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Question de :
M. Hervé Féron
Meurthe-et-Moselle (2e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
M. Hervé Féron attire l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur l'avis du Conseil économique, social et environnemental « Pour une politique de développement du spectacle vivant : l'éducation artistique et culturelle tout au long de la vie ». Selon le CESE, les pratiques artistiques collectives restent encore trop marquées par le capital culturel de chaque individu, notamment l'héritage familial et le diplôme ; entre 1973 et 2008, la fréquentation des équipements culturels par les ouvriers a connu une baisse tandis que celle des catégories socioprofessionnelles les plus favorisées a augmenté. Ces inégalités d'accès à l'art sont aggravées par des déséquilibres territoriaux. Le CESE observe aussi une faible structuration et un manque de cohérence des enseignements artistiques dans les écoles, collèges et lycées. Qui plus est, les artistes sont contraints par des règles qui ne permettent pas la reconnaissance de leurs interventions auprès de publics scolaires. Par conséquent, il semble nécessaire de renforcer la place de l'éducation artistique et culturelle dans le système éducatif (et ce en créant des lieux dévolus à ces activités au sein de chaque nouvel établissement scolaire, en développant des ateliers artistiques dans le cadre de conventions avec les rectorats et les DRAC et les structures culturelles) ; de développer la complémentarité des acteurs de l'éducation artistique et culturelle et de former les intervenants (en instaurant une instance de coordination des politiques la concernant au niveau régional et intercommunal mais aussi en développant les projets artistiques communs entre amateurs et professionnels ou encore en donnant aux institutions culturelles la mission de développer des formations interprofessionnelles en direction de tous les intervenants de l'EAC). Il la remercie de bien vouloir lui faire connaître son avis sur cet avis du CESE.
Réponse publiée le 18 février 2014
Le rapport rendu par le Conseil économique, social et environnemental (CESE), « Pour une politique de développement du spectacle vivant : l'éducation artistique et culturelle tout au long de la vie », apporte des compléments d'information précieux aux analyses sollicitées au travers de différentes consultations et rapports sur l'éducation artistique et culturelle (EAC) depuis plus d'un an. Si la plupart des préconisations du CESE font d'ores et déjà l'objet d'une mobilisation forte des services du ministère de la culture et de la communication et de ses opérateurs, le caractère exhaustif et détaillé du rapport permet de pointer des problématiques importantes et complexes qui requièrent toute la vigilance du ministère et de ses partenaires, afin qu'elles puissent être prises en compte de manière la plus concrète et opérationnelle. En signant, dès mai 2013, une circulaire conjointe avec le ministère de l'éducation nationale sur le parcours d'éducation artistique et culturelle, les ministères ont réaffirmé la place essentielle que tiennent les enseignements artistiques, mais également la rencontre avec les oeuvres et les artistes ainsi que la pratique dans l'éducation artistique et culturelle. Cette circulaire-cadre constitue une étape fondamentale, au premier sens du terme, dans l'élaboration d'une politique d'éducation artistique et culturelle cohérente et durable. En effet, au-delà de la complémentarité des approches qu'elle développe, elle met également en avant leur nécessaire articulation durant les différents temps et espaces de vie de l'enfant. Ainsi, il est clairement affirmé que l'éducation artistique doit se déployer au-delà du temps et des lieux scolaires, à tous les âges de la jeunesse afin de permettre à chacun de développer une pratique artistique et culturelle susceptible de l'accompagner tout au long de sa vie. Pour ce faire, plusieurs chantiers, dont la plupart sont répertoriés par le rapport du CESE, ont été ouverts. 