Question de : M. Gérald Darmanin
Nord (10e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Gérald Darmanin interroge M. le ministre de l'économie et des finances sur les propositions faites à la Commission européenne pour renforcer la lutte contre la fraude fiscale et contre le blanchiment au sein de l'UE. Il a en effet annoncé, le lundi 3 décembre 2012, avoir écrit aux commissaires européens Michel Barnier et Algirdas Semeta, respectivement en charge du marché intérieur et de la fiscalité, pour appeler à une action déterminée à l'encontre de l'ensemble des fraudes susceptibles de porter atteinte aux intérêts des finances de l'Union et de ses États membres. Il souhaiterait être informé des propositions faites par lui et de l'accueil qui leur a été réservé par leurs destinataires. Il souhaiterait également connaître les estimations faites par le ministère sur le montant de ces fraudes.

Réponse publiée le 8 octobre 2013

La lutte contre la fraude fiscale, notamment dans le cadre de l'Union européenne, est une priorité pour les pouvoirs publics. A cet égard, il est rappelé tout d'abord que de nombreuses mesures législatives ont été adoptées à l'initiative du Gouvernement, notamment à l'occasion du collectif de fin d'année, pour donner des outils renforcés à l'administration fiscale. Il s'agit par exemple de l'extension du champ de la police fiscale aux domiciliations fiscales fictives hors de France. Le Gouvernement a aussi pris des mesures pour contrer les politiques de prix de transfert abusives au sein des groupes multinationaux, qui ont pour effet de soustraire leurs résultats à l'impôt sur les sociétés français. Face à ces pratiques, il a soumis au Parlement, dès l'été 2012, une mesure législative qui renforce les moyens de l'administration, à travers un renversement de la charge de la preuve, pour taxer sur le fondement de l'article 209 B du code général des impôts les bénéfices que les entreprises françaises localisent dans des Etats ou territoires hors de l'Union européenne où ils sont soumis à des régimes fiscaux privilégiés. S'agissant de l'action des services de contrôle fiscal, ils sont particulièrement mobilisés sur les problématiques de l'évasion fiscale des groupes multinationaux. Ainsi, les rectifications de prix de transfert se sont élevées à 3,5 milliards d'euros en base en 2012. Par ailleurs, des mesures ont été prises pour renforcer les moyens de l'administration fiscale afin de lutter contre la fraude fiscale en matière de taxe sur la valeur ajoutée (TVA), et en particulier les formes les plus graves telles que les carrousels. Outre l'application de lourdes sanctions fiscales, la direction générale des finances publiques (DGFiP) peut déposer une plainte au pénal, pour fraude fiscale ou escroquerie, délits passibles d'une amende et d'une peine d'emprisonnement. De plus, dans le cadre du collectif de fin d'année 2012, une mesure, instaurant entre eux une solidarité, a été prise pour le paiement de la TVA due par les participants à des circuits frauduleux dans le secteur des véhicules d'occasion. Au plan des résultats, les rappels effectués par les services du contrôle fiscal concernant cette taxe se sont élevés à 3,2 milliards d'euros en 2012. L'administration fiscale a également rejeté 1,3 milliard d'euros de demandes injustifiées de remboursement de crédit de TVA. Au plan européen et international, la France joue également un rôle essentiel. Ainsi, plusieurs Etats du G20 dont la France ont pris l'initiative de demander à l'organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE) de présenter des propositions afin de lutter contre l'érosion des assiettes fiscales et les transferts de bénéfices. Un rapport dressant un état des lieux très complet a été soumis aux ministres des finances à l'occasion du sommet de Moscou des 15 et 16 février 2013. A cette occasion, les ministres français, allemands et britanniques ont publiquement rappelé leur détermination pour progresser sur ce dossier. Sur cette base, l'OCDE a présenté le 16 juillet 2013 un plan d'action large et ambitieux dont les 15 axes de travail ont été endossés par les ministres des finances du G20 lors de leur réunion les 19 et 20 du même mois. La France est fortement impliquée dans les groupes d'experts chargés d'assurer la traduction concrète. Elle plaide en priorité pour que des solutions soient trouvées pour résoudre les phénomènes de double exonération, pour renforcer les mesures anti-abus et pour que les règles soient adaptées afin de