Question de : M. Patrice Carvalho
Oise (6e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine

M. Patrice Carvalho attire l'attention de M. le secrétaire d'État, auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche, sur l'intention annoncée du Gouvernement de confier aux concessionnaires d'autoroutes un programme d'investissements de 3,6 milliards d'euros sur 22 sections du réseau, en contrepartie d'un allongement de la durée des concessions de trois années. Ce programme de financement déroge à l'article L. 122-4 du code de la voirie routière, qui prévoit que le financement d'un tel projet doit être couvert par une hausse des tarifs de péages, ce qui n'est évidemment pas souhaitable, eu égard aux nombreuses augmentations intervenues depuis la privatisation des autoroutes en 2006. Une telle disposition dérogatoire avait conduit le Parlement à légiférer en 2009 pour autoriser l'allongement d'un an des concessions autoroutières afin de financer le programme d'aménagements verts d'1 milliard d'euros. Il serait donc utile que la représentation nationale soit saisie, d'une part afin de débattre et de se prononcer sur les investissements envisagés, leur modalité de financement et d'autre part afin de procéder à un bilan de la privatisation des autoroutes, de l'état des rapports entre le Gouvernement et les sociétés autoroutières après le rapport sévère de la Cour des comptes rendu public le 24 juillet 2013. Celui-ci établissait que ces rapports étaient déséquilibrés au bénéfice des sociétés concessionnaires en raison de l'opacité qu'elles entretiennent sur la gestion du réseau. La mission d'information parlementaire, qui travaille actuellement sur le sujet, a pu récemment le vérifier, lorsque la Sanef refuse de communiquer son chiffre d'affaires pour l'année 2013 au prétexte que la société Albertis, son principal actionnaire, considère qu'il s'agit de « données sensibles ». Le rapport relève encore des hausses de tarifs de péages nettement supérieures à l'inflation, contrevenant à la règle originelle de la concession ; des augmentations, en outre, contestables couvrant non pas des investissements en vue de voies nouvelles, mais des frais d'exploitation, tels que la généralisation de l'automatisation des péages. La Cour des comptes concluait à l'insuffisance du cadre réglementaire et contractuel actuel. Cette situation justifie davantage encore la nécessité d'un débat parlementaire après les travaux de la mission d'information en cours avec notamment l'examen d'une possible nationalisation de notre réseau autoroutier car il importe, dans l'intérêt de nos concitoyens et du pays, que la puissance publique en reconquière la maîtrise.

Réponse publiée le 16 décembre 2014

La Cour des comptes a rendu un rapport relatif aux « services chargés des relations avec les sociétés concessionnaires d'autoroutes entre 2009 et 2012 » en juillet 2013. Dans ce rapport, la Cour reconnaît la qualité du travail des services du ministère dans le domaine du contrôle des infrastructures et du contrôle des tarifs, mais fait des recommandations pour conforter la position de l'État dans ses rapports avec les concessionnaires, qu'elle trouvait déséquilibrés. Depuis le début du mandat présidentiel, le Gouvernement a agi pour mettre en oeuvre les recommandations issues des rapports précédents de la Cour des Comptes et protéger les intérêts de l'État et des usagers : - en contrôlant de manière plus systématique les grilles tarifaires et en limitant le plus possible les hausses tarifaires qui sont prévues dans les contrats de concession et les contrats de plan (1,4 Md€ d'investissements en cours de réalisation). À titre d'exemple, la hausse des tarifs 2013 a été de 2 %, en recul par rapport à 2011 et 2012 (2,3 % en moyenne) ; - en demandant aux sociétés concessionnaires de documenter finement toutes les opérations d'investissement donnant lieu à compensation tarifaire et en prévoyant une récupération de la contrepartie financière en cas de retard des travaux ; - en augmentant de 100 M€ la redevance domaniale en 2012 pour tenir compte de l'avantage économique croissant obtenu ces dernières années par les concessionnaires (hausse de + 50 %). Le renforcement du pilotage des contrats s'est poursuivi. Depuis l'été 2013, des recommandations de la Cour des comptes ont été mises en oeuvre dans le cadre des relations contractuelles, afin d'offrir un service à l'usager au juste prix. Parmi ces recommandations, on peut citer la formalisation de la méthodologie des contrôles sur l'état du patrimoine, l'accroissement de leur fréquence ou encore le recours plus important à des contre-expertises. En ce qui concerne les travaux engagés par l'Assemblée nationale, la Commission des finances a mandaté l'Autorité de la concurrence pour analyser le secteur des autoroutes après la privatisation des sociétés concessionnaires. L'Autorité a publié un avis le 17 septembre 2014. Les travaux de la Commission pourront se poursuivre sur la base des recommandations de l'Autorité. En outre, lors de sa réunion du 21 mai 2014, le bureau de la commission du développement durable a décidé de la création d'une mission d'information sur la place des autoroutes dans les infrastructures de transport. Enfin, la commission du développement durable, des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire du Sénat a créé un groupe de travail sur les sociétés concessionnaires d'autoroutes. Les services du ministère se tiennent à disposition du Parlement pour répondre aux questions qui pourraient être posées par les différentes instances d'information et d'études et pour entendre leurs recommandations. Le Gouvernement est en train d'examiner les suites qu'il pourra donner aux recommandations contenues dans les rapports de la Cour des comptes et de l'Autorité de la concurrence. Des dispositions particulières destinées à encadrer les sociétés concessionnaires et assurer la maîtrise de la puissance publique sur ce secteur seront prochainement présentées au Parlement.

Données clés

Auteur : M. Patrice Carvalho

Type de question : Question écrite

Rubrique : Voirie

Ministère interrogé : Transports, mer et pêche

Ministère répondant : Transports, mer et pêche

Signalement : Question signalée au Gouvernement le 11 novembre 2014

Dates :
Question publiée le 15 juillet 2014
Réponse publiée le 16 décembre 2014

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