1) La mobilisation de toutes les forces pour une meilleure coordination et une plus grande cohérence des actions. Le rapport souligne que seuls 20 % des jeunes bénéficient de dispositifs spécifiques d'éducation artistique et culturelle et que les inégalités territoriales demeurent importantes. Cependant, grâce au maillage exceptionnel d'équipements culturels de la France, la construction d'une offre plus cohérente et moins inégalitaire est possible. Les établissements publics et les services à compétence nationale sont en ce moment même sollicités pour imaginer les moyens du renforcement de leur action à l'échelle nationale en matière d'éducation artistique et culturelle mais c'est avant tout au niveau local que doit s'effectuer cette construction. Dans cette perspective, la ministre de la culture et de la communication a demandé aux directions régionales des affaires culturelles (DRAC) de se donner les moyens d'une coordination plus forte des politiques et des actions en s'appuyant sur des instances locales oeuvrant au niveau régional ou départemental. Regroupant l'ensemble des acteurs de l'éducation artistique et culturelle, ces instances permettront de mettre en oeuvre une politique coordonnée en étant au plus près des réalités et des problématiques. Dans ce cadre, une augmentation, d'ici 2015, de 10 M€ des crédits déconcentrés en faveur de l'éducation artistique et culturelle, viendra soutenir l'engagement des collectivités territoriales en la matière. Comme le montre le rapport du CESE, un travail important doit être mené au sein de ces instances pour renforcer la cohérence des différents dispositifs d'éducation artistique et culturelle mis en place au fil du temps. Sur ce point, le ministère de la culture et de la communication portera une attention toute particulière au dispositif des classes à horaires aménagés ainsi qu'aux enseignements artistiques optionnels en lycée. Au-delà de la mise en cohérence des actions, ces instances devront également aborder la question essentielle, soulevée par le rapport du CESE, de la formation des acteurs de l'éducation artistique et culturelle, dont certains relèvent directement des collectivités territoriales. 2) La formation, un préalable indispensable pour la généralisation et la qualité de l'éducation artistique et culturelle. Le rapport du CESE met en avant le manque de formation des enseignants et des artistes en matière d'éducation artistique et culturelle et rend plusieurs préconisations à ce sujet dont le développement de modules de formation EAC (écoles d'art et de culture) au sein des nouvelles Écoles supérieures du professorat et de l'éducation (ESPE). Dès la rentrée 2014, une série d'expérimentations seront menées en collaboration étroite avec le ministère de l'éducation nationale et le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, notamment sous la forme de formations associant professionnels des mondes artistiques et éducatifs ; elles seront développées à partir de l'expérience acquise dans les Pôles de ressources pour l'éducation artistique et culturelle (PREAC). Parallèlement, le ministère de la culture et de la communication souhaite introduire des modules de formation à l'éducation artistique et culturelle dans les formations des écoles supérieures placées sous la tutelle du ministère de la culture et de la communication et développer la recherche afin de nourrir cette formation des acteurs. Enfin, le ministère s'est engagé dans une dynamique interministérielle pour réinvestir activement le suivi des Centres de formation des musiciens intervenants (CFMI) et mieux prendre en compte, avec l'université, les problématiques liées aux itinéraires de formation à la médiation. La nécessité, rappelée par le CESE, d'aborder la politique d'éducation artistique et culturelle sous un angle plus européen, et donc plus interculturel, est partagée par le ministère de la culture et de la communication qui a, dans cette perspective, mis en place dès l'automne dernier un projet pilote de coopération franco-allemand entre les Régions et les Länder. Concernant le manque de reconnaissance réelle du travail des artistes auprès des publics, et notamment des publics scolaires, dont fait état le rapport du CESE, le ministère souhaite que, dans le cadre des négociations qui s'ouvriront sur le régime de l'intermittence, les partenaires sociaux prennent mieux en compte l'implication professionnelle des artistes dans les projets d'éducation artistique et culturelle en s'inscrivant dans la logique du rapport de la mission d'information de l'Assemblée nationale sur l'emploi artistique. Sur les questions de fond que constituent la cohérence et la durabilité de la politique d'éducation artistique et culturelle, les actions du ministère de la culture et de la communication sont donc en totale adéquation avec les remarques du rapport du CESE et ses préconisations. En envisageant l'éducation artistique et culturelle comme « un droit à l'élévation tout au long de la vie » et en s'intéressant tout particulièrement au spectacle vivant, qui par nature met l'accent sur la pratique collective, le rapport du CESE développe deux dimensions importantes de l'EAC : a) La meilleure prise en compte des publics qui, de par leur âge ou leur situation personnelle, sont les plus éloignés de la culture. Cette priorité a été clairement énoncée par le ministère de la culture et de la communication qui doit toutefois poursuivre le développement des actions qu'il a engagées dans ces domaines et les rendre plus visibles et plus lisibles. b) Le soutien aux pratiques des amateurs jeunes ou adultes dont l'importance et la place sont encore trop mal reconnues et souvent mal connues. 