quelques dizaines de mètres des sites. L'importance de cette question justifie la forte implication des élus locaux en ce domaine depuis de nombreuses années.
Il faut faire confiance aux élus, aux salariés et à la population. Afin de sortir de cette situation de blocage, je demande au Gouvernement d'accélérer l'élaboration de la mise en oeuvre de la loi Bachelot. En l'absence des décrets d'application de cette loi, les " portes à connaissance " constituent des documents provisoires, à valeur indicative. Pourquoi seraient-ils des actes d'autorité figés, alors que c'est la sagesse qui doit nous guider collectivement ? À quand la réunion des élus, des industriels et de l'État autour d'une même table, pour réfléchir dans un esprit républicain à la réduction des risques ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées.
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État aux personnes handicapées. Monsieur le député, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser l'absence du ministre de l'écologie et du développement durable.
Votre question porte sur la maîtrise de l'urbanisation. Elle vise plus particulièrement la prise en compte dans le plan local d'urbanisme du Grand Lyon des risques technologiques.
Le ministre de l'écologie et du développement durable a échangé sur cette question avec les élus lyonnais la semaine dernière. Vous avez d'ailleurs participé à cette réunion.
Il est d'abord important de rappeler que le développement durable suppose que l'industrie chimique ait un avenir en France. Cela implique de réconcilier cette industrie avec la population qui l'entoure et les élus. Cette réconciliation n'est pas chose facile après l'accident d'AZF en septembre 2001.
La loi du 30 août 2003, relative notamment à la prévention des risques technologiques, apporte certaines réponses. Elle prévoit en particulier de prendre en compte la probabilité dans l'élaboration des plans de prévention des risques technologiques. Le travail est engagé, notamment sur le site Total de Feyzin, dans le cadre d'un plan de prévention des risques technologique expérimental. Toutefois, l'élaboration de ces plans prend plusieurs années car il s'agit de dossiers complexes.
Dans l'attente, certains plans locaux d'urbanisme doivent être révisés. C'est le cas de celui du Grand Lyon. Les plans locaux d'urbanisme doivent bien entendu prendre en compte les risques technologiques : c'est le devoir de protection des populations.
Par ailleurs, l'État et les collectivités locales ont un devoir de transparence. L'article L. 121-2 du code de l'urbanisme dispose ainsi : " Le préfet porte à la connaissance des communes ou de leurs groupements compétents les informations nécessaires à l'exercice de leurs compétences en matière d'urbanisme. [...] Le préfet fournit notamment les études techniques dont dispose l'État en matière de prévention des risques. [...] Les porters à connaissance sont tenus à la disposition du public. En outre, tout ou partie de ces pièces peut être annexé au dossier d'enquête publique. "
Les porters à connaissance du préfet du Rhône correspondaient donc à une obligation légale. Les périmètres du dernier porter à connaissance du préfet du Rhône dépassent parfois largement les anciens périmètres de maîtrise de l'urbanisation. Cependant, ces porters à connaissance n'ont pas pour effet de figer le développement.
Comme l'a indiqué le préfet du Rhône dans son avis sur le projet de révision du plan local d'urbanisme, il s'agit au contraire de traduire l'équilibre résultant de la prise en compte simultanée par les collectivités des enjeux d'aménagement et de développement locaux, d'une part, et des aléas provenant de l'exploitation des études de dangers et de leurs compléments, d'autre part.
Pour les établissements ayant généré une maîtrise de l'urbanisation dans le cadre du projet d'intérêt général de 1990, le préfet a demandé a minima le maintien des périmètres et des prescriptions antérieures.
Sur la base de cet avis qui laisse une large latitude à la communauté urbaine de Lyon, le ministre de l'écologie et du développement durable souhaite que les discussions entre les élus locaux et le préfet du Rhône se poursuivent.
II convient de traiter ces sujets avec sérieux et pragmatisme. Le développement économique ne peut primer sur la sécurité mais le développement économique n'est nullement contradictoire avec le respect de l'environnement.
En matière de risques technologiques, la démarche de l'État prend bien en compte la prévention, l'environnement, la sécurité et le développement durable.
M. le président. La parole est à M. André Gerin.
M. André Gerin. Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, d'avoir fait ce tour d'horizon. Il n'y a pas d'ambiguïté sur la nécessité de se mettre au diapason s'agissant des risques et des dangers. De ce point de vue, il faut faire évoluer la culture publique.
Par ailleurs, nous ne contestons pas les porters à connaissance du préfet. Il faut noter toutefois, et vous l'avez d'ailleurs souligné, que ceux-ci ne figent pas le développement. Aujourd'hui, tout le sud de Lyon, soit quelque 300 000 habitants, est concerné. Nous souhaitons donc que les éléments du porter à connaissance soient discutés avec l'État, les industriels et la communauté urbaine de Lyon, qui pourraient faire preuve d'une plus grande mobilisation, ainsi qu'avec les élus concernés. Nous pourrons ainsi, tous ensemble, apporter des réponses coordonnées au problème du développement. Les communes de l'est et de l'ouest de Lyon doivent, dans le contexte actuel, répondre de façon pertinente.

Données clés

Auteur : M. André Gerin

Type de question : Question orale

Rubrique : Sécurité publique

Ministère interrogé : écologie

Ministère répondant : écologie

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 7 décembre 2004

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