musées
Question de :
M. Pierre Morel-A-L'Huissier
Lozère (1re circonscription) - Les Républicains
M. Pierre Morel-A-L'Huissier attire l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur la fréquentation des musées en France. Il lui demande de bien vouloir lui dresser l'évolution de la fréquentation des musées en France sur la dernière décennie.
Réponse publiée le 29 janvier 2013
La fréquentation des musées est analysée sur quatre plans : les flux de fréquentation, le taux de pratique à l'échelle nationale, la composition du public in situ, la réception de l'offre par les visiteurs via les indicateurs de satisfaction. Considérées indépendamment ou de manière agrégée, les différentes catégories de données recueillies depuis une dizaine d'années témoignent d'une double tendance : reproduction et changement. Autrement dit, qu'il s'agisse de la nature des publics ou de l'expérience de visite, on aperçoit clairement le processus de transformation d'une pratique considérée longtemps comme essentiellement élitiste, urbaine, caractéristique des plus âgés. L'action publique qui, depuis un demi-siècle, a permis une reconfiguration du paysage muséal dans ses différents aspects (bâtiments, collections, dispositifs de médiation) finit par porter ses fruits. Au total, entre 2002 et 2012, le paysage muséal dessiné par les musées nationaux dépendant du ministère de la culture et de la communication s'est notablement transformé et a généré une fréquentation augmentée de 80 %. Avec 1 044 musées de France ouverts au public (sur 1212 portant l'appellation et avec 98 % répondant à l'enquête du ministère), la fréquentation 2010 s'est élevée à 57,3 millions de visites. Sept musées (Le Louvre, Versailles, centre Georges Pompidou, musée d'Orsay, musée du quai Branly, musée de l'Armée aux Invalides, musée Carnavalet et ses annexes Catacombes et crypte de Notre-Dame) ont reçu plus d'un million de visites dans l'année et représentent 43 % de la fréquentation générale soit 24,5 millions de visites. La catégorie des musées qui reçoivent entre 100 000 et 1 million de visites dans l'année se compose de 60 établissements qui ont généré un total de 15,1 millions de visites, soit 26 % de la fréquentation générale. Les musées qui ont reçu moins de 100 000 visites dans l'année forment un groupe de 977 qui constitue 31 % de la fréquentation générale, avec 17,6 millions de visites. Par rapport à 2009, la progression totale est de près de 340 000 visites et le nombre moyen de visites par musée augmente de 2,1 %. Cette progression tient principalement à trois facteurs : la très bonne fréquentation de certains musées franciliens, le très grand succès du programme d'expositions consacré aux Impressionnistes dans les musées de Basse et Haute Normandie, l'ouverture du Centre Pompidou-Metz (615 830 visites de mai à décembre). Enfin, les différentes formules d'exonération initiées par l'État et les autres collectivités territoriales pour favoriser un plus large accès de tous aux collections permanentes des musées de France se traduisent par 24,1 millions de visites soit 42 % de la fréquentation globale. En cinq ans, le nombre des visites gratuites a progressé de 35 %, contre 3 % pour les entrées payantes. L'étude, réalisée par le Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (CREDOC), pendant l'hiver 2011-2012, à la demande du département des publics de la direction générale des patrimoines du ministère de la culture et de la communication montre que le goût de la visite dans les musées, expositions et monuments est désormais partagé par une très large majorité de nos concitoyens, mais pas avec la même intensité ni les mêmes polarités. En 2011, 61 % des Français ont visité un musée, une exposition, un monument et/ou un site historique (36 % ont visité au moins un musée dans l'année, 57 % ont visité au moins un monument dans l'année). Les destinations les plus fréquentes sont les monuments religieux, les palais et châteaux, les villes et pays d'art et d'histoire et les musées et expositions dans le domaine des beaux-arts. Viennent ensuite les musées et lieux d'exposition consacrés à l'art contemporain, à la photographie ou à l'histoire et l'archéologie, mais aussi les bâtiments d'architecture contemporaine, les grottes préhistoriques et sites archéologiques, les maisons d'hommes ou de femmes illustres. Lorsqu'on agrège l'ensemble du public patrimonial et qu'on s'intéresse à sa