médicaments
Question de :
M. Christophe Premat
Français établis hors de France (3e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
M. Christophe Premat attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sur la réévaluation nécessaire et régulière des médicaments que les autorités sanitaires pourraient mettre en place. En effet, la France est l'un des pays où la consommation de médicaments est la plus forte au monde. La Commission européenne avait adopté le 7 mars 2013 une décision historique pour renforcer la pharmacovigilance dans l'Union européenne grâce au triangle renversé qui figure depuis l'automne 2013 sur la notice de certains médicaments commercialisés sur le marché européen. En France, c'est l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) qui est en charge des autorisations de mise sur le marché (AMM) des médicaments et de la pharmacovigilance. Actuellement, un médicament est réévalué une seule fois au bout de cinq ans. Ensuite, son autorisation est considérée comme définitive. Il importe de revenir à une réévaluation quinquennale de ces médicaments pour être en phase avec les recherches médicales menées sur les effets indésirables et nocifs de certains médicaments. Il aimerait savoir si cette réévaluation quinquennale serait envisageable par les autorités sanitaires françaises afin d'assurer l'efficacité des actes médicaux dans notre pays.
Réponse publiée le 21 avril 2015
Tout médicament doit faire l'objet, conformément aux dispositions de l'article L.5121-8 du code de la santé publique, avant sa commercialisation, d'une autorisation de mise sur le marché (AMM) octroyée aux termes d'une procédure européenne ou nationale selon des exigences d'efficacité, de qualité et de sécurité posées par la directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 novembre 2001 instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain. Dans ce contexte, l'évaluation d'une spécialité pharmaceutique se base sur l'appréciation d'un rapport bénéfice/risque établi à un moment donné (moment de l'évaluation), compte tenu des connaissances scientifiques disponibles, tant sur le produit concerné que sur sa substance active ou encore sur la pathologie pour laquelle son indication est revendiquée. Aussi, dans la mesure où cette balance entre les bénéfices et les risques est favorable, l'AMM du produit peut être délivrée, et ce, pour une durée de cinq ans, au terme de laquelle son titulaire devra à nouveau démontrer la qualité, la sécurité et l'efficacité de son produit, dans le cadre de la procédure dite de renouvellement d'AMM. Cette procédure permet ainsi de réévaluer le rapport bénéfice/risque du médicament concerné au regard d'une version actualisée, notamment par les données en vie réelle, et consolidée du dossier initial versé à l'appui de la demande d'AMM. Ce dernier comporte des informations administratives et des données relatives à la qualité, la sécurité et l'efficacité du médicament, y compris l'évaluation des données figurant dans les notifications d'effets indésirables suspectés et dans les rapports périodiques actualisés de sécurité, ainsi que toutes les modifications autorisées depuis la délivrance de l'autorisation initiale. Une fois renouvelée, l'AMM est délivrée sans limitation de durée. Toutefois, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) peut, à l'occasion du renouvellement, décider, notamment pour des raisons relatives à la pharmacovigilance, dont une exposition d'un nombre insuffisant de patients au médicament ou au produit concerné, que cette autorisation doit faire à nouveau l'objet d'un renouvellement quinquennal. A l'issue de ce délai, une nouvelle demande de renouvellement devra alors être effectuée, dans les mêmes conditions. Sur ce point, il importe de souligner qu'une fois renouvelée de manière illimitée, l'AMM n'est pas figée pour autant ; son rapport bénéfice/risque est réévalué de manière constante, lorsque de nouvelles données tant sur les bénéfices que sur de nouveaux risques sont disponibles. En effet, s'agissant plus particulièrement de l'existence de risques d'effets indésirables liés à l'utilisation du produit, l'ensemble des risques de survenue d'effets indésirables, qui sont identifiés au cours des essais cliniques conduits dans le cadre de la demande d'AMM et qui sont mentionnés dans le résumé des caractéristiques du produit (RCP) ainsi que dans la notice de la spécialité concernée, ne permettent pas toujours d'identifier et a fortiori de mesurer parfaitement les risques d'une spécialité en conditions réelles d'emploi. C'est pourquoi un processus de suivi des effets indésirables des médicaments est mis en oeuvre au niveau européen ainsi qu'au niveau national, dans le cadre du système national de pharmacovigilance, destiné à surveiller, évaluer, prévenir et gérer le risque d'effet indésirable résultant de l'utilisation des médicaments. La pharmacovigilance rassemble ainsi le signalement des effets indésirables et le recueil des informations les concernant, l'enregistrement, l'évaluation, l'exploitation