mieux appréhender les profits réalisés par le secteur numérique, actuellement sous-taxé. Ainsi que les ministres de l'économie et des finances et délégué au budget l'ont souligné dans la lettre qu'ils ont adressée le 21 novembre 2012 aux commissaires en charge de la fiscalité et du marché intérieur, la France considère que l'Union européenne doit également s'attacher à progresser sur ces problématiques, ce qui suppose que la Commission, comme l'y a invitée le Conseil ECOFIN du 14 mai 2013, amende le droit applicable ou propose de nouvelles actions, notamment dans le secteur du numérique. La France a également pris l'initiative d'un ensemble d'actions au niveau international en faveur du développement de l'échange d'informations. Elle préside le groupe d'évaluation par les pairs (PRG) au sein du forum mondial sur la transparence et l'échange d'informations, qui a pour mission de mettre en oeuvre un processus d'évaluation des échanges de renseignements mis en place par les différents Etats et territoires, notamment ceux qui ont conclu dernièrement des accords de coopération. Elle poursuit une politique volontariste d'échanges de renseignements avec les anciens Etats et territoires non coopératifs. Sur le plan européen, la France promeut activement le renforcement de la coopération administrative. Elle a pris l'initiative avec l'Allemagne, l'Espagne, l'Italie et Royaume-Uni de faire part à la Commission européenne le 9 avril 2013 de sa volonté de développer un projet pilote multilatéral d'échange automatique reposant sur un format proche de celui prévu dans le cadre des accords négociés avec les États-Unis dans le cadre de la réglementation américaine FATCA. Cette initiative a d'ailleurs été rejointe par 12 autres États membres lors du Conseil ECOFIN du 14 mai dernier et certains Etats tiers à l'Union ont fait part de leur souhait d'y participer. En parallèle, la Commission, ainsi qu'elle y avait été invitée par le Conseil européen, a présenté le 12 juin 2013 une révision de la directive sur la coopération administrative en matière fiscale pour élargir le champ d'application de l'échange automatique d'informations. Cette initiative s'inscrit dans les travaux de l'OCDE qui projette de développer un standard unique par le biais d'un modèle d'échange automatique. Par ailleurs, à l'initiative de la France, lors du Conseil européen du 22 mai 2013, les Etats membres ont demandé à la Commission européenne d'étudier la création d'une liste européenne des paradis fiscaux. Pour lutter contre les phénomènes de fraude à la TVA massifs et évolutifs, grâce à l'impulsion politique du Conseil européen du 22 mai 2013, un accord a été obtenu lors de l'ECOFIN du 21 juin dernier sur un paquet « anti-fraude » qui combine un mécanisme de réaction rapide permettant aux États membres de prendre des mesures législatives pour mettre fin aux risques les plus importants dès qu'ils sont identifiés, et un dispositif facultatif et temporaire d'autoliquidation pour certaines opérations. La France agit enfin pour renforcer les obligations de transparence et promeut activement une plus forte exigence concernant les activités conduites à l'étranger par les filiales des banques et des grandes entreprises. Pour les établissements financiers, ceci se traduira au plan national par de nouvelles obligations instituées dans le cadre de la loi de séparation et de régulation des activités bancaires récemment adoptée, lesquelles viendront compléter et renforcer l'accord obtenu avec le soutien de la France pour la révision de la directive CRD IV adoptée le 20 juin. Le Gouvernement porte dans les instances internationales (G8, G20) et au Conseil européen la nécessité d'étendre cette approche de transparence aux entreprises multinationales. S'agissant de l'évaluation du montant des fraudes fiscales, il est par définition impossible d'obtenir un montant global précis. En revanche, les résultats des contrôles permettent de mesurer l'ordre de grandeur des atteintes qui en résultent pour les finances publiques. Ces explications sont de nature à répondre aux préoccupations de l'auteur de la question, qui constituent des priorités pour le Gouvernement.

Données clés

Auteur : M. Gérald Darmanin

Type de question : Question écrite

Rubrique : Impôts et taxes

Ministère interrogé : Économie et finances

Ministère répondant : Économie et finances

Dates :
Question publiée le 18 décembre 2012
Réponse publiée le 8 octobre 2013

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