sociologie, il apparaît que 57 % des employés, 44 % des ouvriers, 44 % des bas revenus (moins de 1 200 € par mois et par personne) et 42 % des non-diplômés se classent dans la catégorie des visiteurs. Le niveau d'éducation et de revenus continuent d'influencer les pratiques ; l'âge également avec d'un côté des étudiants et de l'autre de jeunes seniors surreprésentés parmi les visiteurs. Près de trois fois sur cinq, les visites culturelles se font dans une région différente de celle où les personnes habitent. Le niveau de revenu est le principal facteur discriminant du renoncement à la visite : les personnes disposant de revenus inférieurs à 1 200 € par mois par personne ont une propension deux fois et demie plus élevée à renoncer à une visite en raison du prix que celles qui disposent des revenus supérieurs à 3 000 €. Mais également, c'est le public « occasionnel » ou « peu visiteur » qui hésite encore souvent à franchir les portes d'un établissement dont il n'est pas familier, à moins d'y être incité par une grille tarifaire généreuse. Enfin, la gratuité de l'accès aux collections permanentes des musées et monuments nationaux est mal connue d'un Français sur deux environ, et notamment des publics directement concernés. Plusieurs campagnes d'enquêtes par sondage réalisées in situ dans les établissements en 2010 et 2011 informent sur la dynamique de l'élargissement des publics. L'enquête « Les 18-25 ans et la gratuité », réalisée en 2010 dans une quinzaine de musées nationaux à Paris et dans les régions auprès d'environ 3 000 jeunes visiteurs, montre que la gratuité contribue à la décision de visite chez deux jeunes sur trois. Ce sont les jeunes issus des milieux populaires qui s'avèrent les plus mobilisés par la gratuité. La gratuité fait découvrir (70 % venaient pour la 1re fois dans le musée où ils ont été enquêtés) et fidélise (65 % en avaient déjà fait usage dans un ou plusieurs établissements). La gratuité mobilise un peu plus souvent les garçons que les filles, ceux dont les sorties de loisir relèvent plutôt de la culture « jeunes » (concerts de rock, spectacles d'humour, cinéma) que de la culture « cultivée » (théâtre, opéra, danse et musique classique ou contemporaine). L'ensemble pense que la gratuité constitue un « coup de pouce » ou un « plus » aux pratiques culturelles (85 %), voire qu'elle est « normale » (14 %). Moins de 1 % la jugent sans importance. La gratuité du musée est totalement en phase avec cette étape de la construction identitaire du jeune adulte caractérisée par la diversification maximale des pratiques culturelles et par l'expérimentation d'une liberté éphémère et de l'apesanteur sociale. Selon la même enquête « A l'écoute des visiteurs-2010 », la part des primo-visiteurs se situe en moyenne à 53 % et celle des déjà-visiteurs à 47 %. Les visiteurs de proximité représentent 39 % du public, les touristes nationaux 30 % et les touristes étrangers 31 %. Au total, quelques portraits peuvent être dessinés à grands traits en prenant comme entrée le cycle de vie : les jeunes adultes, encouragés par la gratuité, visitent entre pairs plutôt les musées d'art ; de 35 ans à 44 ans se rencontrent dans les musées de sciences et technique, un grand nombre de visiteurs venus en famille, appartenant à toutes les catégories sociales en particulier des classes moyennes et populaires ; les musées d'histoire et les musées de sociétés et de civilisations constituent une destination fréquente à partir de 50 ans : côté musées d'histoire, on trouvera un public venant en compagnie voire en groupe organisé, moins diplômé, issu des milieux populaires et en voyage de découverte touristique ; côté musées de civilisations, on trouvera un public très diplômé, venant seul ou en couple et résidant à proximité. Si les femmes sont les plus présentes quel que soit leur âge et en étant moins diplômées que les hommes, la familiarité muséale s'acquière à un rythme différent selon le milieu social : le public populaire découvre plus tardivement le monde des musées que le public issu des classes supérieures, mais une fois qu'il y a pris goût renouvelle régulièrement l'expérience.
Auteur : M. Pierre Morel-A-L'Huissier
Type de question : Question écrite
Rubrique : Patrimoine culturel
Ministère interrogé : Culture et communication
Ministère répondant : Culture et communication
Dates :
Question publiée le 18 septembre 2012
Réponse publiée le 29 janvier 2013