Question de : M. Marc Le Fur
Côtes-d'Armor (3e circonscription) - Les Républicains

M. Marc Le Fur attire l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur le potentiel du marché chinois pour les productions cinématographiques françaises. Le cinéma est un marché en plein essor en Chine. La fréquentation des salles est passée en Chine de 172 millions de spectateurs en 2008 (430 millions d'euros de box-office) à 473 millions d'entrées en 2012 (Près de 2 milliards d'euros de box-office). Ces chiffres de fréquentation devraient encore croître de 35 % en 2013. Un tel boom s'explique par la forte croissance du nombre d'écrans (13 000 en 2012). Le marché chinois représente donc un réel potentiel pour l'industrie cinématographique française d'autant que la part de marché des films étrangers augmente dans ce pays. Le protectionnisme du gouvernement chinois dans ce secteur et notamment le système de quotas de films étrangers reste néanmoins un frein pour les entreprises françaises. Les États-unis ont signé un accord commercial avec la Chine en février 2012 en matière de cinéma. Cet accord permet notamment un assouplissement des politiques des quotas. Le nombre de films étrangers importés est relevé de 20 à 34, mais bénéficiera quasi exclusivement aux productions américaines. Ces accords bilatéraux doivent inciter la France, dont le cinéma est compétitif à l'export, à nouer des contacts et des partenariats privilégiés avec la Chine. Il lui demande donc de préciser sa position et de lui expliquer comment le Gouvernement souhaite promouvoir le cinéma français et favoriser son exportation en Chine. Il lui demande également de lui préciser le rôle, le fonctionnement, la gouvernance et les missions d'Unifrance, l'organisme chargé, entre autres, de la promotion du cinéma français à l'étranger.

