Question orale n° 994 :
politique des transports

12e Législature

Question de : Mme Arlette Grosskost
Haut-Rhin (5e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

Mme Arlette Grosskost interroge M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer sur la nouvelle taxe allemande sur les poids lourds qui représente, pour les entreprises de transport alsaciennes, une source légitime d'inquiétudes tout à la fois techniques et financières, dans un contexte de concurrence européenne d'ores et déjà difficile. L'instauration de cette taxe aura également des conséquences importantes en termes de report de trafic sur le réseau routier alsacien, s'agissant notamment de l'axe Nord-Sud, parallèle au couloir autoroutier allemand, qui restera gratuit. Autant de raisons pour relayer les demandes exprimées par la profession et qui visent, essentiellement, à obtenir la gratuité du tronçon autoroutier allemand entre Karlsruhe et Neuenburg, ainsi qu'un suivi précis par ses services de l'évolution globale du trafic dans la région après la mise en oeuvre de la taxe. L'augmentation du trafic routier en Alsace pose le problème du risque de saturation totale du trafic dans le couloir Rhin-Rhône, à échéance de vingt à trente ans, et ses conséquences sur la santé et l'environnement, bien sûr, mais aussi sur l'activité et le développement de nos entreprises. Trois types d'infrastructures représentent ainsi un enjeu essentiel pour nos entreprises et, notamment, pour notre industrie automobile : la route d'abord, avec la nécessité de moderniser l'axe Belfort-Langres qui représente un véritable cordon ombilical pour notre industrie automobile et ses relations nationales vers le Nord et Paris, mais aussi internationales vers les ports du Havre et de Calais ; le ferroviaire ensuite, avec la nécessité de développer l'activité fret de la SNCF et de moderniser notre réseau sur l'axe européen Rhin-Rhône, parallèlement à la mise en oeuvre de notre TGV ; le fluvial enfin, avec la nécessité de ranimer, dans une version et un gabarit raisonnables, le projet de canal Rhin-Rhône trop vite abandonné. Elle le remercie des éléments de réponse qu'il pourra lui donner sur ces questions qui conditionnent l'avenir de notre tissu économique, et donc de nos emplois, au moment où se prépare, en Alsace et en Franche-Comté, notre dossier pour un pôle de compétitivité centré autour des métiers de l'automobile.

