PLU
Question de :
Mme Sophie Rohfritsch
Bas-Rhin (4e circonscription) - Les Républicains
Mme Sophie Rohfritsch attire l'attention de Mme la ministre de l'égalité des territoires et du logement sur les conséquences de l'intégration, dans les documents d'urbanisme, de différentes réglementations et sur l'insécurité juridique dans laquelle se trouvent désormais les communes à l'égard des recours de plus en plus fréquents. L'adoption d'un plan local d'urbanisme suppose désormais l'intégration dans celui-ci du schéma de cohérence territoriale, la cartographie des zones humides, l'intégration des zones Natura 2000, la prise en compte du Grenelle II. Ceci aboutit, pour les communes, à une lourdeur incontestable dans la réalisation de leur plan local d'urbanisme, rendant la démarche peu opérationnelle. Par ailleurs, la complexité du processus ouvre la voie à des contentieux juridiques de plus en plus fréquents conduisant à soumettre les plans locaux d'urbanisme au tribunal administratif, non sur le fond mais sur la forme. Il en résulte une situation complexe pour nos communes, sur le plan réglementaire, et coûteuse sur le plan budgétaire, en raison des procédures à mettre en œuvre. Face au caractère contraignant et à l'insécurité juridique qui pèse sur les collectivités, elle souhaite connaître les intentions du Gouvernement pour que l'élaboration des documents d'urbanisme puisse être simplifiée et sécurisée juridiquement, afin de revenir à l'objectif de documents d'urbanisme dont l'objet doit être de répondre aux enjeux de maintien de la vie dans nos territoires.
Réponse publiée le 16 juin 2015
Le législateur, tout comme le Gouvernement, partagent la préoccupation de simplifier le droit de l'urbanisme afin d'en faciliter l'application opérationnelle. La loi n° 2014-366 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) du 24 mars 2014 a clarifié le rôle des schémas de cohérence territoriale (SCOT) en tant que document intégrateur des schémas régionaux de rang supérieur, comme notamment le schéma régional de cohérence écologique. Cela permet au PLU de n'être élaboré qu'au regard de sa comptabilité au SCOT, simplifiant fortement la démarche des maîtres d'ouvrage. Enfin, certaines dispositions permettent d'ores et déjà d'encadrer le contentieux des documents d'urbanisme. La loi ALUR, a ainsi mis en place un nouvel article L. 600-9 dans le code de l'urbanisme. Cet article permet au juge, sous certaines conditions, de surseoir à statuer lorsqu'il est saisi d'une demande d'annulation d'un document d'urbanisme mais que l'illégalité est régularisable. Le document d'urbanisme reste alors applicable dans l'attente de l'adoption d'un nouveau document dans un délai fixé par le juge. Le juge se prononcera ensuite et pourra valider le document puisque l'illégalité aura été régularisée. Il n'y aura ainsi pas de retour à l'application du document d'urbanisme précédent ou du règlement national d'urbanisme, ce qui est normalement le cas lorsqu'un document d'urbanisme est annulé, et pose de nombreux problèmes lorsque le document précédent est très ancien ou la commune fortement urbanisée. Par ailleurs l'arrêt du Conseil d'État « danthony » (23 décembre 2011, n° 335033) consacre et étend le principe des formalités non substantielles déjà posé par l'article 70 de la loi n° 2011 525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit. L'arrêt expose qu'un vice affectant le déroulement d'une procédure suivie à titre obligatoire ou facultatif n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il a été susceptible d'exercer une influence sur cette décision, ou s'il a privé les intéressés d'une garantie. Il précise que l'application de ce principe n'est pas exclue en cas d'omission d'une procédure obligatoire, à condition qu'une telle omission n'ait pas pour effet d'affecter la compétence de l'auteur de l'acte. En application de cette jurisprudence, la Cour administrative d'appel de Lyon a refusé d'annuler un document d'urbanisme pour lequel le centre régional de la propriété forestière avait été consulté au lieu du centre national de la propriété forestière. L'omission d'une formalité pourtant obligatoire n'ayant pas eu d'influence sur la décision, ne privant pas les intéressés d'une garantie et n'affectant pas la compétence de l'auteur du plan local d'urbanisme (PLU), le PLU n'a pas été annulé (CAA Lyon, 24 avril 2012, n° 11LY02039). Cette jurisprudence, combinée aux dispositions de la loi du 17 mai 2011, ouvre ainsi des perspectives intéressantes en matière de contentieux pour des motifs liés à des vices de forme ou de procédure, et ce pour les autorisations de construire comme pour les documents d'urbanisme. En outre, les annulations partielles des documents d'urbanisme peuvent être mises en oeuvre par les juridictions administratives. Cette technique purement jurisprudentielle est utilisée notamment lorsqu'un zonage ponctuel est contesté : elle permet de n'annuler le document d'urbanisme qu'en tant qu'il concerne les parcelles ou les zones en cause, le reste du document subsistant alors. Le juge a la possibilité de procéder à cette annulation partielle de sa seule initiative, mais les parties au contentieux peuvent également le lui demander. La loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové donne d'ailleurs valeur législative à cette technique. En ce qui concerne un autre type d'illégalité, lié à l'insuffisance ou au défaut de motivation des rapports d'enquête publique, l'article R. 123-20 du code de l'environnement permet dorénavant à l'autorité responsable de l'enquête publique de saisir le tribunal administratif pour que ce dernier demande au commissaire enquêteur de compléter son rapport. L'autorité compétente dispose d'un délai de quinze jours pour saisir le tribunal. Il importe donc qu'elle surveille attentivement la remise du rapport auprès de ses services. Le tribunal peut également demander au commissaire enquêteur, lorsque le rapport lui est remis, de compléter son rapport. Enfin, il est possible pour une commune de saisir la juridiction compétente pour obtenir des dommages et intérêts du fait d'une requête dirigée contre son document d'urbanisme qu'elle estime abusive. Elle devra toutefois démontrer la faute, à savoir le caractère abusif de la requête, le préjudice qu'elle subit, et le lien de causalité entre les deux, conformément aux règles de droit commun en matière de recherche juridique de la responsabilité.
Auteur : Mme Sophie Rohfritsch
Type de question : Question écrite
Rubrique : Urbanisme
Ministère interrogé : Égalité des territoires et logement
Ministère répondant : Logement, égalité des territoires et ruralité
Dates :
Question publiée le 4 mars 2014
Réponse publiée le 16 juin 2015