Réponse publiée le 11 août 2015

I/ Promotion du cinéma français en Chine. L'enjeu présenté par le marché chinois pour le cinéma français est évident. Deux chiffres permettent d'en prendre la mesure : la Chine est un marché qui croît à une vitesse impressionnante : presque 14 nouveaux écrans par jour ; pour la 2e année consécutive, en 2014, l'Asie est passé devant l'Amérique du Nord pour devenir la 2e zone d'exportation du cinéma français, avec une part de marché de 25,5 %, représentant 28,3 millions d'entrées. Le potentiel de croissance serait très important si la France pouvait développer l'exportation de ses films, notamment en augmentant les quotas et les coproductions franco-chinoises. 1) La Chine : second marché à l'export du film français : La Chine est un marché en très forte croissance : la fréquentation est passée de 172 millions de spectateurs en 2008 à 520 millions d'entrées en 2013 (en France, la fréquentation annuelle est d'environ 200 millions d'entrées), les recettes au box-office pour l'année 2013 ont augmenté de 20 % pour atteindre plus de 2 milliards d'euros. La croissance est exponentielle, en raison de la construction de cinémas (+38 % en 2013, et un total de 18 195 écrans dont une majorité est compatible 3D), mais aussi de l'augmentation prévisible du taux de fréquentation des salles. Bien que la Chine soit le second marché à l'export du film français, la part française des films français est extrêmement minoritaire : le cinéma français reste encore peu visible en Chine, même si le nombre d'entrées sur le territoire est en forte hausse. En 2011, avec seulement 3 films, les entrées représentaient 1,7 millions ; en 2012, avec 9 films, elles s'élevaient à 4,7 millions. Alors que l'année 2013 avait permis la sortie de 6 films français pour un total de 5,2 millions d'entrées, en 2014 la progression du nombre d'entrées a été spectaculaire atteignant 17,4 millions avec 8 films dont 7,1 millions d'entrées pour Lucy de Luc Besson. Le cinéma français est également présent à la télévision, principalement sur la chaîne de cinéma nationale CCTV6 avec une vingtaine de nouveaux films acquis et la rediffusion de films de catalogue. D'autres chaînes provinciales, dont celle de Shanghai, diffusent quelques films français. Mais les acquisitions restent faibles, notamment du fait de quotas limitant la diffusion de programmes étrangers en dehors des heures du prime time. Les plates-formes telles que Youku, Tudou, Iqiyi, Sohu, Sina ou M1905 poursuivent leurs acquisitions de titres récents et de catalogues. En 2014, StudioCanal a vendu 50 titres à Youku Tudou, et la plate-forme Iqiyi a monté des partenariats avec des ayants droit français pour la mise en ligne de films français sélectionnés au festival de Shanghai et ne pouvant autrement atteindre rapidement le public chinois. 2) Stratégie de promotion du cinéma français en Chine : La Chine compte parmi les priorités stratégiques du Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC), dans le cadre de la mise en oeuvre de sa politique de promotion du cinéma français à l'étranger et de développement des exportations des oeuvres cinématographiques françaises. Compte tenu de la difficulté à pénétrer le marché chinois liée à la politique des quotas, la stratégie du CNC pour accroître la diffusion du cinéma français s'articule autour de quatre axes principaux. a) Plaider pour la création d'un nouveau type de quotas dits « d'excellence », qui bénéficierait à des films en sortie sur un nombre plus limité de copies : Le président de China Film Group Company (Monsieur Han Sanping, pdg de CFG) a initié une discussion avec le SAPPRFT (Monsieur Cao Fuchao, vice-directeur du Bureau de la propagande) pour travailler à la création de 10 nouveaux quotas pour des films étrangers de la diversité, ayant des ambitions commerciales moins importantes. Ces quotas pourraient permettre l'importation de films d'auteurs ou de prestige, primés dans les grands festivals internationaux. Aucune annonce officielle n'a été faite. b) Soutenir la mise en place d'une réglementation plus favorable aux petites productions d'une part, et propice à la diffusion légale des oeuvres sur Internet, d'autre part : En ayant à l'esprit les questions de réciprocité, à laquelle les Chinois sont particulièrement attachés, le CNC s'efforce de présenter et expliquer le système élaboré depuis plus de 60 ans pour défendre et développer son industrie cinématographique. Les démarches ont été entreprises, notamment à l'occasion de missions du CNC et Unifrance à Pékin (juin et décembre 2013 avril 2014), à Paris lors de la venue du président Xi Jingping en mars 2014 et à Pékin en décembre 2014. L'argumentaire développé met en valeur la diversité des expressions culturelles, défendues par la France. Cette diversité est essentielle, car elle permet au cinéma national de ne pas être seul face aux productions hollywoodiennes. Une régulation « à la française » devrait contribuer à protéger les films chinois et augmenter les parts de marché de la production nationale en incitant les spectateurs à se rendre au cinéma. c) Développer la coproduction pour contourner les quotas : Un accord de coproduction franco-chinois a été signé à Pékin le 29 avril 2010. Cette reconnaissance officielle des coproductions permet aux oeuvres ainsi réalisées d'être distribuées sans passer par la procédure restrictive d'importation. Elle permet également au coproducteur étranger de négocier un partage de recettes dans de meilleures conditions que pour les films importés (un tel partage étant possible dans la limite d'un pourcentage de 30 % pour le coproducteur étranger, au lieu de 17 % pour le vendeur d'un film importé) et d'acquitter un taux d'impôt sur les sociétés réduit de moitié pour les recettes ainsi générées. Cette reconnaissance permet enfin aux oeuvres de concourir aux compétitions nationales organisées avec le soutien des autorités et souvent dotées de prix financiers pour les lauréats. 