de ces informations aux fins de prévention, la réalisation d'études ou de travaux concernant leur sécurité d'emploi (enquête nationale, suivi national et européen etc.), le suivi de rapport périodique de sécurité concernant chaque médicament, ainsi que la mise en place d'actions telles que les modifications des informations destinées aux professionnels de santé et aux patients, la suspension et le retrait de l'AMM. En outre, il y a lieu d'ajouter que certains médicaments sont soumis à une surveillance plus spécifique, soit parce qu'il s'agit d'une nouvelle substance active ou d'une nouvelle classe pharmacologique, soit, pour un médicament déjà commercialisé, en raison de la détection de nouveaux signaux nécessitant une exploration approfondie. Cette surveillance supplémentaire implique notamment la mise en place d'un plan de gestion des risques (PGR) européen et/ou national, ainsi que la mise en oeuvre d'enquêtes de pharmacovigilance. Sur ce point, il peut être précisé que la directive 2011/84/UE précitée impose désormais, depuis septembre 2013, que pour les médicaments listés par l'EMA comme devant faire l'objet d'une surveillance particulière, la notice et le RCP doivent comporter un symbole noir (triangle noir inversé) et une phrase explicative tels que déterminés par la Commission européenne. La liste des médicaments faisant l'objet d'une surveillance au niveau européen (additionnal monitoring list) est disponible sur le site de l'EMA. En résumé, il s'agit d'évaluer de façon continue, dans les conditions réelles d'utilisation du médicament, le rapport bénéfice/risque de ce dernier. Dès lors que l'évaluation des effets thérapeutiques positifs du médicament au regard des risques pour la santé du patient ou de la santé publique liés à sa qualité, à sa sécurité ou à son efficacité n'est plus considérée comme favorable dans les conditions normales d'emploi, l'AMM du produit peut être modifiée, suspendue ou retirée et ce à tout moment, au niveau national pour les AMM purement nationales, au niveau européen pour les autres (dès qu'un produit est autorisé dans plus d'un Etat membre). A ce titre, l'ANSM a notamment engagé un programme de révision du rapport bénéfice/risque des médicaments dont les AMM ont été octroyées selon une procédure nationale avant 2005, en tenant compte à la fois de l'évolution des connaissances concernant leurs bénéfices et leurs risques, ainsi que des progrès de la thérapeutique. L'objectif de cette révision est donc, d'une part de retirer ou suspendre les AMM des médicaments dont le rapport bénéfice/risque apparaît comme défavorable, compte tenu des connaissances acquises au moment de la révision, d'autre part d'évaluer la nécessité de modifier les RCP pour les adapter aux derniers développements des connaissances médicales et scientifiques. Cette révision systématique suit toutefois un ordre déterminé par les problématiques potentielles de risque et de rapport bénéfice/risque. Ainsi, cette révision a-t-elle démarré par les médicaments soumis à prescription médicale obligatoire, dont l'action est systémique (par opposition à ceux qui ont une action principalement locale), et non réservés à l'usage ou à la prescription hospitalière, ainsi qu'en fonction du niveau de service médical rendu (SMR) (critère d'amplitude d'efficacité) et du niveau de risque inhérent à son utilisation. Cette révision des AMM comporte pour chaque médicament une première étape de révision interne par l'ANSM, laquelle est complétée si nécessaire par une seconde étape, de réévaluation plus complète du rapport bénéfice/risque dans le cadre de laquelle il sera demandé au laboratoire titulaire de l'AMM de documenter les informations permettant de mettre à jour les données du rapport bénéfice/risque du médicament concerné. Parallèlement à cette révision systématique des anciennes AMM, l'ANSM poursuit le travail de réévaluation en continu du rapport bénéfice/risque des médicaments, quelle que soit la date de leur AMM, quand un signal est susceptible de remettre en cause le profil de sécurité d'un médicament. Dans tous les cas, la décision française est soumise à un arbitrage européen, traité selon une procédure adaptée au critère d'urgence, au terme de laquelle la Commission européenne statue. Ainsi, en 2012-2013, l'ANSM a réévalué 59 substances ou associations de substances. Ces réévaluations ont abouti à 13 suspensions ou arrêts de commercialisation, 10 restrictions d'indication, 36 modifications / renforcements / harmonisations des RCP. Il est à noter que 23 des 59 substances ont fait l'objet d'une procédure d'arbitrage européen. L'ensemble de ces informations est disponible sur le site internet de l'agence.
Auteur : M. Christophe Premat
Type de question : Question écrite
Rubrique : Pharmacie et médicaments
Ministère interrogé : Affaires sociales, santé et droits des femmes
Ministère répondant : Affaires sociales, santé et droits des femmes
Dates :
Question publiée le 9 septembre 2014
Réponse publiée le 21 avril 2015