Question de : M. Gérald Darmanin
Nord (10e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Gérald Darmanin attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du ministre du redressement productif, chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique, sur les délais de paiement. En France, le délai contractuel de paiement inter-entreprise est de 60 jours contre 30 jours en Allemagne et seulement 37 % des entreprises le respectent. Ces délais, trop longs, pénalisent de nombreuses PME et assèchent leur trésorerie. C'est pourquoi, il souhaite savoir si le Gouvernement envisage une réduction de ce délai contractuel de paiement et s'il compte prendre des mesures afin de sanctionner davantage les mauvais payeurs et ainsi de limiter les retards de paiement.

Réponse publiée le 23 avril 2013

La loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie (LME) a modifié l'article L. 441-6 du code de commerce, en lui ajoutant un alinéa précisant que le délai convenu entre les parties pour régler les sommes dues ne peut dépasser 45 jours fin de mois ou 60 jours à compter de la date d'émission de la facture. La directive n° 2011/7/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 février 2011 concernant la lutte contre le retard de paiement dans les relations commerciales, issue de la refonte de la directive n° 2000/35/CE de même objet, n'impose pas de modifications de ces délais. En effet, l'article 3.5 de la directive prévoit un délai de paiement de 60 jours, sauf stipulation contractuelle prévoyant un délai supérieur à condition qu'il n'en résulte aucun abus. Toutefois, l'article 12.3 de ce même texte énonce que « Les États membres peuvent maintenir ou adopter des dispositions plus favorables au créancier que celles nécessaires pour se conformer à la présente directive ». Le législateur a donc opté pour une lecture combinée de ces deux articles, afin de ne pas remettre en cause l'acquis de la LME en ce qui concerne la fixation de plafonds stricts aux délais de paiement, par principe favorables au créancier. Cependant, malgré l'existence de délais plafonnés à 45 jours fin de mois ou 60 jours à partir de la date d'émission de la facture, le taux d'anomalie constaté par les services de la direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes (DGCCRF) est d'environ 30 %. L'objectif du Gouvernement demeure de veiller à la bonne application de la LME. Les services de la DGCCRF effectuent annuellement, depuis 2009, une enquête multisectorielle en matière de délais de paiement. Pour l'année 2011, 2 001 entreprises ont ainsi été contrôlées sur ce point et les manquements relevés peuvent donner lieu à des suites contentieuses tant devant le juge pénal que devant le juge civil, le dépassement des délais de paiement convenus ou l'exigence d'un différé de facturation entraînant la responsabilité du débiteur sur le fondement de l'article L. 442-6 du code de commerce. Il a été décidé, en 2012, d'inclure le secteur du bâtiment dans cette enquête nationale multisectorielle de contrôle des délais de paiement interprofessionnels. L'analyse et la synthèse des contrôles effectués et des suites données lors de cette enquête seront diffusées en fin d'année. Dans le cadre de ces contrôles, les entrepreneurs sont régulièrement invités à s'adresser aux directions régionales des entreprises, de la concurrence, du travail et de l'emploi afin de porter à leur connaissance tout manquement à la réglementation dont ils s'estiment victimes. Toute entreprise soumettant son créancier à des délais de paiement supérieurs aux plafonds légaux est susceptible de voir sa responsabilité civile engagée devant les tribunaux et se voir condamner à une forte amende civile, sur le fondement de l'article L. 442-6 I 7° du code de commerce. En outre, concernant des secteurs particuliers tels que le transport, les produits alimentaires périssables ou les vins et boissons alcoolisées, le non-respect des délais de paiement est un délit, sanctionné d'une amende pénale. Par ailleurs, l'article L. 441-6 du code de commerce prévoit expressément que les pénalités de retard sont exigibles de plein droit et sans qu'un rappel ne soit nécessaire. Ainsi, tout retard de paiement doit entraîner le versement par le débiteur, en sus du principal, de pénalités de retard calculées sur la base d'un taux dont les planchers sont fixés par le code de commerce. Ces pénalités ne sont d'ailleurs pas exclusives de toute autre somme pouvant être obtenue à titre d'indemnisation. De plus, l'article 121 de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l'allègement des démarches administratives prévoit, au c) du 1° du I, que « tout professionnel en situation de retard de paiement est de plein droit débiteur, à l'égard du créancier, d'une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement, dont le montant est fixé par décret ». Cette indemnité a pour objet de compenser les frais de recouvrement exposés en cas de retard de paiement et de décourager les paiements tardifs. Le décret n° 2012-1115 du 2 octobre 2012 fixe le montant de cette indemnité forfaitaire à 40 €. Des mesures sectorielles ont également été récemment instaurées. Par exemple, l'efficacité du plafonnement des délais de paiement, dans le secteur du bâtiment, est renforcée par l'institution légale d'une exception d'inexécution au bénéfice de l'entrepreneur du bâtiment. L'article L. 111-3-1 du code de la construction et de l'habitat, introduit par l'article 121 IV de la loi précitée, prévoit désormais que lorsque l'entrepreneur n'est pas payé dans les temps, il peut suspendre l'exécution des travaux quinze jours après avoir, sans succès, mis son débiteur en demeure de s'exécuter. En revanche, il n'a pas paru opportun de donner suite à la proposition d'insertion dans la loi d'une disposition prévoyant le paiement à 30 jours des acomptes et du solde (soit un délai réduit de moitié par rapport aux dispositions du code de commerce). Il convient en effet de veiller à laisser au maître d'ouvrage un délai suffisant pour s'assurer de l'état d'avancement du chantier et de la qualité des travaux. Enfin, le Gouvernement réfléchit à des pistes de réformes pour améliorer le dispositif de sanctions relatif aux délais de paiement. Ces réformes permettraient une réponse plus rapide en cas de non-respect des délais réglementés et permettraient d'appréhender aussi plus facilement les nombreuses pratiques de contournement des dispositions légales.

Données clés

Auteur : M. Gérald Darmanin

Type de question : Question écrite

Rubrique : Entreprises

Ministère interrogé : PME, innovation et économie numérique

Ministère répondant : PME, innovation et économie numérique

Dates :
Question publiée le 11 septembre 2012
Réponse publiée le 23 avril 2013

partager