Question de : M. Luc Chatel
Haute-Marne (1re circonscription) - Les Républicains

M. Luc Chatel interpelle M. le ministre de l'éducation nationale sur la question de la gestion des enseignants qui, en raison de leur nombre (837 000 en 2012), représentent l'un des premiers enjeux des finances publiques. La Cour des comptes a récemment publié un rapport intitulé «Gérer les enseignants autrement», dans lequel elle fait le constat d'une double crise de l'éducation nationale, caractérisée par la baisse du résultat des élèves et une crise du métier d'enseignant qui perd constamment de son attractivité, allant jusqu'à poser certaines difficultés de recrutement. Elle souligne que, face à cette situation, une augmentation du nombre d'enseignants sans réforme de leurs missions serait vaine et ne viendrait qu'alourdir les finances publiques. Au contraire, elle préconise une redéfinition du métier enseignant, une meilleure valorisation des ressources humaines ainsi qu'une personnalisation de l'affectation des enseignants. Or le Gouvernement a engagé depuis le début du quinquennat la création de 60 000 nouveaux postes dans l'éducation nationale, répondant aux difficultés de l'école par une unique logique du chiffre. Dans le même temps, la loi de refondation de l'école, récemment adoptée par le Parlement, ne comporte aucune mesure de réforme des missions des enseignants, si ce n'est la création d'écoles supérieures du professorat et de l'éducation qui ne répondent pas à la question. Il lui demande donc de bien vouloir détailler les mesures qu'il entend prendre pour revaloriser et mieux gérer le métier d'enseignant, non en quantité mais en qualité.

Réponse publiée le 17 septembre 2013

Le ministre a réaffirmé à la Cour que la gestion des ressources humaines est naturellement une question centrale, à plusieurs titres : la masse salariale représente 97 % du budget du ministère de l'éducation nationale, concerne près d'un million d'agents, soit la moitié de la fonction publique d'Etat. Les enjeux financiers associés sont considérables, puisqu'ils s'élèvent à 44 milliards d'euros (hors contributions aux charges de pensions). Enfin, et surtout, la bonne gestion des personnels enseignants est une condition indispensable à la réalisation d'une politique éducative ambitieuse. Toute l'action du ministère doit être fondée sur la meilleure utilisation possible de la ressource humaine, au service de la qualité pédagogique. Cette recherche d'une mobilisation optimale des ressources humaines obéit à un système de contraintes qui peuvent être contradictoires et en font un exercice particulièrement délicat. Il s'agit en effet de pourvoir en enseignants formés l'ensemble des postes implantés dans les écoles et les établissements scolaires, de respecter les priorités légales qui, en application du statut général de la fonction publique, conditionnent l'ordre d'examen des demandes de mutation des personnels, et de rechercher la plus grande adéquation possible entre les postes à pourvoir et les compétences. Malgré cette complexité qui nécessite de gérer de façon efficiente plus de 800 000 enseignants pour former plus de 12 millions d'élèves, le ministre souhaite que la gestion des ressources humaines soit plus qualitative et plus individualisée compte tenu du haut niveau de recrutement des personnels enseignants. La Cour des comptes, dans son rapport public thématique « gérer les enseignants autrement », présente un diagnostic que le ministre partage globalement. Cependant, comme il l'a été indiqué à la Cour, il faut souligner que l'assertion selon laquelle « les moyens alloués au système éducatif ont été en hausse constante (sur la période 2008-2012) » doit être relativisée. En effet, de 2007 à 2012, près de 80 000 postes dans l'éducation nationale ont été supprimés. C'est principalement la hausse de la contribution du ministère de l'éducation nationale au compte d'affectation spéciale « pensions » qui explique l'évolution positive de son budget. Le taux de cotisations est en effet passé de 50,2 % du traitement brut en janvier 2006 à 74,6 % au 1er janvier 2013. En aucun cas cette évolution du taux de contribution ne peut être assimilée à une amélioration de la rémunération des personnels de l'éducation nationale, pas plus qu'à un coût accru du fonctionnement du système éducatif. De plus, le ministre est en désaccord avec le constat de la Cour, selon lequel « le ministère de l'éducation nationale ne souffre pas d'un manque de moyens budgétaires ou d'un nombre trop faible d'enseignants mais d'une utilisation défaillante des moyens existants ». En effet, comme il a été précisé à la Cour, l'amélioration de la gestion des ressources humaines est indispensable ; elle n'est pas pour autant suffisante à elle seule pour améliorer d'un point de vue pédagogique notre système éducatif, et des créations de postes sont aujourd'hui nécessaires pour accomplir des missions qu'il faut réaffirmer et accompagner des évolutions dans les pratiques pédagogiques. Ainsi, la remise en place d'une formation initiale des enseignants, le renforcement de l'encadrement sur les niveaux les plus sensibles (scolarisation des moins de trois, plus de maîtres que de classes, collèges dans les zones socialement défavorisées) ou l'amélioration du remplacement nécessitent des moyens humains supplémentaires, qui ne peuvent être obtenus par un simple redéploiement. A ce titre, une des conséquences les plus graves de cette politique de suppressions de postes entre 2002 et 2007 est d'avoir fragilisé les résultats scolaires des élèves, notamment de ceux issus des milieux les défavorisés.

Données clés

Auteur : M. Luc Chatel

Type de question : Question écrite

Rubrique : Enseignement

Ministère interrogé : Éducation nationale

Ministère répondant : Éducation nationale

Dates :
Question publiée le 25 juin 2013
Réponse publiée le 17 septembre 2013

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