Question de : M. François Loncle
Eure (4e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

M. François Loncle attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur le développement inquiétant de la contrefaçon de médicaments. À l'instar de la langue d'Esope, le médicament peut être la meilleure et la pire des choses : il soigne et sauve des vies, mais il est aussi capable de nuire à la santé, voire de tuer, comme l'ont montré les récents scandales du Mediator, du Prozac, de la pilule Diane 35, du Tetrazepam, du Ketum, du Distilbène et de l'Isoméride. Mais en dehors de ces médicaments fabriqués par des entreprises pharmaceutiques reconnues, il y a de pseudo médicaments illicites dont la vente, plus ou moins clandestine, alimente une criminalité internationale. Il s'agit de médicaments contrefaits dont les effets peuvent être, certes, bénins, mais aussi extrêmement dangereux. Ce trafic connaît une très forte progression. Alors que la vente de ces médicaments de contrefaçon s'établissait à 36 milliards de dollars en 2005, elle avait doublé cinq ans plus tard. La France n'est pas épargnée par ce phénomène préoccupant, comme le souligne la hausse des saisies de médicaments contrefaits : 860 000 unités en 2012 contre 267 000 en 2010. En mai 2013, les douaniers du Havre ont découvert, dans un cargo provenant de Chine, un million de sachets d'aspirine qui contenaient en vérité du sucre. Des contrefaçons d'anticancéreux, d'antithrombtiques et d'antipaludéens sont de plus en plus saisies. La contrebande de médicaments se révèle particulièrement profitable et moins périlleuse que le trafic d'héroïne ou de fausse monnaie. En effet, un trafiquant, qui apporte une mise initiale de 1 000 dollars, peut s'attendre à un retour sur investissement de 500 000 dollars. De plus, il ne risque qu'une peine maximale de sept ans de prison en France et souvent moins ailleurs. Il lui demande de lui indiquer les actions envisagées pour combattre, de manière résolue et efficace, le trafic des médicaments contrefaits qui porte gravement atteinte à l'industrie pharmaceutique nationale. Il aimerait, en outre, connaître les mécanismes de surveillance de la vente de médicaments en ligne. Il voudrait aussi savoir si une réforme du code pénal ne serait pas souhaitable, afin de prévoir des sanctions plus dissuasives contre les trafiquants.