3) Pour une éducation artistique et culturelle tout au long de la vie, priorité à la jeunesse. Le Président de la République a souhaité mobiliser toutes les énergies en faveur de la jeunesse. C'est dans ce contexte que la ministre de la culture et de la communication a placé l'éducation artistique et culturelle au coeur de sa politique. La richesse artistique et culturelle de la France doit être mise en partage et accessible à tous et surtout aux plus jeunes pour que chacun d'entre eux puisse construire son propre rapport à la culture et choisir de développer sa créativité. 2014/2015 verra ainsi se mettre en place une « saison artistique dédiée à l'enfance et la jeunesse ». Cette programmation permettra de mettre en lumière cinq décennies de politiques culturelles nationales et locales en matière d'offre artistique pour le jeune public afin d'en révéler l'importance qualitative et quantitative ; elle favorisera en outre l'émergence d'une organisation encore plus solidaire et volontaire sur chaque territoire en faveur de l'accès de tous à la vie artistique. Le ministère souhaite également soutenir les pratiques artistiques et culturelles des jeunes auxquelles le rapport du CESE fait très justement référence, sans oublier pour autant les milliers d'adultes qui pratiquent pour leur plaisir et sur leur temps libre le théâtre, la musique, la danse, les arts plastiques, la photographie, etc.. . Dès 2014, un volet « jeunesse » sera développé au sein du fonds d'encouragement aux initiatives des amateurs créé par la direction générale de la création artistique du ministère. Il fera écho à la convention Culture et Université signée cet été entre le ministère de la culture et de la communication et celui de l'enseignement supérieur et de la recherche. Plusieurs rendez-vous, regroupés sous l'intitulé « Automne numérique », ont d'ores et déjà permis de partager avec le public, et notamment les plus jeunes, les enjeux liés à la multiplication des usages d'Internet et aux pratiques culturelles numériques. Cette priorité donnée à la jeunesse ne doit cependant pas occulter les autres actions engagées par le ministère afin de favoriser une éducation et une pratique artistique et culturelles tout au long de la vie. Sur ce point, le rapport du CESE est un outil précieux qui rappelle l'importance de développer l'EAC aussi bien dans le monde rural que dans le monde du travail mais aussi à l'hôpital, dans les prisons et les lieux d'accueil des personnes âgées, etc. Conscient de l'importance de ces questions, le ministère et ses services déconcentrés veillent aussi bien à l'accessibilité des équipements aux personnes handicapées qu'à leur accès aux pratiques culturelles et artistiques. De plus, sur ces problématiques par nature interministérielles, le ministère de la culture et de la communication a engagé la construction d'un cadre contractuel avec les autres ministères via la signature d'une charte d'engagements entre les ministères chargés de la culture, de l'éducation, des sports, de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative, de l'agriculture, de la ville, des affaires sociales et les associations de collectivités territoriales, ainsi que par des conventions bilatérales intégrant l'enjeu de l'EAC. C'est aussi dans cet esprit que le Haut conseil à l'éducation artistique et culturelle a été réformé et élargi à l'ensemble des ministères impliqués dans ces domaines. Le ministère de la culture tient enfin à souligner le rôle central des artistes dans ce grand projet pour l'éducation artistique et culturelle. Le soutien à la création, aux artistes et à la diffusion de leurs oeuvres est en effet une condition nécessaire et indispensable au développement de l'éducation artistique et culturelle. Le rapport du CESE constitue donc une pièce importante du processus entamé par la ministre de la culture et de la communication pour aménager concrètement les conditions du succès de l'ambition nationale que constitue l'éducation artistique et culturelle pour tous et tout au long de la vie.
Auteur : M. Hervé Féron
Type de question : Question écrite
Rubrique : Enseignement maternel et primaire
Ministère interrogé : Culture et communication
Ministère répondant : Culture et communication
Dates :
Question publiée le 5 novembre 2013
Réponse publiée le 18 février 2014