expertise
Question de :
M. Damien Abad
Ain (5e circonscription) - Les Républicains
M. Damien Abad interroge Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur le non-paiement des experts par les tribunaux. Les tribunaux se trouvent dans une telle situation financière qu'ils ne règlent pas les différents experts auxquels ils font appel. Pour que la justice fonctionne, que le magistrat du siège rende une décision en toute connaissance de cause, il est nécessairement aidé par les auxiliaires de justice, autrement dit l'ensemble des professions qui concourent au fonctionnement du service public de la justice. Cette qualité est reconnue notamment aux avocats, aux huissiers de justice, aux administrateurs judiciaires et aux mandataires liquidateurs. Les magistrats peuvent également s'appuyer sur des experts (légistes, psychologues, traducteurs, etc.) qui pourront éclairer leur jugement. Lorsque pour rendre sa décision, une juridiction estime nécessaire d'obtenir un avis d'ordre technique, elle fait appel à une personne dont l'expérience a été vérifiée et que l'on désigne sous le nom d' « expert ». Le statut d'expert est établi par le décret n° 2004-1463, du 23 décembre 2004, fixant les conditions générales d'inscription par discipline et par spécialité. L'expert détient un rôle fondamental dans le bon déroulement de la justice. Fondé sur le principe du contradictoire, sa mission est d'entendre les parties, parfois de comparer leurs points de vue et enfin de soumettre un rapport établissant les résultats des investigations techniques auxquelles il a procédé. Son rôle d'intermédiaire et d'analyse est donc indispensable. Depuis plusieurs années, les délais de paiement des prestations des experts ne cessent de s'allonger et il n'est pas rare pour eux de devoir réclamer leur dû de manière répétée pendant plusieurs mois avant de le percevoir. Certains experts ont même dû entamer une grève depuis le 19 novembre 2012 afin de dénoncer le non-paiement de leurs rémunérations, appelées des « mémoires de frais de justice ». Certains tribunaux doivent plus d'une vingtaine de milliers d'euros à un seul expert qui n'est toujours pas payé (article du Parisien du 29 novembre 2012). Le ministère de la justice se défile, invoquant la compétence de celui des finances ou du parquet, les deux autres instances arguant également leur incompétence en la matière. Aussi, dans un souci de bonne marche de la justice, il souhaiterait savoir si elle envisage de mettre en œuvre les moyens nécessaires pour empêcher ce type de dysfonctionnement et payer les sommes dues aux experts.
Réponse publiée le 18 juin 2013
Le ministère de la justice est particulièrement attentif à l'amélioration des délais de paiement des indemnités dues aux experts judiciaires. Les retards de paiement actuels s'expliquent en partie par la volumétrie des mémoires traités par les juridictions et par la complexité du circuit de traitement de ces mémoires. En outre, il s'explique aussi par le caractère de la dotation budgétaire. En effet, depuis le passage à la LOLF, les crédits sur lesquels sont imputées les indemnités allouées aux experts et aux interprètes sont devenus des crédits limitatifs. La Chancellerie a mis en place en 2012 un plan d'action ayant pour objet de réduire le nombre des mémoires de frais, de simplifier la procédure et d'accélérer les délais de paiement. Elle a ainsi passé des conventions avec des prestataires régulièrement désignés par les juridictions, dans les domaines de la téléphonie, des analyses génétiques et de la toxicologie. Ce dispositif a permis de substituer au paiement à l'acte par les juridictions un paiement mensuel par l'administration centrale et de réduire de plus de 600 000 le nombre des mémoires traités. Elle a, par ailleurs, étendu le champ d'application de la procédure de certification (moins lourde que la procédure de taxation) et incité les juridictions à proposer aux experts et aux interprètes intervenant de manière régulière l'établissement de mémoires regroupant les frais de plusieurs missions. La Chancellerie doit prendre d'autres mesures en 2013 pour rationaliser le circuit de traitement des frais de justice ; elle envisage, notamment, de fluidifier les contrôles en généralisant le contrôle par sondage. Dans cette perspective, elle doit saisir prochainement le Conseil d'Etat d'un projet de décret relatif aux frais de justice. Enfin, la mise en place courant 2013 - début 2014 de la plate-forme nationale des interceptions judiciaires aura pour effet d'extraire du circuit de traitement des juridictions l'ensemble des prestations relevant de la téléphonie. Ainsi, la diminution très importante du flux des mémoires à traiter, associée aux nouvelles modalités de contrôle, devrait avoir pour conséquence une réduction des délais de paiement. Enfin, la dotation accordée au titre des frais de justice pour l'année 2013 dans le cadre de la Loi de Finances initiale est en augmentation de près de 15 % par rapport à l'année 2012. Ces crédits supplémentaires devraient également permettre de doter les cours d'appel de telle sorte qu'elles puissent faire face à leurs engagements, notamment vis-à-vis de tous les experts dont la contribution est indispensable à l'exercice de la mission de service public de la justice..
Auteur : M. Damien Abad
Type de question : Question écrite
Rubrique : Justice
Ministère interrogé : Justice
Ministère répondant : Justice
Dates :
Question publiée le 11 décembre 2012
Réponse publiée le 18 juin 2013