Question de : M. Stéphane Demilly
Somme (5e circonscription) - Union des démocrates et indépendants

M. Stéphane Demilly attire l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur des inexactitudes qui concernent les travaux d'un comité consultatif pour la promotion des langues régionales et de la pluralité linguistique interne. Ce comité a pour mission de formuler des recommandations visant à favoriser la pluralité linguistique interne à notre pays. Son rapport remis en juillet 2013 suscite de graves interrogations aux promoteurs de la langue picarde. À la lecture de ce rapport, la crainte est grande que la langue picarde, reconnue par le rapport de Bernard Cerquiglini réalisé en 1999 à la demande du Gouvernement visant à établir la liste des langues de France, ne soit pas concernée. En effet, on constate que le rapport cite le picard tantôt, correctement, comme une langue appartenant comme le français au groupe des langues d'oïl, tantôt en laissant entendre qu'il serait une « variété dialectale du français », niant ainsi sa réalité et son autonomie. D'un point de vue historique, linguistique et littéraire, le picard est une langue proche mais aussi distincte du français que l'occitan peut l'être du catalan ou le néerlandais de l'allemand. D'autre part, aucun représentant ni spécialiste de la langue picarde ne figure parmi les membres de ce comité, ainsi que parmi les personnes qualifiées et associations auditionnées par celui-ci. De plus, les données qui sont mentionnées en annexe du rapport semblent inexactes. Le nombre de locuteurs avancé apparaît fantaisiste et ne s'appuie sur aucune référence sérieuse, de plus il globalise l'ensemble des langues dites d'oïl sans distinguer les différences très profondes qui existent entre elles, à supposer que ce concept de langue d'oïl soit fondé. Ce rapport, par exemple, nie l'existence d'une littérature très importante et millénaire en langue picarde. Enfin, contrairement à ce qu'affirme le rapport, le picard dispose d'une orthographe communément acceptée et très largement répandue ainsi que d'une importante présence en milieu scolaire, même si la loi ne lui permet pas d'être enseignée. D'ailleurs, plusieurs méthodes d'enseignement du picard ont déjà été publiées et notamment un manuel scolaire réalisé par l'Agence pour le picard en 2013. Il lui demande si ces éléments peuvent l'éclairer sur l'avenir du picard en tant que langue régionale de France. Il lui demande si elle compte reconnaître le picard comme langue fragile pour œuvrer à son développement en lien, notamment, avec les associations culturelles et le service public de l'éducation.

Réponse publiée le 13 mai 2014

La politique publique de mise en valeur des langues régionales concerne le patrimoine linguistique national dans son ensemble, préalablement à toute classification ou dénomination. Les parlers de Picardie sont donc naturellement compris dans cet ensemble, quel que soit le nom qu'on leur donne ou les regroupements dont ils peuvent faire l'objet. Le comité consultatif pour la promotion des langues régionales et de la pluralité linguistique interne rappelait clairement, dès le début de son rapport, que la liste des langues de France établie en 1999 avait permis la reconnaissance de plusieurs langues d'oïl comme langues à part entière. Il en ira de même en cas de ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires. Si le même rapport déclarait aussi que « les langues d'oïl ont naturellement leur place dans le cours de français », c'est pour affirmer que ces langues, qui en sont aujourd'hui écartées, pourraient être enseignées dans le système éducatif, et qu'il serait dans ce cas profitable de tirer parti de leur proximité de structure et de lexique vis-à-vis du français. L'État cherche en effet à mettre en oeuvre les solutions les mieux adaptées à la situation de chacune des langues envers lesquelles il se reconnaît une responsabilité. Il continuera à oeuvrer au développement du picard, en liaison avec les collectivités territoriales et les associations de valorisation linguistique, considérant que la question des langues régionales doit être appréhendée dans un contexte plus large que le cadre strictement administratif, dans la diversité de leurs pratiques sociales et de leurs productions culturelles.

Données clés

Auteur : M. Stéphane Demilly

Type de question : Question écrite

Rubrique : Culture

Ministère interrogé : Culture et communication

Ministère répondant : Culture et communication

Dates :
Question publiée le 11 mars 2014
Réponse publiée le 13 mai 2014

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