Réponse publiée le 4 février 2014

En France, la vente de médicaments en ville n'est autorisée que dans les pharmacies d'officine, dont le circuit de distribution est contrôlé par les autorités sanitaires. Dans ce contexte, les autorités sanitaires françaises mettent régulièrement en garde le public, en rappelant que tout circuit d'achat autre que celui de la pharmacie d'officine ou hospitalière n'offre aucune garantie sérieuse sur l'origine réelle du médicament, sur son efficacité pour le traitement de la pathologie qu'il est supposé soigner, sur ses conditions de conservation durant son transport, sur la sécurité du produit, sur la qualité des matières premières utilisées, sur la présence et les quantités des substances actives, ou encore sur l'absence de substances toxiques. Ainsi, dès janvier 2006, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) devenue depuis l'agence française de nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a mis en garde les professionnels de santé et le grand public, par la diffusion de communiqués, régulièrement mis à jour, sur son site internet (www. ansm. sante. fr). Puis en mai 2007, une brochure destinée à sensibiliser les pharmaciens à la lutte contre la contrefaçon de médicaments ainsi qu'un dépliant disponible dans les pharmacies d'officine mettant en garde les patients contre les risques liés à l'achat de médicaments sur internet, a été élaboré par l'agence conjointement avec le Conseil National de l'Ordre des Pharmaciens. De plus, depuis décembre 2009, l'ANSM actualise régulièrement une liste de signalements de produits contrefaits ou falsifiés sur son site internet dans une rubrique intitulée « Falsification des produits de santé » comprenant notamment un volet relatif aux risques liés à l'achat de médicaments sur Internet. Ces derniers mois, l'ordonnance du 19 décembre 2012 relative au renforcement de la sécurité de la chaîne d'approvisionnement des médicaments, à l'encadrement de la vente de médicaments sur internet et à la lutte contre la falsification de médicaments et l'ordonnance n° 2013-1183 du 19 décembre 2013 portant harmonisation des sanctions pénales et financières relatives aux produits de santé et à l'adaptation des prérogatives des autorités et des agents chargés de constater les manquements sont venues renforcées le dispositif de lutte contre la fraude. L'ordonnance du 19 décembre 2012 donne une définition juridique de la notion de médicament falsifié, met en place une contrôle plus strict de la qualité de fabrication des produits et développe les instruments de contrôle relatifs à la fabrication, à l'importation et à la distribution des substances actives en prévoyant notamment un enregistrement spécifique des importateurs fabricants et distributeurs établis dans l'Union. Cette ordonnance fixe également les règles relatives à la vente en ligne des médicaments. Le dispositif qui a été défini en France a pour objectif d'encadrer et de sécuriser la vente en ligne des médicaments. Le Gouvernement est allé aussi loin que le permet la réglementation européenne. Ainsi, seuls des sites internet de vente adossés à une pharmacie « physique » peuvent vendre en ligne, afin que le patient puisse bénéficier du conseil du pharmacien. Cet adossement est important en termes de responsabilités du pharmacien. La création de ces sites est soumise à autorisation préalable (ARS). La liste des sites autorisés est publiée sur les sites du Ministère et du Conseil de l'Ordre des pharmaciens. Seuls les médicaments soumis à prescription médicale facultative peuvent être vendus sur Internet. Enfin, les pharmaciens sont tenus d'appliquer des règles fixées par un arrêté, qu'on appelle les règles de bonnes pratiques, et qui renforcent cet encadrement. L'ordonnance du 19 décembre précitée et complétée par l'ordonnance n° 2013-1183 du 19 décembre 2013 relative à l'harmonisation des sanctions pénales et financières relatives aux produits de santé et à l'adaptation des prérogatives des autorités et des agents chargés de constater les manquements a renforcé le dispositif de sanctions, notamment par la pénalisation des activités de fabrication, courtage, distribution, vente, etc. de médicaments falsifiés, ainsi que par l'instauration d'un pouvoir de sanction financière dévolu à l'ANSM en cas de manquement aux dispositions visant à garantir la sécurité de la chaîne d'approvisionnement. Le régime de sanctions prévu par l'ordonnance susmentionnée se caractérise par une double évolution. D'une part, les infractions ne présentant pas de risque pour la santé ne relèvent plus d'une sanction pénale mais de sanctions financières prononcées par ANSM et les ARS. D'autre part, les infractions les plus graves qui entraînent des risques majeurs pour la santé voient leur régime de sanction pénale aggravé. Ces sanctions pénales sont par ailleurs doublées de sanctions financières. Au-delà de ces évolutions réglementaires, l'ANSM participe à la mise en oeuvre d'actions avec les services de gendarmerie, de police, des douanes et notamment l'office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique (OCLAESP). Ainsi l'ANSM a-t-elle participé en juin 2013, aux côtés de l'OCLAESP, à l'opération « PANGEA VI » d'envergure internationale, destinée à lutter contre la vente illicite de médicaments sur internet. L'objectif de cette opération repose sur l'identification de personnes en situation de vente illicite via internet de médicaments soumis à prescription médicale obligatoire ou susceptibles d'être de faux médicaments. Cette opération a ainsi permis d'identifier 114 sites internet illégaux de vente de médicaments, dont 29 rattachés à la France. Les informations concernant les 85 sites internet hébergés à l'étranger et proposant des médicaments aux consommateurs français ont fait l'objet d'une transmission aux autorités étrangères concernées par l'intermédiaire d'Interpol. En outre, 812 349 médicaments de contrebande et de contrefaçon ainsi que 138,7 litres et 641,5 kg de produits pharmaceutiques divers ont été saisis par la douane. Enfin, 29 procédures judiciaires réalisées par les services de gendarmerie ou de police ont conduit à de multiples auditions de suspects, perquisitions et saisies de matériels informatiques aux fins d'analyses et poursuites d'enquêtes. La lutte contre la contrefaçon et la falsification des médicaments est un objectif prioritaire de la ministre des affaires sociales et de la santé. Elle a engagé à cet effet les réformes législatives et réglementaires nécessaires pour disposer d'outils de lutte efficaces et adaptés aux infractions constatées.

Données clés

Auteur : M. François Loncle

Type de question : Question écrite

Rubrique : Pharmacie et médicaments

Ministère interrogé : Affaires sociales et santé

Ministère répondant : Affaires sociales et santé

Signalement : Question signalée au Gouvernement le 14 janvier 2014

Dates :
Question publiée le 5 novembre 2013
Réponse publiée le 4 février 2014

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