Réponse en séance, et publiée le 22 décembre 2004

POLITIQUE DES TRANSPORTS EN ALSACE

M. le président. La parole est à Mme Arlette Grosskost, pour exposer sa question, n° 994, relative à la politique des transports en Alsace.
Mme Arlette Grosskost. Monsieur le secrétaire d'État aux transports et à la mer, je voudrais associer à ma question mon collègue Francis Hillmeyer, député du Haut Rhin, qui a déjà travaillé sur le sujet que je vais aborder.
Le 1er janvier prochain doit entrer en vigueur, sur les autoroutes allemandes, une nouvelle taxe sur les poids lourds qui représente, pour les entreprises de transport alsaciennes, une source légitime d'inquiétudes à la fois techniques et financières, dans un contexte de concurrence européenne d'ores et déjà difficile. L'instauration de cette taxe aura également des conséquences importantes en termes de report de trafic sur le réseau routier alsacien, s'agissant notamment de l'axe Nord-Sud, parallèle au couloir autoroutier allemand, et qui restera gratuit.
Autant de raisons pour relayer les demandes exprimées par la profession et qui visent, essentiellement, à obtenir la gratuité du tronçon autoroutier allemand entre Karlsruhe et Neuenburg, ainsi qu'un suivi précis par vos services de l'évolution globale du trafic dans la région après la mise en oeuvre de la taxe.
L'augmentation du trafic routier en Alsace pose le problème du risque de saturation totale dans le couloir Rhin-Rhône, à échéance de vingt à trente ans, et de ses conséquences sur la santé et l'environnement, bien sûr, mais aussi sur l'activité et le développement de nos entreprises. Trois types d'infrastructures représentent ainsi un enjeu essentiel pour nos entreprises, notamment pour notre industrie automobile.
En ce concerne la route, il est nécessaire de moderniser l'axe Belfort-Langres, qui représente un véritable cordon ombilical pour notre industrie automobile - fortement présente sur les sites de Mulhouse et de Sochaux - et ses relations nationales vers le Nord et Paris, mais aussi internationales vers les ports du Havre et de Calais.
S'agissant du secteur ferroviaire, il convient de développer l'activité fret de la SNCF et de moderniser notre réseau sur l'axe européen Rhin-Rhône, parallèlement à la mise en oeuvre de notre TGV. À cet égard, il serait souhaitable de donner la priorité à l'aménagement du tronçon ferroviaire entre Mulhouse et le Rhin ainsi qu'à la mise au gabarit B1 des tunnels ferroviaires de la vallée du Doubs.
Dans le domaine fluvial, enfin - un sujet qui me tient à coeur -, nous devons ranimer à court terme, dans une version et un gabarit raisonnables, le projet de canal Rhin-Rhône trop vite abandonné par Mme Voynet, malgré son intérêt pour le développement durable. Ce projet, sur lequel travaille le sénateur Francis Grignon, répondrait aux besoins exprimés par les industriels en faveur d'un accroissement du trafic combiné dans nos régions. Pourquoi ne pas poursuivre, en réalisant une nouvelle étape au-delà de Mulhouse, vers le nord de la Franche-Comté, l'aménagement au gabarit européen déjà entrepris depuis le Rhin jusqu'à Mulhouse ?
Je vous remercie des éléments de réponse que vous pourrez me donner sur ces questions qui conditionnent l'avenir de notre tissu économique, et donc de nos emplois, au moment où nous préparons, en Alsace et en Franche-Comté, le dossier de création d'un pôle de compétitivité centré autour des métiers de l'automobile.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État aux transports et à la mer.
M. François Goulard, secrétaire d'État aux transports et à la mer. Madame la députée, les questions que vous posez sont d'une très grande importance, non seulement pour la région Alsace, mais aussi pour l'ensemble de notre pays.
Vous avez évoqué les risques de report de trafic que pourrait entraîner, en Alsace, la mise en application de la redevance kilométrique, la Lastkraftwagen-Maut, prévue initialement pour le 31 août 2003 et qui a été reportée au 1er janvier 2005 - la date m'a été confirmée par le ministre fédéral chargé des transports, M. Manfred Stolpe.
Le péage kilométrique se substituera à l'eurovignette allemande, qui a été supprimée par anticipation. Comme elle, il concernera les seuls poids lourds de douze tonnes et plus utilisant les infrastructures allemandes.
La Lkw-Maut s'appliquera bien entendu de manière identique quel que soit l'État d'immatriculation du véhicule et il n'y aura pas de distorsion de concurrence de ce point de vue.
Les autorités fédérales allemandes et l'opérateur Toll Collect recommandent aux entreprises qui circulent régulièrement sur les autoroutes allemandes de s'équiper d'un appareil de facturation automatique embarqué - dit " On-board unit " - afin de faciliter les opérations de paiement grâce aux automates installés aux terminaux de péage.
