Question de : Mme Marie-Lou Marcel
Aveyron (2e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

Mme Marie-Lou Marcel attire l'attention de M. le ministre du redressement productif sur les conséquences pour les entreprises du BTP de la réduction des délais de paiement imposée par la loi de modernisation de l'économie du 4 août 2008. Depuis sa mise en oeuvre, les entreprises de ce secteur pâtissent d'un déséquilibre grandissant entre, d'une part, des délais fournisseurs plus courts et, d'autre part, des délais clients qui demeurent inchangés, voire qui augmentent. Cette situation essouffle les trésoreries des entreprises et peut avoir des conséquences dramatiques dans le contexte actuel de grande fragilité économique. Ce déséquilibre est chaque jour plus intolérable pour les PME et TPE du département de l'Aveyron qui sont parvenues jusqu'à présent à préserver l'appareil de production et l'emploi. Ces entreprises poussent un cri d'alarme et, au niveau national, la FBTP a proposé deux évolutions de la législation afin de mettre fin à cette situation inéquitable. La première vise à imposer le paiement des acomptes mensuels et du solde dans un délai maximum de 30 jours comptés à partir de l'émission de la demande de paiement, ce qui permettrait de compenser la perte de crédit fournisseur. La seconde concerne la sanction des retards de paiement : l'entrepreneur aurait l'autorisation de suspendre l'exécution des travaux après une mise en demeure restée infructueuse mais pourrait également imposer au client le versement d'intérêts moratoires à un taux réellement dissuasif. En outre, ces entreprises estiment que leurs difficultés sont également accrues du fait d'une anticipation des règles dites de « Bâle III » ainsi que de la défaillance de Dexia à laquelle il n'a pas vraiment encore été remédié. Aussi, elle lui demande quelles mesures il compte prendre pour corriger les conséquences dommageables de la loi de modernisation de l'économie pour le secteur du bâtiment, l'anticipation de « Bâle III » et la défaillance de Dexia.

Réponse publiée le 23 avril 2013

Les entreprises du secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) peuvent se trouver confrontées à des problèmes de trésorerie en raison d'un déséquilibre entre des délais de paiement des fournisseurs, plus courts depuis la loi de modernisation de l'économie (LME) et des délais de paiement des clients inchangés. Ainsi qu'a pu le relever l'observatoire des délais de paiement, dans ses dernier rapports, les entrepreneurs du bâtiment peuvent ainsi être victimes d'un « effet ciseau » en matière de délais de paiement, particulièrement dans le cadre des marchés de travaux privés. Il faut noter que jusqu'au 31 décembre 2011, un accord dérogatoire aux délais de paiement couvrait la filière des produits, bois, matériaux et services pour la construction et la décoration dans le secteur du BTP prévoyant une réduction par palier vers les délais de droit commun. La LME a réformé le cadre général applicable aux relations commerciales en introduisant le principe d'un plafonnement des délais de paiement convenus entre les parties à 45 jours fin de mois ou 60 jours date d'émission de la facture. Les bénéfices de la réduction des délais de paiement interentreprises sont unanimement reconnus, comme en témoignent les travaux de l'observatoire des délais de paiement. Il n'en demeure pas moins que certains maîtres d'ouvrage, soumis aux conditions de règlement prévues par le code de commerce, ne respectent pas ces dispositions. C'est pourquoi l'article L. 111-3-1, introduit dans le code de la construction et de l'habitation par l'article L. 121 IV de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification et à l'allègement des démarches administratives, rappelle que les professionnels opérant dans le secteur des marchés de travaux privés sont soumis aux plafonds des délais de paiement prévus par le code de commerce et issus de la LME. L'objectif du Gouvernement demeure de veiller à la bonne application de la LME. Les services de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes effectuent annuellement, depuis 2009, une enquête multisectorielle en matière de délais de paiement. Pour l'année 2011, plus de 2 000 entreprises ont ainsi été contrôlées sur ce point et les manquements relevés peuvent donner lieu à des suites contentieuses tant devant le juge pénal que devant le juge civil, le dépassement des délais de paiement convenus ou l'exigence d'un différé de facturation entraînant la responsabilité du débiteur sur le fondement de l'article L. 442-6 du code de commerce. Il a été décidé, en 2012, d'inclure le secteur du bâtiment dans cette enquête nationale multisectorielle de contrôle des délais de paiement interprofessionnels. L'analyse et la synthèse des contrôles effectués et des suites données lors de cette enquête est en cours. Dans le cadre de ces contrôles, les entrepreneurs sont régulièrement invités à s'adresser aux directions régionales des entreprises, de la concurrence, du travail et de l'emploi afin de porter à leur connaissance tout manquement à la réglementation dont ils s'estiment victimes. L'efficacité du plafonnement des délais de paiement est renforcée par l'institution légale d'une exception d'inexécution au bénéfice de l'entrepreneur du bâtiment. L'article L. 111-3-1 du code de la construction et de l'habitation prévoit désormais que lorsque l'entrepreneur n'est pas payé dans les temps, il peut suspendre l'exécution des travaux quinze jours après avoir, sans succès, mis son débiteur en demeure de s'exécuter. Par ailleurs, l'article L. 441-6 du code de commerce prévoit expressément que les pénalités de retard sont exigibles de plein droit et sans qu'un rappel ne soit nécessaire. Ainsi, tout retard de paiement doit entraîner le versement par le débiteur, en sus du principal, de pénalités de retard calculées sur la base d'un taux dont les planchers sont fixés par le code de commerce. Ces pénalités ne sont d'ailleurs pas exclusives de toute autre somme pouvant être obtenue à titre d'indemnisation. En parallèle de ce dispositif, le secteur du BTP a développé une politique dynamique avec l'élaboration de chartes de bonnes pratiques, permettant d'améliorer les relations avec les maîtres d'ouvrage et d'anticiper les différends. En outre, les parties peuvent décider de soumettre leur marché aux normes édictées en la matière par l'association française de normalisation, qui constituent des documents de référence élaborés de manière consensuelle par les intéressés. Le recours à des solutions de financement alternatives pourra constituer une solution complémentaire aux problèmes de trésorerie rencontrés par les entrepreneurs. La mise en place de crédits de campagne et le recours à Oséo, ainsi que le préconise l'observatoire des délais de paiement, répondent à ces problématiques. En outre, les difficultés que pourraient rencontrer les PME à se financer ont conduit le Gouvernement à prévoir la mise en place d'une Banque publique d'investissement. Les ressources de cette banque pourront être ciblées sur les défaillances de marché avérées.

Données clés

Auteur : Mme Marie-Lou Marcel

Type de question : Question écrite

Rubrique : Entreprises

Ministère interrogé : Redressement productif

Ministère répondant : PME, innovation et économie numérique

Dates :
Question publiée le 7 août 2012
Réponse publiée le 23 avril 2013

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