8 films ont été coproduits dans ce cadre depuis 2010. Le CNC soutient également les coproductions franco-chinoises via l'Aide aux cinémas du monde qui a bénéficié à 6 projets chinois de films d'auteur depuis sa création en 2012. d) Renforcer la coopération, notamment dans le domaine de la formation, et la visibilité du cinéma chinois en France, en gage de réciprocité : Afin de développer la coopération franco-chinoise, depuis 2012, sont organisées des rencontres professionnelles franco-chinoises lors du festival de Cannes. À l'occasion de la célébration du cinquantenaire des relations diplomatiques franco-chinoises et dans le cadre du dialogue de haut niveau sur les échanges humains décidé lors de la visite de Xi Jinping en France en mars 2014, les deuxièmes rencontres franco-chinoises des professionnels du cinéma, initiées par Unifrance avec le soutien du CNC, ont également été organisées à Pékin en décembre 2014. Elles ont porté sur de nombreuses thématiques allant des politiques nationales de soutien à la production, à l'environnement juridique favorable à la création en passant par la défense de diffusion de la diversité culturelle sur les écrans et la diffusion du cinéma sur les plates-formes numériques. Elles ont permis de dégager des pistes de collaboration à développer. Plusieurs festivals bénéficiant d'un soutien non financier du CNC offrent au cinéma chinois une fenêtre de visibilité en France : il en est ainsi, par exemple, du festival du cinéma chinois de Paris, qui fêtera son 10e anniversaire en 2015, ou encore du festival du cinéma chinois en France, créé en 2011. II/ Unifrance Film International. Le CNC soutient l'action de promotion du cinéma français à l'étranger mise en oeuvre par Unifrance Film International, association présidée, depuis janvier 2013, par le réalisateur Jean-Paul Salomé, qui a remplacé le producteur Antoine de Clermont-Tonnerre. La subvention du CNC à cette association s'élevait, en 2014, à 6,65 M€, sur un budget total de 8,86 M€. Les apports restants d'Unifrance proviennent d'autres organismes publics, de recettes sur les festivals et les marchés, de partenariats et de mécénat avec des entreprises privées et des cotisations des professionnels adhérents. Unifrance intervient dans quatre domaines spécifiques : 1) L'organisation de grands festivals et de marchés autour du film français : Durant les dix dernières années, Unifrance a privilégié l'organisation, sur chaque territoire cible, de quelques grands événements accompagnés de marchés, de préférence à une multiplication de petits festivals au cours de l'année. Ainsi, le festival du cinéma français au Japon, lancé en 1993 à Yokohama et transféré à Tokyo depuis 2006, s'accompagne également d'un marché permettant la vente de films français. Ce principe a été étendu par Unifrance aux principaux pays de consommation du cinéma (Brésil, Chine, Inde, États-Unis, Russie etc.). Unifrance cherche également à assurer une présence continue du cinéma français auprès des publics étrangers, notamment grâce à des initiatives innovantes telles que l'organisation de festivals en ligne, à l'image de la manifestation intitulée « MyFrenchFilmFestival », dont la cinquième édition s'est déroulée du 16 janvier au 16 février dernier. Offrant au grand public international, grâce à des sous-titres réalisés en quatorze langues étrangères, des courts et longs-métrages français présentant un potentiel commercial mais n'ayant connu à ce jour qu'une exposition internationale limitée, ce festival a permis de toucher des internautes originaires de 207 pays différents. En 2014, il avait donné lieu à 4 millions de visionnages d'oeuvres, dont 46 000 à titre payant (le double de l'année 2013), la rémunération des ayants droit français étant notamment assurée, pour les visionnages gratuits, par un sponsor privé et par une dotation exceptionnelle du CNC destinée à soutenir ces premiers festivals dématérialisés, avant qu'ils trouvent un modèle économique pérenne. En 2015, le festival a souffert de la restriction de la diffusion d'oeuvres étrangères sur les plateformes de VàD chinoises, enregistrant 560 000 visionnages (380 000 en 2014 hors Chine). Sur le territoire français, Unifrance a par ailleurs créé, en 1999, les « Rendez-vous européens du cinéma à Paris », un événement devenu aujourd'hui l'un des trois marchés les plus importants pour les vendeurs français, avec Cannes et Berlin. L'édition de 2014 mesure le succès de l'opération, avec une hausse de 30 % de la fréquentation : 450 professionnels, ainsi que des exploitants et des journalistes, ont assisté aux projections de 110 films français. Panorama du film français en Chine : Unifrance films organise tous les ans, en partenariat avec l'ambassade de France en Chine, le Panorama du film français en Chine. Le Panorama est inclus dans la programmation des festivals internationaux du film de Pékin (16 au 23 avril) et de Shanghai (14 au 22 juin). Il est composé d'un programme de longs-métrages et deux programmes de courts métrages français qui permettent aux spectateurs de découvrir un florilège de nouveaux films reflétant la diversité des genres cinématographiques du cinéma français. Une délégation artistique et professionnelle participe aux festivals de Pékin et Shanghai, pour accompagner cette programmation. Elle assure la promotion des films auprès des médias chinois, donne des leçons de cinéma et participe à de multiples rencontres notamment avec le public. 2) Une communication renforcée sur les films français : Unifrance participe à tous les grands marchés du film (Berlin, Cannes, Toronto, Santa Monica, etc.), où elle met à la disposition des exportateurs français une infrastructure (stand, projections, etc.) qui leur permet de développer leurs ventes. Unifrance a également conçu des outils de communication sur les films français à destination des professionnels et du public étrangers : lettre d'information et catalogue des films français, édition de vidéos sur le cinéma français pour une diffusion internationale (avions, chaînes de télévision) et création d'une application gratuite sur smartphones intitulée « Le cinéma français », mise à disposition des professionnels comme du grand public et qui ambitionne de devenir un « dictionnaire de poche du cinéma français », enrichie en 2013 de 140 000 nouvelles fiches. 3) Une meilleure connaissance des marchés étrangers : Unifrance, via sa « cellule économique », a mis en place un système de suivi des résultats des films français à l'étranger en salles et, pour les principaux territoires, à la télévision. Ses équipes disposent ainsi d'une connaissance fine des marchés étrangers, et notamment de la distribution en salles des films français. Ces connaissances et données statistiques sont mises à la disposition des adhérents via le site Internet de l'association, mis en place en 2000, et constamment enrichi depuis. Par ailleurs, Unifrance initie et participe à de nombreuses études sur le cinéma français et européen et sa place à l'international. 4) Une collaboration étroite avec le CNC pour soutenir la promotion et la distribution des films français à l'étranger : Le CNC associe Unifrance à la gestion des aides à la promotion et la distribution des films français à l'étranger. Ces aides, destinées aux exportateurs français, viennent compléter la politique de promotion d'Unifrance et contribuent ainsi à améliorer les conditions de sortie des films français.

Données clés

Auteur : M. Marc Le Fur

Type de question : Question écrite

Rubrique : Politique extérieure

Ministère interrogé : Culture et communication

Ministère répondant : Culture et communication

Dates :
Question publiée le 11 février 2014
Réponse publiée le 11 août 2015

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