Question de : M. Jean-Luc Warsmann
Ardennes (3e circonscription) - Les Républicains

M. Jean-Luc Warsmann attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la demande de création d'un Pôle de l'Instruction au Tribunal de Grande Instance de Charleville-Mézières porté par le Barreau des Ardennes, suite à la présentation en conseil des ministres d'un projet de loi relatif à la collégialité de l'Instruction. En effet, les Ardennes n'ont initialement pas été retenues pour accueillir un pôle de l'Instruction et l'ensemble des affaires criminelles ont été transférées à Reims, alors qu'il existait trois postes de juges d'Instruction à Charleville-Mézières avant la réforme, et que l'ensemble des acteurs judiciaires du département avaient su faire face à des affaires criminelles extrêmement importantes et notamment au dossier Fourniret-Olivier. Le Barreau des Ardennes fait valoir, après évaluation qu'un transfert sur Reims, que les affaires criminelles ardennaises n'ont pas reçu un traitement approprié. Il fait valoir que lors de la rentrée solennelle de la Cour d'appel de Reims en début d'année 2013 cette difficulté a été mise en exergue ; le Barreau note que le nombre de dossiers à juger par les Cours d'assises du ressort a été diminué par cinq et que certains dossiers font l'objet d'une « correctionnalisation » alors qu'ils auraient certainement mérité une instruction approfondie, tant dans l'intérêt des victimes que du mis en examen. Il souhaite connaître la position du Ministre quant à cette demande.

Réponse publiée le 25 février 2014

La loi n° 2007-291 du 5 mars 2007 tendant à renforcer l'équilibre de la procédure pénale, votée à l'unanimité des parlementaires sur la base des recommandations de la commission dite d'Outreau, apporte des garanties nouvelles pour les citoyens en instaurant la collégialité de l'instruction. Depuis le vote de la loi, aucune disposition n'a cependant été prise par les ministres de la justice des précédents gouvernements pour assurer la mise en oeuvre de ces dispositions et notamment obtenir les moyens budgétaires permettant les créations d'emplois de juges d'instruction et de greffiers nécessaires. Cette absence de moyens puis le projet de suppression du juge d'instruction conduisaient au report, à deux reprises, de l'entrée en vigueur de la loi et en dernier lieu jusqu'au 1er janvier 2014. Le projet de loi que la ministre de la justice a présenté au nom du Gouvernement le 24 juillet dernier en Conseil des ministres, propose une collégialité de l'instruction qui permettra à l'institution judiciaire de traiter les affaires pénales les plus graves et les plus complexes d'une manière tout à la fois plus efficace et plus respectueuse des droits de la défense et de la présomption d'innocence. Ainsi il est proposé d'écarter le principe d'une collégialité obligatoire et systématique dans toutes les affaires, tel qu'initialement conçu dans la loi de 2007, qui n'existe dans aucun autre pays, qui est de nature à alourdir inutilement la procédure d'instruction et exige de surcroît la création de plus de trois cents postes de magistrats et de greffiers. Est retenue une collégialité pour toutes les informations judiciaires à la seule demande d'une des parties, du procureur de la République, ou du magistrat instructeur. Elle interviendra aux moments essentiels de la procédure pour les demandes d'acte ou d'expertise, le respect du calendrier prévisionnel de l'instruction ou encore le règlement de l'information. Le projet innove également en permettant à la personne mise en examen de demander le statut de témoin assisté dans les dix jours de sa mise en examen et non plus après un délai de six mois et dans cette hypothèse également, l'ordonnance pourra être prise en collégialité. Enfin, s'agissant des saisines du juge des libertés et de la détention, la procédure reste inchangée, la collégialité étant retenue au niveau de l'appel de ses décisions dans un délai très bref. Afin de permettre au citoyen de bénéficier de ce triple regard, la réforme va conduire à concentrer les services de l'instruction dans les juridictions qui sont pôles de l'instruction, c'est-à-dire compétentes depuis 2007 pour traiter les dossiers criminels et ceux nécessitant une cosaisine de juges d'instruction. En aucun cas, il ne s'agit de modifier la carte judiciaire, les juridictions ne bénéficiant pas du service de l'instruction continueront comme actuellement à juger les affaires relevant de leur ressort. Ce redéploiement sera conduit en procédant à une étude attentive des charges de travail des juridictions afin d'étudier la nécessité de compenser, au cas par cas, le poste de juge d'instruction par la localisation d'un emploi de juge non spécialisé. La garde des sceaux souhaite mettre en oeuvre une collégialité permettant d'assurer la qualité du service public de la Justice et la flexibilité nécessaire à la recherche rapide et efficace de la manifestation de la vérité. Toutefois, ce projet de loi ne pouvait pas, en l'état du calendrier parlementaire, être définitivement adopté avant le 1er janvier 2014. Le gouvernement a donc présenté un amendement au projet de loi de finances pour 2014 prévoyant un ultime report d'une année de l'entrée en vigueur des dispositions relatives à la collégialité de l'instruction prévues par la loi du 5 mars 2007. Cette année supplémentaire permettra de mener dans de bonnes conditions le débat parlementaire sur le projet de loi adaptant la collégialité de l'instruction.

Données clés

Auteur : M. Jean-Luc Warsmann

Type de question : Question écrite

Rubrique : Justice

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Dates :
Question publiée le 27 août 2013
Réponse publiée le 25 février 2014

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