droit international
Question de :
M. Hervé Féron
Meurthe-et-Moselle (2e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
M. Hervé Féron attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la reconstruction de la Somalie par la lutte contre la piraterie. En effet, la Banque mondiale a produit un rapport proposant de nouvelles orientations pour lutter contre la piraterie au large de la Somalie et reconstruire cette zone africaine. Si le nombre d'incidents constatés au large de la Corne de l'Afrique a sensiblement diminué entre 2011 et 2012, le rapport souligne que cela nécessité la mobilisation permanente des marines européennes, américaine, asiatiques dont le coût de 1,27 milliard de dollars en 2011 laisse penser qu'un tel déploiement est peu durable dans le long terme. Aussi, la piraterie fait supporter des surcoûts importants au commerce international, à hauteur de 18 milliards de dollars entre 2005 et 2012, pour se prémunir contre les attaques. Les pays de la Corne de l'Afrique subissent également les effets néfastes de l'insécurité : le tourisme y croît de 25 % plus lentement que dans le reste de l'Afrique subsaharienne. Les exportations des produits de la pêche ont chuté de 23,6 % dans le même temps. A contrario, le butin des rançons pourrait s'élever à plus de 350 millions de dollars pour 149 navires abordés. L'étude du modèle économique de la piraterie laisse entrevoir une organisation imbriquée impliquant de nombreux acteurs locaux, qui bénéficient du montant des rançons moyennes s'élevant à 3,06 millions de dollars (chefs de clans, chefs religieux, fonctionnaires corrompus, chefs d'entreprises locales, membres de milices islamistes). Les chefs, qui se créent une large troupe, investissent initialement 80 000 dollars pour un retour sur investissement de l'ordre de 407 000 dollars. En ce sens, les auteurs du rapport dénoncent la politique répressive mise en œuvre en considérant que le taux de succès des abordages demeurera trop élevé malgré les efforts conjoints pour tomber sous un seuil qui dissuaderait les pirates. Pour les auteurs, la solution est politique et tient dans la reconstruction de l'État somalien et dans sa capacité à passer des accords avec les pouvoirs locaux qui profitent actuellement de la piraterie. La Banque mondiale propose également de conditionner les aides au développement au renforcement de l'État et de l'emploi pacifique, loin de toute activité criminelle. Ainsi, il lui demande l'appréciation du Gouvernement sur la conditionnalité des aides au développement et sur une nouvelle orientation de la politique internationale de lutte contre la piraterie par des modalités politiques.
Réponse publiée le 25 juin 2013
La 7e conférence des parties de la convention de Nairobi pour la protection, la gestion et le développement de l'environnement marin et côtier de la région de l'Afrique de l'Est, qui s'est tenue à Maputo en décembre 2012, a adopté une résolution destinée à apporter un soutien particulier à la République fédérale de Somalie pour la mise en oeuvre de ses programmes de gestion de l'environnement marin et côtier. Le ministre des ressources nationales, sur incitation du secrétaire exécutif de la convention de Nairobi, a approché la délégation française pour solliciter l'aide de la France, tant sur le plan technique du renforcement de capacités que sur le plan financier. La France ne pourra envisager le contenu de cette aide qu'une fois la demande officiellement concrétisée par le gouvernement somalien. L'aide au développement, à condition d'être bien conçue et bien utilisée, agit en retour sur la qualité des politiques suivies et des institutions en place. Il est donc indispensable de constamment reformuler les critères d'évaluation et de renforcer le dialogue et la coopération avec les autorités locales pour une meilleure compréhension du système politique du pays et de son évolution. L'équation peut se résumer ainsi, en Somalie comme dans d'autres situations comparable : pas de développement sans sécurité, mais pas de sécurité durable sans développement. La reconnaissance officielle du gouvernement somalien par le Fonds monétaire international ou l'accession à l'accord ACP-UE de Cotonou constituent des signaux positifs de la normalisation de l'aide internationale à la Somalie. Elle doit s'accompagner, du côté du gouvernement somalien d'une normalisation dans la gestion de l'action publique. Le déploiement de forces navales reste nécessaire. La situation sécuritaire en mer s'est, certes, améliorée depuis le début de l'année 2012 et le nombre d'attaques ainsi que le volume historiquement bas de navires capturés tendent à indiquer que la menace pirate est contenue. Cette évolution est toutefois réversible tant que la situation sécuritaire, politique et économique en Somalie n'aura pas notablement évolué. Dans ce contexte, la communauté internationale et plus particulièrement l'Union européenne restent mobilisées pour soutenir les autorités somaliennes dans la lutte contre ce fléau. La fin de la transition a ainsi permis à la lutte contre la piraterie d'entrer dans une nouvelle phase, avec le développement d'une stratégie à terre, en Somalie, et le renforcement des capacités des Etats de la région. Il est essentiel que la Somalie fasse sienne la lutte contre la piraterie, dans le cadre d'une approche globale de la sécurité dans ses espaces maritimes, et se dote, avec le soutien de la communauté internationale, des moyens de juger elle-même ceux qui commettent des actes de piraterie. A cette fin, la France et l'Union européenne sont très engagées pour aider la Somalie à développer ses capacités maritimes et judiciaires.
Auteur : M. Hervé Féron
Type de question : Question écrite
Rubrique : Relations internationales
Ministère interrogé : Affaires étrangères
Ministère répondant : Affaires étrangères
Dates :
Question publiée le 21 mai 2013
Réponse publiée le 25 juin 2013