Turquie
Question de :
M. Jean-Marc Germain
Hauts-de-Seine (12e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
M. Jean-Marc Germain attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères et du développement international sur la situation de l'Institut kurde de Paris. L'Institut kurde de Paris a été créé en février 1983 avec le soutien du gouvernement français pour gérer l'afflux considérable des réfugiés kurdes, généré notamment par la guerre Iran-Irak et le coup d'État militaire en Turquie ; il vise à faire connaître à l'opinion publique la culture, l'histoire et la situation politique du peuple kurde, en informant et documentant journalistes, chercheurs, étudiants, associations et parlementaires. Cet institut est rapidement devenu une référence en Europe et au-delà pour tous ceux qui s'intéressaient à la question kurde. Il est à l'origine de colloques et de conférences, d'actions de défense des droits de l'Homme, d'appels internationaux en faveur d'un règlement pacifique de la question kurde, autant d'actions qui ont été appuyées par une vingtaine de Prix Nobel, ainsi que de nombreux ministres et parlementaires des pays européens et des États-unis. Plusieurs pays, et en premier lieu la France, ont mis à sa disposition des bourses qui ont permis de former plusieurs centaines d'étudiants kurdes, devenus par la suite avocats, médecins, ingénieurs, diplomates, universitaires dont le rôle a été majeur dans la construction d'une société démocratique au Kurdistan et aussi pour l'intégration républicaine des Kurdes en France. Organisme laïc indépendant et non partisan, ouvert à tous les Kurdes, l'Institut kurde a longtemps été considéré comme un relais entre la France et le Kurdistan, avant l'émergence du Kurdistan autonome moderne, facilitant notamment le dialogue entre les leaders kurdes et les autorités françaises. En 1993, le gouvernement de Pierre Bérégovoy lui accorda le statut de fondation reconnue d'utilité publique en raison de sa contribution à l'intégration républicaine des Kurdes en France. Le gouvernement de Lionel Jospin, conscient du rôle des associations pour l'intégration, avait mis en place un dispositif du renforcement de ce secteur avec des conventions triennales dont bénéficiait l'Institut kurde au vu de son action, doté d'un financement public de près de 600 000 euros par an. Or, depuis 2002, ce financement a été progressivement réduit pour disparaître totalement sous la présidence de Nicolas Sarkozy, arguant du fait que le gouvernement du Kurdistan désormais reconnu devait subvenir aux moyens de l'Institut kurde de Paris. Pourtant, l'Institut kurde, qui entretient la plus importante bibliothèque d'Europe, est un centre de ressources unique et un lieu de mémoire pour les quelques 250 000 Kurdes de France, qu'il est regrettable pour notre pays de ne pas continuer à valoriser et promouvoir au vu de l'importance de leur action pour l'intégration. De surcroît, l'Institut Kurde de Paris ne peut plus bénéficier de l'aide du Kurdistan, car ce dernier est privé depuis un an de sa dotation financière par Bagdad, et doit surtout assumer une charge financière extrêmement lourde avec l'afflux de réfugiés syriens et irakiens, ainsi que la guerre très couteuse face à Daesh. Aujourd'hui, face à cette situation, il souhaite savoir quelles réponses peut apporter le Gouvernement français pour assurer sur son sol la pérennité de l'Institut kurde, qui porte depuis plus de 30 ans dans le débat public en France et en Europe la voix de ce peuple sans État et risque d'est condamné à disparaître. Il apparaît en effet indispensable de lui permettre de poursuivre ses missions fondamentales, et témoigner ainsi de notre solidarité sans faille envers le Kurdistan et maintenir les liens d'amitié fidèle qui nous lient depuis plusieurs décennies.
Réponse publiée le 9 juin 2015
Historiquement attaché à cette institution, le ministère des affaires étrangères et du développement international a contribué régulièrement au financement de l'Institut kurde de Paris. Les sommes versées annuellement s'élevaient à 115 000 € de 2002 à 2004. En 2010, la contribution du ministère était de 80 000 €. Cette baisse progressive des crédits répond à la montée de l'autonomie institutionnelle et financière du gouvernement régional du Kurdistan (GRK). La culture joue un rôle central dans la relation d'amitié et de confiance que la France entretient avec le peuple kurde. Ainsi, dans la région autonome du Kurdistan, la France dispose de deux écoles, d'un institut culturel et d'une antenne de l'Institut français du Proche-Orient, installée dans la citadelle historique d'Erbil, classée au patrimoine mondial de l'UNESCO. A Paris, le ministère des affaires étrangères et du développement international finance trente bourses par an à destination d'étudiants kurdes dont la candidature est présentée par l'Institut kurde de Paris pour un montant total annuel de plus de 400 000 euros. La France est par ailleurs pleinement engagée en Irak et auprès des autorités kurdes. Suite à la visite de Laurent Fabius le 7 août, elle livre des armes au Kurdistan irakien depuis le 13 août dans le cadre de la lutte contre Daech. Le Président de la République s'est rendu à Bagdad et à Erbil le 12 septembre pour témoigner son soutien aux autorités. La France a livré depuis l'été dernier près de 100 tonnes d'aide humanitaire à l'Irak, alors que le Kurdistan irakien accueille près de la moitié des réfugiés et déplacés internes d'Irak. La France est pleinement consciente des difficultés financières actuelles que traverse le Kurdistan irakien. C'est pourquoi, malgré le contexte budgétaire contraint qui est le nôtre, le ministère des affaires étrangères et du développement international a poursuivi ses efforts financiers en faveur de l'IKP en lui attribuant un financement exceptionnel de 35 000 euros en 2012 puis en 2013, et lui a versé cette même somme en novembre 2014. Enfin, pour l'année 2015, le ministre a décidé d'attribuer une subvention de 55.000€ à l'Institut kurde de Paris.
Auteur : M. Jean-Marc Germain
Type de question : Question écrite
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Affaires étrangères
Ministère répondant : Affaires étrangères
Dates :
Question publiée le 24 février 2015
Réponse publiée le 9 juin 2015