Question de : M. Claude Sturni
Bas-Rhin (9e circonscription) - Les Républicains

M. Claude Sturni attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la pratique des écoutes téléphoniques en langue étrangère ou régionale au sein de nos forces de l'ordre lors d'une enquête préliminaire. Les enquêteurs sont contraints de faire appel à des traducteurs officiels assermentés par le parquet, même s'ils comprennent la langue étrangère concernée. Bien souvent, ils sont titulaires de certificats de langues parlées ou écrites. À l'inverse, une telle procédure n'est pas exigée pour les écoutes en langue française. Déjà très coûteuses, les procédures de filature téléphoniques de suspects sont alourdies par de telles procédures. Il redoute que les enquêtes s'éternisent et insiste sur une simplification des procédures judiciaires qui garantirait aux forces de l'ordre une meilleure efficacité. Il souhaite donc connaître son avis sur l'élaboration d'une future loi dans ce domaine qui vienne rapidement simplifier l'exercice du métier de policier et de gendarme.

Réponse publiée le 18 février 2014

En application de l'article 706-95 du code de procédure pénale, le juge des libertés et de la détention peut, à la requête du procureur de la République et si les nécessités de l'enquête l'exigent, autoriser l'interception, l'enregistrement et la transcription de correspondances émises par la voie de télécommunications électroniques dans le cadre d'une enquête préliminaire (ou de flagrance) relative à l'une des infractions entrant dans le champ d'application de l'article 706-73 du code de procédure pénale (criminalité et délinquance organisées et terrorisme). Ces écoutes téléphoniques sont autorisées pour une durée maximum d'un mois, renouvelable une fois dans les mêmes conditions de forme et de durée. L'article 706-95 précité prévoit expressément que les écoutes téléphoniques doivent être mises en oeuvre selon les modalités définies aux articles 100 deuxième alinéa, 100-1 et 100-3 à 100-7 du code de procédure pénale applicables en matière d'information judiciaire. A cet égard, l'article 100-5 du code de procédure pénale dispose que « les correspondances en langue étrangère sont transcrites en français avec l'assistance d'un interprète requis à cette fin ». Les services ou unités d'enquête ne peuvent donc procéder, seuls, à la transcription en langue française des conversations interceptées en langue étrangère, et ce, quel que soit le cadre d'enquête (préliminaire, flagrance ou information judiciaire). Ce principe vise à sécuriser les procédures judiciaires. Il apparait en effet que la traduction en langue française des écoutes téléphoniques - dont la teneur est susceptible de constituer des éléments à charge essentiels - réalisée par les seuls services de police ou unités de gendarmerie en charge de la procédure serait susceptible d'être contestée par la défense dans son bien-fondé. D'une part, il pourrait être argué du fait que les enquêteurs, bien qu'ils puissent être titulaires de certificats de langues étrangères parlées ou écrites, ne disposent pas de l'expertise nécessaire, à l'instar des traducteurs-interprètes professionnels, pour procéder au travail d'interprétation et préserver la signification et le sens des propos échangés. D'autre part, la défense risquerait de mettre systématiquement en cause l'impartialité du travail effectué par les enquêteurs et de solliciter une nouvelle traduction par une personne qualifiée extérieure à la procédure. En tout état de cause, il convient de souligner que les enquêteurs ne sont jamais tenus de recourir à un traducteur-interprète ayant la qualité d'expert judiciaire dans la mesure où aucune disposition du code de procédure pénale n'exige que le traducteur-interprète requis par les services de police ou unités de gendarmerie dans le cadre d'une enquête préliminaire (ou de flagrance) soit inscrit sur l'une des listes d'experts judiciaires dressées par les cours d'appel. En application de l'article 77-1 du code de procédure pénale, le traducteur-interprète requis, s'il n'est pas inscrit sur l'une des listes précitées, devra simplement prêter serment par écrit d'apporter son concours à la justice en son honneur et en sa conscience.

Données clés

Auteur : M. Claude Sturni

Type de question : Question écrite

Rubrique : Sécurité publique

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Justice

Dates :
Question publiée le 10 décembre 2013
Réponse publiée le 18 février 2014

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