La question du détournement possible du trafic vers nos infrastructures à partir du 1er janvier a retenu toute l'attention des autorités françaises. Un observatoire régional du trafic routier a été instauré en région Alsace. Il quantifiera dès janvier prochain l'évolution des reports éventuels de trafic en France. Suivant les observations qui seront ainsi effectuées, nous définirons les actions à mener, en liaison étroite, naturellement, avec les autorités fédérales allemandes.
Vous avez évoqué le risque de saturation du trafic dans le couloir Rhin-Rhône, à échéance de vingt ans, et les actions que nous pouvons entreprendre pour l'éviter. L'enjeu majeur est de proposer une offre alternative par la voie ferrée. L'axe européen Rhin-Rhône est un des grands corridors de fret ferroviaire reliant les pays du Benelux et l'Allemagne aux régions méditerranéennes. L'amélioration des caractéristiques de cet axe est d'ores et déjà engagée à travers plusieurs opérations menées dans le cadre des contrats de plan État-régions. La mise en service récente du raccordement d'Athus en est la démonstration.
La construction de la ligne nouvelle à grande vitesse Rhin-Rhône s'inscrit également dans une perspective de développement du fret ferroviaire : le projet, notamment sa branche Est, devrait démarrer en 2006. Il libérera des capacités pour le fret sur les lignes existantes, ainsi que sur la ligne Paris-Bâle, qui constitue un débouché naturel des circulations de fret depuis la Suisse vers l'Île-de-France.
Le raccordement de Perrigny - partie intégrante du projet " branche est " - permettra d'améliorer les relations voyageurs et fret entre le sillon mosellan, Rhône-Alpes et le Sud de la France en décongestionnant le noeud ferroviaire dijonnais.
Enfin, la branche sud, qui reliera en ligne nouvelle les agglomérations dijonnaise et lyonnaise, est prévue pour accueillir tant les TGV voyageurs que les circulations de fret. Elle constitue un des éléments importants de la magistrale Ecofret, axe fret continu qui reliera le Nord de la France aux traversées alpines existantes et à venir, à la vallée du Rhône et à l'arc méditerranéen.
S'agissant du fluvial, le comité interministériel pour l'aménagement et le développement du territoire du 18 décembre 2003 a davantage mis l'accent sur le ferroviaire et n'a, en conséquence, pas identifié de nouveau projet de liaison fluviale à grand gabarit entre la Saône et le Rhin. J'ai compris que vous le regrettiez. L'opportunité de créer une liaison fluviale entre la mer du Nord et la Méditerranée fait l'objet d'une étude préliminaire socio-économique financée dans le cadre des contrats de plan des régions Rhône-Alpes et Lorraine.
Ainsi, pour étudier toutes les alternatives et en l'absence d'étude récente sur cette liaison à grand gabarit entre la Saône et le Rhin, suite à l'abandon par le gouvernement précédent en 1997 de ce grand projet, nous avons indiqué au sénateur Francis Grignon que des études sur les bénéfices et les perspectives d'un report modal sur le mode fluvial étaient souhaitables. Les besoins spécifiques de desserte fluviale du nord-Franche-Comté devraient pourvoir être étudiés dans ce cadre.
Vous avez, enfin, évoqué l'axe routier Langres-Belfort. Cet itinéraire est aujourd'hui prioritaire afin de renforcer notre armature en relation transversale. Le contrat de plan accorde une place de choix à cet axe en concentrant les efforts sur la section Lure-A36 et A36-Delle à la frontière suisse. En 2005, grâce à la relance du volet routier des contrats de plan annoncés par le Premier ministre très récemment, l'État lui consacrera environ 26 millions d'euros, soit plus de la moitié de la dotation pour la Franche-Comté.
Nous avons, par ailleurs, rencontré les élus de Franche-Comté et de Champagne-Ardenne pour étudier la faisabilité d'une liaison autoroutière concédée entre l'A5 et Langres-Vesoul. Nous avons demandé au préfet de région de Franche-Comté de mettre au point, avec les collectivités locales, un document préliminaire précisant les engagements de chacun.
Vous voyez que sur tous ces grands sujets sur lesquels nous nous rejoignons, quant à leur intérêt majeur, le Gouvernement est loin d'être inactif. J'espère vous l'avoir démontré, madame la députée.
M. le président. La parole est à Mme Arlette Grosskost.
Mme Arlette Grosskost. Je tiens tout simplement à remercier M. le secrétaire d'État pour toutes ces précisions.
Je note ce que vous avez dit de l'observatoire régional ; je reste malheureusement convaincue que les camions fréquenteront davantage nos routes alsaciennes.
J'ai également retenu que les travaux du TGV Rhin-Rhône démarreront en 2006. Je compte naturellement sur votre sagacité, monsieur le secrétaire d'État, pour étudier ce problème de près, parce qu'il ne vous aura pas échappé qu'il reste à boucler le financement.

Données clés

Auteur : Mme Arlette Grosskost

Type de question : Question orale

Rubrique : Transports

Ministère interrogé : équipement

Ministère répondant : équipement

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 21 décembre 2004

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